Le cancer pulmonaire : histopathologie et apport des tests moléculaires

Le cancer pulmonaire est la première cause de mortalité par cancer dans le monde. Les carcinomes bronchiques non à petites cellules représentent 85% des cancers pulmonaires.

 

F. Oudjida, A. Slimani, Service d’Anatomie Pathologique, CHU Issaad Hassani, Béni Messous, Faculté de Médecine d’Alger

 Date de soumission : 11 Octobre 2020.

Résumé : Le cancer pulmonaire est la première cause de mortalité par cancer dans le monde. Les carcinomes bronchiques non à petites cellules représentent 85% des cancers pulmonaires. La classification de l’OMS 2015 des tumeurs du poumon reconnaît trois principaux groupes : les adénocarcinomes, les carcinomes épidermoïdes et les tumeurs neuro-endocrines. Les progrès réalisés dans la compréhension des mécanismes moléculaires dans la carcinogénèse de ces tumeurs ont abouti au développement des thérapies ciblées et l’amélioration de la survie des patients. La réalisation des tests moléculaires prédictifs de thérapie ciblée dans l’adénocarcinome fait partie actuellement de l’arbre décisionnel du thérapeute.

Mots clés : adénocarcinome, driver mutations, EGFR, ALK, immunohistochimie.

 

Abstract: Lung cancer is the leading cause of cancer death worldwide. Non-small cell lung carcinomas account for 85% of lung cancers. The 2015 WHO classification of lung tumours recognize three main groups: adenocarcinomas, squamous cell carcinomas and neuroendocrine tumours. Advances in understanding the molecular mechanisms involved in the carcinogenesis of these tumours have led to the development of targeted therapies and improved patient survival. Performing predictive molecular tests for targeted therapy in adenocarcinoma is currently part of the therapist’s decision tree.

Key words: adenocarcinoma, driver mutations, EGFR, ALK, immunohistochemistry.

 


 

Introduction

Le cancer du poumon représente la première cause de mortalité par cancer chez l’homme dans le monde [1].

Il est classé en deux principaux groupes histologiques : le carcinome pulmonaire à petites cellules (CPPC) qui représente 15% et le carcinome pulmonaire non à petites cellules (CPNPC) qui représente 85% de tous les cancers du poumon [2].

Les CPNPC sont généralement subdivisés en adénocarcinome, carcinome épidermoïde et carcinome à grandes cellules. L’adénocarcinome est actuellement le type histologique le plus fréquent parmi les non à petites cellules.

La classification des tumeurs du poumon de l’OMS 2015 a permis d’établir des définitions précises de certaines entités en s’aidant de l’aspect radiologique, de l’aspect histologique et immunohistochimique. Elle a également intégré les données moléculaires.

L’adénocarcinome abrite des anomalies moléculaires à type de de mutations ponctuelles, délétions et translocations qui sont détectées sur prélèvement fixé au formol et inclus en paraffine (FFPE : Fixed formalin embedded in paraffin).

Les mutations, ou les translocations intéressant ces gènes sont actuellement les cibles d’activité de thérapeutiques dites ciblées et sont recherchées par différentes techniques.

Les mutations décrites en cancérologie pulmonaire sont des mutations somatiques. C’est-à-dire acquises par les cellules cancéreuses au cours du développement tumoral. Elles sont en général mutuellement exclusives.

Le rôle essentiel de la médecine personnalisée est d’adapter le traitement individuel du cancer du poumon basé sur une classification histologique précise et des informations sur les biomarqueurs. Donc, la caractérisation du type histologique du cancer du poumon joue un rôle important dans l’approche multidisciplinaire dans le diagnostic et la prise en charge du cancer du poumon.

Reconnaissant la diversité biologique du cancer du poumon, une approche complète et précise de la classification de ces tumeurs a été développée, ce qui est important pour le traitement et pour le pronostic.

 

Adénocarcinome

L’adénocarcinome est le type le plus fréquent du cancer du poumon, représentant plus de 40% des cancers du poumon, 60% des CPNPC et plus de 70% des cas réséqués chirurgicalement [2,3,4].

L’incidence de l’adénocarcinome a augmenté régulièrement au cours des dernières décennies. L’adénocarcinome pulmonaire est le plus souvent de localisation périphérique avec fibrose centrale et rétraction pleurale.

La classification OMS de 2015 divise les adénocarcinomes en adénocarcinome in situ (AIS, lésion pré-invasive), adénocarcinome à invasion (AIM),ou adénocarcinome invasif, en se basant sur le degré de l’envahissement (Tableau 1). En effet Le taux de survie sans maladie de l’AIS et de l’AIM lorsque la tumeur est complètement réséquée est 100% [5].

Tableau 1. Classification OMS 2015 des tumeurs du poumon [2]

 

 

Les lésions pré invasives ou à invasion minime

  • Adénocarcinome in situ

L’adénocarcinome in situ (AIS) représente des tumeurs de taille relativement petite (≤3 cm) d’architecture lépidique avec des cellules néoplasiques se développant le long de structures alvéolaires préexistantes, sans signe d’invasion stromale, vasculaire ou pleurale, et sans diffusion aérogène [6] (voir Fig. 1 A et B). Il est diagnostiqué uniquement sur pièce opératoire.

La croissance lépidique est généralement en corrélation avec l’opacité du verre dépoli sur les radiographies.

  • Adénocarcinome à invasion minime AIM

L’AIM correspond à une lésion localisée unique dont la taille tumorale est ≤ 3cm. C’est une prolifération tumorale d’architecture lépidique avec foyer(s) invasion(s) d’invasion ≤ 5mm (micro-invasion) sans embole vasculaire ni infiltration pleurale, et il n’existe pas de progression aérienne.

 KP1

KP5

KP6Figure 1. Images histologiques des adénocarcinomes et CPPC. A & B : Adénocarcinome de morphologie lépidique. (A : HE×20, B : HE×40). C : ADK papillaire (HE×20), D : ADK micro papillaire (HE×40), E : ADK papillaire TTF1 positif (IHC×40), F : CPPC (HE×40).

Adénocarcinomes invasifs

La plupart des adénocarcinomes invasifs sont composés de sous-types morphologiques mixtes ; ceux-ci sont classés en fonction des aspects architecturaux prédominants. Chaque tumeur est classée selon le pattern architectural prédominant, y compris lépidique, acineux, papillaire, micropapillaire et solide.

Cette classification basée sur l’architecture a une signification pronostique. En effet les adénocarcinomes à prédominance lépidique ont un pronostic plus favorable que les adénocarcinomes à prédominance acineuse et papillaire qui sont à pronostic intermédiaire, alors que les adénocarcinomes à prédominance solide et micro-papillaire ont un mauvais pronostic [7,8,9].


 KP2

KP3

KP4

Figure 2 : Images histologiques des adénocarcinomes et carcinome épidermoïde, A & B : ADK acinaire (A : HE×20, B : HE×40), C & D : Carcinome épidermoïde kératinisant, E : Carcinome épidermoïde non kératinisant (HE×40), F : Carcinome épidermoïde bronchique non kératinisant : Expression nucléaire à la P63).

 

  • Adénocarcinome lépidique. Une croissance lépidique est fréquemment observée dans les adénocarcinomes pulmonaires. Le modèle de croissance lépidique désigne des cellules tumorales se propageant le long des structures alvéolaires préexistantes.
  • Adénocarcinome acineux. L’adénocarcinome acineux est un type d’adénocarcinome avec des cellules tumorales organisées dans la structure glandulaire classique sur un stroma fibro-élastique (Fig. 2 A,B).
  • Adénocarcinome papillaire. Les cellules tumorales forment une architecture papillaire avec des cellules tumorales tapissant la surface d’axes fibro-vasculaires ramifiés (Fig. 1 C).
  • Adénocarcinome micro-papillaire. Les cellules tumorales forment des touffes cellulaires individuelles sans axe fibro-vasculaire (Fig. 1 D,E).
  • Adénocarcinome Solide. Les cellules tumorales n’ont pas de disposition particulière, elles s’agencent en massifs.

 

Rares Variantes de l’Adénocarcinome Invasif. Les variantes rares de l’adénocarcinome invasif comprennent l’adénocarcinome mucineux invasif, l’adénocarcinome colloïde et fœtal et l’adénocarcinome entérique.

 

Les carcinomes épidermoïdes 

Ils représentent environ 30% des cancers bronchopulmonaires en Europe et aux États-Unis et leur fréquence décroit régulièrement au profit des adénocarcinomes.

Il s’agit de prolifération épithéliale maligne dont les cellules élaborent de la kératine et/ou sont séparées par des ponts d’union intercellulaires (Fig. 2 C,D,E,F). La forme basaloïde est reconnue par la présence de cellules de petite taille formant des lobules délimités par une assise palissadique et ébauchant des plages de différenciation épidermoïde.

 

Les carcinomes à grandes cellules 

Ils représentent moins de 3% des cancers du poumon [10,11].

Il s’agit de CPNPC peu différenciés ne présentant pas les critères de différenciation des carcinomes épidermoïdes ou glandulaires. Les cellules néoplasiques sont dépourvues de muco-sécrétion et n’expriment pas les marqueurs malpighiens ou glandulaires en IHC (Immunophénotype nul). Il s’agit donc d’un diagnostic d’exclusion. Le diagnostic est porté uniquement sur pièce opératoire.

 

Tumeurs neuroendocrines : TNE

Les TNE en tant que groupe sont des tumeurs du poumon relativement fréquentes, représentant environ 20% à 25% des cancers du poumon [12,13].

La classification de l’OMS de 2015 sépare ce groupe de tumeurs en 4 grandes catégories : les carcinoïdes typiques, les carcinoïdes atypiques, les carcinomes à petites cellules (ou CPPC) et les carcinomes neuro endocrine à grandes cellules (CNEGC) (Tableau 2) [2].

  • Tumeurs carcinoïdes 

Tumeur caractérisée par une architecture dite organoïde traduisant une différenciation neuroendocrine, associant des travées, un aspect insulaire, des palissades et des arrangements en rosettes.

Les carcinoïdes typiques présentent moins de deux mitoses pour 10 champs à fort grandissement et jamais de nécrose. Par contre, ils peuvent présenter des atypies cytologiques, une cellularité accrue et une invasion lymphatique.

Les carcinoïdes atypiques présentent entre deux et 10 mitoses pour 10 champs et /ou des foyers de nécrose focale.


 

  • Carcinomes neuro endocrine à grandes cellules 

Le CNEGC présente typiquement une architecture organoïde associant rosettes et palissades péri-vasculaires traduisant une différenciation neuroendocrine. L’activité mitotique est élevée (plus de 11 mitoses pour 10 champs à fort grandissement ou pour 2 mm2) et la nécrose est abondante. Ce diagnostic doit être confirmé par l’immunohistochimie ou la microscopie électronique. Les carcinomes neuroendocrines composites comportent de plus un contingent glandulaire, épidermoïde, à cellules géantes ou fusiformes, associé au contingent neuroendocrine.

  • Carcinomes à petites cellules : CPC

Tumeur neuro endocrine hautement maligne, d’architecture solide, en nids, trabéculaire comportant de larges foyers de nécrose.

Les cellules sont de petite taille, < 3 lymphocytes, les limites cytoplasmiques sont imprécises avec un rapport nucléo cytoplasmique élevé (Ratio N/C haut).

Le noyau est hyperchromatique doté d’une chromatine fine granulaire. Il n’y a pas de nucléole. L’index mitotique est très élevé (Fig. 1 F).

Tableau 2 : Critères diagnostiques et système de grading des TNE du poumon selon la classification de l’OMS 2015 [2]

 

Carcinoïde

Typique

Carcinoïde

Atypique

CNEGC

Carcinome à petites cellules

Grade

Bas

Intermédiaire

Haut

Haut

Morphologie

TNE bien différenciée

TNE bien différenciée

TNE peu différenciée

TNE peu différenciée

Mitoses/2mm2

0-1

2-10

>10 moyenne 70

>10 moyenne 80

Nécrose

Absence

Présente (focale punctiforme)

Présente (extensive)

Présente (extensive)

 

Autres types de carcinomes non à petites cellules

Les carcinomes adénosquameux . Ils représentent de 0,6 à 2,3% de tous les carcinomes bronchopulmonaires. Tumeurs malignes associant un contingent glandulaire et un contingent épidermoïde, chacun devant représenter au moins 10% du volume tumoral [2,14].

 

Les carcinomes sarcomatoïdes . Ce sont des tumeurs rares représentant moins de 3% des cancers pulmonaires et qui sont liées au tabagisme dans 90% des cas [2].

Il s’agit de carcinomes non à petites cellules, soit pléomorphes c’est à dire associant des contingents épidermoïdes, glandulaires ou à grandes cellules avec des contingents à cellules géantes et/ou à cellules fusiformes, soit de carcinomes à cellules fusiformes purs, de carcinomes à cellules géantes purs, ou encore de carcinosarcomes et de blastome pulmonaire (toujours biphasique).

Autres tumeurs du poumon

Carcinomes des glandes salivaires : carcinome muco-épidermoïde, carcinome adénoïde kystique ; ils représentent moins de 1% de l’ensemble des cancers du poumon, ils ne sont pas reliés au tabac.

 

Autres variantes : carcinome lymphoépithélial, il se caractérise par l’association d’une prolifération en nappes de cellules de grande taille, à noyau nucléolé, et une infiltration lymphocytaire dense. Les cellules tumorales expriment le génome de l’Epstein-Barr Virus.

 

Le carcinome NUT, carcinome peu différencié agressif défini par la présence du réarrangement du gène NUT (nuclear protein in testisi.e.NUTM1), il survient chez le sujet jeune.

 

Tumeurs non épithéliales. Outre les carcinomes pulmonaires décrits ci-dessus, d’autres types de tumeurs peuvent survenir dans le poumon, y compris les tumeurs mésenchymateuses, les tumeurs lymphohistiocytaires, le mélanome, les tumeurs germinales et autres.

 

Immunohistochimie

L’immunohistochimie (IHC) constitue la méthode complémentaire la plus importante pour le diagnostic et la classification du cancer du poumon. En effet grâce à l’utilisation d’anticorps spécifiques, le diagnostic anatomopathologique est porté avec précision limitant ainsi le risque d’erreur notamment sur prélèvements biopsiques.

Les marqueurs couramment utilisés pour déterminer la différenciation glandulaire incluent le TTF-1 et la Napsine A, exprimés dans plus de 85% des adénocarcinomes [15,16,17].

L’IHC permet de distinguer dans les tumeurs peu différenciées entre adénocarcinome et carcinome épidermoïde grâce à un panel d’anticorps : TTF1, Napsine A, P40, CK5/6 (Tableau 3).

Elle est également utile pour démontrer la différenciation neuroendocrine dans les tumeurs présentant une morphologie neuroendocrine. Les marqueurs neuroendocriniens couramment utilisés comprennent CD56, synaptophysine et chromogranine.

Un carcinome peu différencié négatif pour tous les marqueurs ci-dessus (immunophénotype nul) est classé comme «CPNPC, NOS» NOS : Not Otherwise Specified sur prélèvement biopsique [18].

L’IHC a un rôle dans la détermination des biomarqueurs prédictifs de réponse à la thérapie ciblée, en utilisant des marqueurs anti-ALK et anti-ROS1.

Tableau 3 : Algorithme pour le sous typage des carcinomes bronchiques non à petites cellules peu différenciés selon leur réactivité immunohistochimique dans les prélèvements biopsiques [19]

NP63 (P40)

CK5/6

TTF1

Napsine A

Diagnostic

+

+

Carcinome épidermoïde

+

Carcinome épidermoïde

+

+

Adénocarcinome

+

Adénocarcinome

Carcinome non à petites cellules NOS

ΔNp63 (p40), Cytokératines (CK) 5/6, thyroid transcription factor-1 (TTF-1) and Napsine A (novel aspartic proteinase of the pepsin family)


Tests moléculaires dans le cancer du poumon

L’analyse moléculaire des anomalies génétiques a permis la compréhension des mécanismes de carcinogénèse et a apporté un changement de paradigme dans le ciblage thérapeutique et la surveillance des patients atteints de cancer pulmonaire. La détection d’altérations génétiques spécifiques s’est avérée efficace pour prédire la réponse au traitement et stratifier le pronostic [20,21].

La thérapie ciblée utilisant des molécules (substances) spécifiquement conçues pour inhiber les altérations génétiques induites par les mutations offre plus d’efficacité et moins de toxicité que les agents chimiothérapeutiques génériques et donc une amélioration substantielle des résultats par rapport à la chimiothérapie standard dans le traitement du CPNPC avancé [22].

Avec l’avènement des inhibiteurs de la tyrosine kinase (TKI), il est important de rechercher les mutations génétiques chez les patients atteints de cancer du poumon. La mutation EGFR et la translocation ALK sont les oncogènes les plus ciblés dans le CPNPC et sont maintenant réalisés en routine [23].

Le gène du récepteur de croissance épidermique l’EGF : situé sur le bras court du chromosome 7 est constitué de 28 exons (200kb) et code une glycoprotéine d’un poids moléculaire de 170 kDa. La protéine EGFR est impliquée dans les mécanismes de signalisation intracellulaire contrôlant la croissance, la survie, l’adhésion, la migration et la différenciation cellulaire.

Les mutations de l’EGFR sont responsables d’une activation des voies de signalisation à l’origine de la prolifération tumorale [24,25]. Ces mutations oncogéniques sont retrouvées au sein des exons 18 à 21 codant le domaine tyrosine kinase du récepteur. Ces mutations intéressent l’exon 19 et l’exon 21, et correspondent à des délétions de l’exon 19 (46%) et mutations de l’exon 21 L858R (39%).

Ces mutations sont rencontrées dans les adénocarcinomes, les femmes, non-fumeurs et les asiatiques [26,27].

La fréquence de l’activation de l’EGFR dans les CPNPC a permis le développement d’inhibiteurs sélectifs de la tyrosine kinase de l’EGFR (TKIs), comme le Gefitinib et l’Erlotinib. Ces médicaments permettent une survie significativement supérieure à celle observée avec les traitements standards.

La fusion du gène Anaplastic Lymphoma Kinase ALK (localisé en 2 p 23) et Echinoderm Microtubule associated proteine-Like 4 (EML4) a été identifiée dans un groupe de CPNPC, correspondant à des patients ne répondant pas à un traitement par TKI-EGFR et plus souvent non-fumeurs de sexe masculin et plus jeunes, diagnostiqués à un stade avancé.

Le type histologique correspond plus fréquemment à des adénocarcinomes bronchiques proximaux peu différenciés avec mucosécrétion, ou des carcinomes à cellules isolées en bague à chaton. Cette anomalie moléculaire est exclusive avec les mutations EGFR.

La sensibilité élective de ces patients à un traitement par Crizotinib, justifie la recherche de cette altération moléculaire, malgré la fréquence estimée entre 3% et 7% [28].

Outre l’EGFR et l’ALK, une multitude d’autres biomarqueurs sont activement évalués ou utilisés comme cibles thérapeutiques [29].

ROS1 est un récepteur tyrosine kinase qui peut être réarrangé dans 1% à 2% des adénocarcinomes pulmonaires. Le réarrangement de ROS1 est mutuellement exclusif avec les altérations d’EGFR et ALK [30]. Il a été démontré que le Crizotinib est efficace chez les patients présentant un réarrangement ROS1 et est approuvé pour un tel traitement.

La réalisation des tests moléculaires pour identifier les mutations prédictives de thérapie ciblée a fait l’objet de plusieurs actualisations par les sociétés savantes. Les guidelines de 2018 par CAP (College of American Pathologists), IASLC (International Association for the Study of Lung Cancer) et l’AMP (Association for Molecular Pathology), [31,32] recommandent :

  • Les techniques d’identification des mutations doivent être suffisamment sensibles pour détecter des anomalies dans des échantillons comportant au moins 20% de cellules tumorales.
  • L’hyperexpression de la protéine totale EGFR (IHC) et les variations de nombre de copies du gène EGFR (FISH) ne permettent pas de sélectionner les patients à traiter par TKI anti-EGFR.
  • La détection des anomalies EGFR, ALK, ROS1 doit être faite pour tout patient atteint d’adénocarcinome à un stade avancé.
  • La détection des anomalies BRAF, Her2, RAS, MET et RET peut se faire chez les patients négatifs pour les précédentes anomalies, ou si elle est incluse dans un test multiplex de type NGS
  • Les techniques de séquençage multiples sont préférées à de multiples tests uniques.
  • En cas de discordance, des techniques alternatives doivent être disponibles.

 

Conclusion

Le cancer du poumon est au 1er rang des cancers et la 1ère cause de mortalité par cancer chez l’homme dans le monde et en Algérie. Le diagnostic anatomopathologique est essentiel pour la prise en charge du patient.

L’adénocarcinome est le type histologique le plus fréquent. L’immunohistochimie aide à établir le diagnostic grâce à l’utilisation de marqueurs spécifiques : TTF1 et Napsine A pour l’adénocarcinome et P40 pour le carcinome épidermoïde, elle permet également de prédire la réponse aux thérapies ciblées grâce aux anticorps ALK et ROS1.

Les progrès réalisés dans le domaine de la biologie moléculaire grâce à l’instauration des tests moléculaires à la recherche des mutations de l’EGFR sur prélèvement biopsique est devenu indispensable, et ce dans un but de thérapie ciblée.

 

Liens d’intérêts : Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts.

 


 

Références

 

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Manifestations radio-cliniques et diagnostic du cancer bronchique

Les premières étapes de la prise en charge d’un cancer bronchique sont fondamentales pour le choix du traitement et donc le pronostic du patient.

 

S. Souilah, Service de Pneumologie CHU Lamine Debaghine, Bab El Oued

 

Date de soumission : 11 Octobre 2020.

 

Résumé : Les premières étapes de la prise en charge d’un cancer bronchique sont fondamentales pour le choix du traitement et donc le pronostic du patient. Elles comportent le diagnostic, qui doit être établi avec certitude et précision, le bilan d’extension de la maladie, qui doit être exhaustif, et le bilan fonctionnel pré-thérapeutique. Sur le plan épidémiologique, on note un changement dans les habitudes tabagiques, influençant à la fois l’incidence et le type histologique de cancer observé. Les adénocarcinomes deviennent prévalents aux dépens des carcinomes épidermoïdes. Quelle que soit la symptomatologie clinique, la suspicion de cancer bronchique repose le plus souvent sur la reconnaissance d’un syndrome de masse parenchymateux sur la radiographie thoracique, dont le complément naturel sera la réalisation d’une exploration tomodensitométrique (TDM). Durant les dernières années, la prise en charge diagnostique et pré-thérapeutique du cancer bronchique a évolué avec l’émergence de nouvelles techniques d’exploration endobronchique, de biologie moléculaire permettant une meilleure caractérisation de la tumeur, ainsi que l’utilisation en routine de la tomographie par émission de positons couplée à la TDM (TEP- TDM), permettant un bilan d’extension plus exhaustif. Des recommandations ont été établies concernant le bilan fonctionnel cardiorespiratoire pré-opératoire et une nouvelle édition de la classification TNM est utilisée depuis 2015 (8ème édition). Ces évolutions tendent à mieux caractériser la tumeur et son extension, et à mieux appréhender la tolérance thérapeutique du patient afin de lui proposer le traitement le plus efficace et le mieux adapté.

Mots clés : Cancer bronchique, Diagnostic, bilan d’extension, bilan fonctionnel respiratoire.

 

Abstract: The first steps in the management of lung cancer are fundamental for the choice of treatment and therefore the patient’s prognosis. They include the diagnosis, which must be established with certainty and precision, the assessment of the spread of the disease, which must be exhaustive, and the functional pre-therapeutic assessment. Epidemiologically, there is a change in smoking habits, influencing both the incidence and the histological type of cancer observed. Adenocarcinomas become prevalent at the expense of squamous cell carcinomas. Whatever the clinical symptomatology, the suspicion of bronchial cancer is most often based on the recognition of a parenchymal mass syndrome on the chest x-ray, the natural complement of which will be the performance of a tomodensitometric (CT) scan. In recent years, the diagnostic and pre-therapeutic management of bronchial cancer has evolved with the emergence of new techniques for endobronchial exploration, molecular biology allowing better characterization of the tumour, as well as the routine use of positron emission tomography coupled with CT (PET-CT) allowing a more exhaustive extension assessment. Recommendations have been established concerning the preoperative cardiorespiratory functional assessment and a new edition of the TNM classification has been used since 2015 (8th edition). These changes tend to better characterize the tumour and its extension, and to better understand the patient’s therapeutic tolerance in order to offer him the most effective and best suited treatment.

Keywords: Lung cancer, diagnostic, assessment of extension, functional respiratory check-up.


 

1.    Introduction

Le cancer bronchique est la cause la plus fréquente de décès par cancer à l’échelle mondiale (Fig. 1) [1]. En Algérie, il reste un problème majeur de santé publique avec plus de 400 nouveaux cas chaque année rien qu’à Alger [2].

La plupart des patients atteints de cancer bronchique sont diagnostiqués tardivement [3]. Ce qui fait qu’une partie de la lutte contre ce cancer passe par un diagnostic le plus précoce possible, imposant de connaître et reconnaître les différentes modalités de présentation de la maladie, et une conduite à tenir diagnostique standardisée et performante afin de réduire le délai de prise en charge [4].

Un diagnostic, établi avec certitude et précision, un bilan d’extension exhaustif de la maladie, et un bilan fonctionnel pré-thérapeutique doivent permettre de proposer au patient le traitement le mieux adapté et le plus conforme aux référentiels des réunions de concertation pluridisciplinaire (RCP).

Figure 1 : incidence et mortalité des cancers de l’homme [1].

 

2.    Présentation clinique

Interrogatoire 

Quand suspecter le diagnostic de cancer bronchique ?

Plus de 75% des cancers bronchiques sont diagnostiqués à un stade avancé ou métastatique du fait, d’une part, de l’absence de nocicepteurs dans les bronches ou le poumon et, d’autre part, de l’absence de spécificité des symptômes révélateurs de cancers bronchiques. Par ailleurs, tout signe fonctionnel ou clinique persistant plus de 15 jours chez un fumeur ou ex-fumeur, sans explication patente, doit faire suspecter un cancer bronchique.

Néanmoins, l’existence d’une proportion non négligeable de non-fumeurs parmi les patients atteints de cancer bronchique aujourd’hui doit également pousser à suspecter le diagnostic dans cette population également, sur la base des signes suivants.

 

Facteurs de risque

Tabagisme

Le facteur de risque principal reste le tabagisme (actif et passif). Il est actuellement responsable d’environ 85% des cancers bronchiques, particulièrement le carcinome épidermoïde et le carcinome à petites cellules. On précisera l’âge de début, la durée, la date de sevrage éventuel. L’intoxication tabagique est mesurée en nombre de paquets années (PA) : un paquet de 20 cigarettes (20 g de tabac) par jour pendant un an correspond à 1 PA.

Consommation de cannabis

Il est indispensable d’inclure à présent la recherche de la consommation de cannabis en même temps que celle du tabac dans l’interrogatoire des patients. « La consultation pour suspicion de cancer du poumon est l’occasion d’évaluer la dépendance aux deux habitudes toxiques et d’encourager le sevrage ». Le cannabis peut être fumé sous forme de “joint” ou inhalé massivement sous forme de “bang”. La quantification se fait en “joint-année” calqué sur le PA : un joint par jour pendant un an correspond à un joint-année.

 

Cancérigènes d’origine professionnelle

Il ne faut pas se contenter de la dernière profession exercée et il faudra faire préciser l’ensemble du parcours professionnel (Curriculum laboris) et faire décrire les conditions de travail de métiers peu connus qui pourraient être liés à une exposition particulière potentiellement responsable de cancer bronchique (l’amiante, l’arsenic et ses dérivés, le béryllium, le bis-chlorométhyl-éther et le chlorométhyl-méthyl-éther, certains dérivés du cadmium, les dérivés du chrome hexavalent, des hydrocarbures aromatiques polycycliques dérivés du charbon (goudrons de houille, brais et huiles de houille, suies, produits générés au cours de la gazéification du charbon, de la production de coke, dans les fonderies de fonte et d’acier), certains dérivés du nickel, des poussières ou gaz radioactifs (plutonium 239, radon 222 et ses produits de filiation, ce dernier étant rencontré dans des mines de fer), et la silice cristalline.

Une exposition à ces aérocontaminants doit faire envisager le recours aux services de pathologies professionnelles afin d’initier d’éventuelles mesures de reconnaissance.

 

Signes généraux

Par définition, ces symptômes ne sont pas spécifiques et sont fréquents au diagnostic de tout cancer. Une altération de l’état général isolée (asthénie, anorexie, amaigrissement), doit faire évoquer un cancer. Ces symptômes sont des facteurs pronostiques de la maladie et doivent être recherchés et quantifiés.

Asthénie

L’asthénie correspond à une « fatigue », qu’elle soit physique et/ou psychique. Elle peut être difficile à faire préciser chez les patients dyspnéiques qui ont tendance à confondre les deux symptômes. C’est un paramètre important du performans status (PS) qui évalue l’état général.

Tableau 1 : l’indice de performance de performance de l’OMS

PS = 0

Pas d’asthénie, activité identique à celle précédant la maladie

PS = 1

Asthénie modérée, n’entrainant pas d’alitement, capable de travailler

PS = 2

Asthénie importante, néanmoins capable de prendre soin de soi, alitement < 50% du temps

PS = 3

Asthénie intense, capable seulement de quelques soins, alitement > 50%

PS = 4

Grabataire, alitement permanent

Anorexie

L’anorexie doit être quantifiée et datée afin de séparer les anorexies aiguës (pneumonies) des anorexies chroniques (cancer bronchopulmonaire).

Variations pondérales

Les variations pondérales devront être quantifiées en pesant et mesurant le patient afin de calculer l’indice de masse corporelle ou IMC (dont la norme varie entre 18,5 à 25 chez l’adulte). La cinétique de perte de poids doit être prise en compte (−5 kg sur 12 mois à différencier de −5 kg sur deux mois), tout comme le poids de base (−5 kg chez un patient de 100 kg et −5 kg chez un patient de 50 kg).

Syndrome d’altération de l’état général

Le syndrome d’altération de l’état général associe, dans des proportions variables, asthénie, anorexie et amaigrissement.

Fièvre

La température corporelle normale ne doit pas excéder 37,5° C le matin et 37,8° C l’après-midi. Si la température est prise en axillaire, il faut ajouter +0,9° C au chiffre du thermomètre, si la température est buccale ou rectale, elle est directement interprétable.

Une fièvre, ou une fébricule, peuvent également être présentes au moment du diagnostic, principalement rapportée à une infection bronchopulmonaire ou un syndrome paranéoplasique.

Signes thoraciques

Respiratoires

Les symptômes respiratoires sont souvent présents au diagnostic mais peu spécifiques, et ils inquiètent rarement le patient, d’autant qu’ils sont souvent à tort rapportés au tabagisme.

Tout signe respiratoire non expliqué en particulier chez un fumeur ou un ex-fumeur doit justifier la pratique d’une radiographie thoracique.

Ainsi, la dyspnée est rarement révélatrice, retrouvée essentiellement en cas d’obstruction bronchique proximale, ou elle peut s’accompagner d’un wheezing.

La toux est souvent révélatrice. Une toux d’apparition ou d’aggravation récente, inexpliquée, rebelle au traitement doit alarmer et faire évoquer le diagnostic de cancer bronchique. Pourtant, elle est souvent négligée par les fumeurs dont la toux est habituelle.

Devant toute hémoptysie, même minime, le cancer bronchique doit être évoqué en premier, surtout s’il s’agit d’un patient fumeur. Le plus souvent, les hémoptysies sont répétées, mêlées à une expectoration mucopurulente

Enfin, dans environ un quart des cas, un tableau d’infection respiratoire basse (pneumopathie ou bronchite) est retrouvé. Il s’agit d’infections régressant mal sous antibiotiques, récidivantes (souvent dans le même territoire). Toute pneumopathie chez un patient tabagique doit interroger sur un éventuel facteur favorisant, en particulier la présence d’un cancer bronchique.

Par envahissement locorégional

Des symptômes en rapport avec l’envahissement thoracique locorégional (au médiastin ou à la paroi thoracique) de la tumeur peuvent être observés au diagnostic de cancer bronchique.

Douleurs thoraciques

Les poumons n’ayant pas d’innervation sensitive, les douleurs thoraciques sont liées à des atteintes de la paroi (muscles, os ou articulations), de la plèvre, du cœur et des gros vaisseaux (péricarde, myocarde, aorte), de l’œsophage.

Leur intensité est évaluée à l’aide d’une échelle numérique ou visuelle analogique. Il faut préciser si elles sont responsables de réveils nocturnes ou nécessitent la prise d’antalgiques et leur type (palier 1, 2 ou 3 de l’OMS).

Comme le risque de maladie thromboembolique est plus fréquent en cas de cancer bronchique, devant une douleur thoracique brutale, la recherche d’embolie pulmonaire est systématique.

Par ailleurs, tous les organes du médiastin peuvent être envahis par la tumeur elle-même ou des adénopathies médiastinales.

Ainsi, le cancer bronchique peut être révélé par une dysphonie (en cas d’atteinte du nerf récurrent), une dysphagie (par compression de l’œsophage), un hoquet (par atteinte du diaphragme ou du nerf phrénique), un syndrome cave supérieur (œdème du visage, du cou voire des membres supérieurs, circulation veineuse collatérale, dyspnée, toux), ou une symptomatologie cardiaque ou péricardique (tamponnade, arythmie).

Un cas particulier est le syndrome de Pancoast-Tobias, dû au développement d’une tumeur à l’apex du poumon, envahissant la paroi thoracique, le plexus brachial et le ganglion sympathique stellaire. La tumeur apicale s’accompagne alors d’une lyse costale, d’une névralgie cervico-brachiale C8-D1 et d’un syndrome de Claude-Bernard-Horner (myosis, ptosis, enophtalmie).

 

Signes extra thoraciques

Métastases

Des métastases sont présentes au diagnostic d’environ 50% des cancers bronchiques. Les sites métastatiques les plus fréquents sont le poumon, la plèvre, les surrénales, le foie, les os et le système nerveux central.

Un grand nombre de symptômes peuvent accompagner ces métastases (douleurs osseuses, signes d’hypertension intracrânienne, céphalée, crise convulsive, troubles moteurs, etc.). Lorsque les symptômes d’une métastase amènent le diagnostic de cancer bronchique, on parle de métastase prévalente.

 

Syndromes paranéoplasiques

Il s’agit d’un ensemble de symptômes secondaires à l’existence du cancer, indépendants des mécanismes de compression tumorale, dus à la sécrétion par les cellules tumorales d’anticorps, d’hormones ou de peptides agissant à distance de la tumeur.

Ils sont plus fréquents en cas de cancer à petites cellules (10 à 20% des cas). Il peut s’agir de manifestations hormonales (syndrome de Cushing, hypercalcémie, syndrome de sécrétion inappropriée d’hormone antidiurétique), neurologiques (syndrome de Lambert-Eaton, neuropathies), ostéo-articulaires (ostéopathie hypertrophiante pneumique de Pierre-Marie et Foix, hippocratisme digital isolé), cutanéo-musculaires (érythème, dermatomyosite) ou biologiques (syndrome néphrotique, hyperleucocytose, thrombopénie, coagulopathies).

Examen physique

Appréciation de l’état général (PS) et recherche de signes cliniques en faveur d’une extension loco-régionale, d’adénopathies sus-claviculaires et périphériques, de métastases à distance.

 

Inspection

Un syndrome cave supérieur

Le syndrome cave supérieur associe une circulation veineuse collatérale, un œdème en « pèlerine » (bilatéral), un œdème du cou et de la face, des paupières gonflées au réveil et un aspect cyanosé des lèvres, en général associé à une turgescence jugulaire (Fig. 2. A).

Hippocratisme digital

L’hippocratisme digital est l’élargissement des extrémités des doigts (et des orteils) avec bombements des ongles « en verre de montre », donnant aux doigts un aspect en « baguettes de tambour » (Fig .2. B).

Il peut être isolé ou faire partie de l’ostéopathie hypertrophiante pneumique (de Pierre-Marie), s’accompagnant alors d’arthralgies, de douleurs au niveau de la diaphyse des os longs avec appositions périostées radiologiques (syndrome paranéoplasique du cancer bronchique).

 CLI2  CLI3

: Circulation veineuse collatérale thoracique et turgescence jugulaire externe bilatérale

                     B : Hippocratisme digital

Figure 2 : syndrome cave supérieur et hippocratisme digital [5].

Palpation

La palpation permet enfin de rechercher des points douloureux, d’explorer les aires ganglionnaires, de rechercher une tuméfaction mammaire, sous-cutanée ou osseuse.

Certains tableaux cliniques nécessitent une prise en charge en urgence ou semi-urgence (syndrome cave supérieur, douleurs importantes ou hémoptysie selon son abondance, maladie thromboembolique, pleurésie abondante, stridor, hypertension intracrânienne).

 

3.    Présentation radiologique

Quelle que soit la symptomatologie clinique, la suspicion de cancer bronchopulmonaire repose le plus souvent sur la reconnaissance d’un syndrome de masse parenchymateux sur la radiographie thoracique, dont le complément naturel sera la réalisation d’une tomodensitométrie thoracique. La difficulté diagnostique essentielle concerne le problème du nodule pulmonaire solitaire. La tomodensitométrie peut apporter des éléments complémentaires et participer au diagnostic histologique en permettant le guidage d’une éventuelle ponction biopsie [6].

 

Radiographie thoracique

Les signes radiologiques dépendent du siège central ou périphérique de la tumeur.

Tumeurs centrales

La tumeur centrale se développe en endobronchique et/ou en transbronchique. Lorsque la croissance s’effectue essentiellement en endobronchique, la conséquence directe est la sténose avec troubles ventilatoires d’aval (Fig. 3. A). Leur expression radiologique est variable : piégeage, collapsus aéré ou non, pneumopathie obstructive.

Dans le cas d’un développement transbronchique de la tumeur, la lésion apparaît comme une masse hilaire isolée ou associée à un trouble de ventilation. S’il existe un collapsus non aéré d’aval, la tumeur peut être noyée dans l’opacité et non reconnue. Ces masses tumorales proximales peuvent être associées à des adénopathies de la région hilaire. Dans ce cas, il est difficile de différencier tumeur et adénopathies, et l’on parle de complexe gangliotumoral.

Il faut savoir qu’une radiographie thoracique normale n’élimine pas la possibilité de cancer bronchique.

Tumeurs périphériques

La plupart de ces tumeurs périphériques se traduisent par l’existence d’une masse arrondie à contours réguliers (Fig. 3. B), lobulés ou irréguliers, de plage homogène ou non avec parfois une excavation centrale.

La radiographie thoracique ne permet de voir que les lésions évidentes, les pleurésies, ou les lyses costales et doit toujours être complétée en cas d’anomalie par un scanner thoracique.

 CLI4  CLI5

A Diminution de transparence de l’hémi- champ pulmonaire gauche paratélectasie lobaire supérieure secondaire à un syndrome de masse de larégionla région hilaire

B Opacité nodulaire lobaire supérieure droite.

Figure 3 : radiographie thoracique de face[7].

Tomodensitométrie

Un scanner thoracique avec injection doit être réalisé devant toute suspicion de cancer bronchique, sauf contre-indication.

Une première hélice sans injection sur les surrénales est recommandée afin de caractériser plus facilement un éventuel nodule surrénalien. Idéalement, l’hélice injectée couvre également l’abdomen (foie et surrénales), et les aires sus-claviculaires (potentiels ganglions classant le malade N3). L’injection doit permettre d’opacifier de façon satisfaisante les vaisseaux médiastinaux, afin d’analyser de façon précise leurs rapports avec la tumeur lorsque celle-ci est développée au contact du médiastin, et de mieux visualiser les hiles et les éventuelles adénopathies.

Elle permet également de différencier la tumeur d’un éventuel collapsus associé et de visualiser des zones de nécrose tumorale (Fig. 4). En cas d’épanchement pleural, une pré-imprégnation peut être intéressante pour détecter des signes d’atteinte spécifique.

Il s’agit d’injecter une partie du produit de contraste (généralement un tiers de la quantité totale) au patient, et d’attendre 2 à 3 minutes avant d’injecter la deuxième partie et de lancer l’hélice. Cette pré-imprégnation est intéressante pour l’étude de la pathologie pleurale en général, et notamment pour le bilan d’épanchements pleuraux récidivants.

La TDM thoracique apportera des précisions sur la lésion primitive, sa topographie, sa localisation hilaire centrale ou périphérique, son caractère systématisé, rétractile ou non rétractile, ses rapports avec les structures avoisinantes de la paroi thoracique, de la plèvre ou du médiastin (Fig. 4) [8].

La TDM thoracique devra idéalement être faite avant les examens à visée diagnostique dont il améliore la précision diagnostique [8,9].

 

 CLI6

Sténose de la bronche lobaire supérieure gauche (flèche) avec atélectasie d’aval et mauvaise différenciation entre tumeur et trouble ventilatoire.

 CLI7

Syndrome tumoral à développement endoluminal au niveau du tronc bronchique intermédiaire (flèche).

 CLI8

Syndrome tumoral apical droit à contours lobulés et irréguliers spiculaires associés à des prolongements linéaires vers la plèvre.

 CLI9

Coupe axiale en fenêtre médiastinale après injection de produit de contraste iodé et pré imprégnation pleurale. L’injection de produit de contraste permet de différencier la tumeur (double flèche jaune) du collapsus (flèche rouge)et de l’épanchement pleural (astérisque) associés. Elle permet également de visualiser l’épaississement nodulaire de la plèvre (têtes de flèches), très suspect d’atteinte pleurale métastatique (M1a)

Figure 4 : Coupe TDM avec injection de produit de contraste [7].

TEP- TDM

La TEP- TDM s’avère également une méthode très intéressante pour le diagnostic positif de malignité d’un syndrome de masse bronchopulmonaire. En effet, les tumeurs malignes bronchopulmonaires présentent une augmentation du métabolisme du glucose liée, d’une part à l’augmentation du nombre des protéines de transport du glucose, et d’autre part, à une élévation du taux intracellulaire d’enzymes (hexokinase et phosphofructokinase) qui vont amorcer la glycolyse [10]. Mais si la TEP-TDM est intéressante pour préciser le caractère malin ou bénin d’une lésion parenchymateuse pulmonaire, elle est surtout utile dans la conduite à tenir devant la découverte d’un nodule pulmonaire du fait d’une valeur prédictive négative élevée [11,12].

Elle contribue à différencier les nodules bénins des nodules malins avec des performances supérieures aux techniques d’imagerie conventionnelle [13, 14]. Elle permet dès lors de diminuer la fréquence des actes techniques invasifs, et de la thoracotomie lors de la prise en charge d’un nodule pulmonaire isolé.

4.    Examens à visée diagnostique

Le diagnostic du cancer bronchique est histologique et le choix de la technique de prélèvement pour réaliser cet examen dépend de la localisation de la maladie (déterminée par l’examen clinique et l’imagerie), de l’état général du patient et de ses comorbidités.

L’examen anatomopathologique peut être fait sur des prélèvements tissulaires (biopsies), ou à défaut, cytologiques (lavage, brossage, ponction aspiration) de la tumeur [15]. L’analyse des adénopathies ou d’un site métastatique accessible peut également être réalisée.

La bronchoscopie souple

C’est la technique de référence pour confirmer le diagnostic lorsque la tumeur siège au niveau de l’arbre bronchique principal.

En cas de tumeurs centrales endo-bronchiques, les prélèvements biopsiques devront intéresser la tumeur elle-même, la base d’implantation, et en pleine tumeur, les éperons voisins et la carène si nécessaire. L’étude cytologique du produit d’aspiration réalisée dans de bonnes conditions, peut aider au diagnostic. Il est recommandé de réaliser 5 biopsies pour le diagnostic et 5 biopsies supplémentaires pour phénotypage et génotypage [16], accompagnées d’un brossage, d’un lavage et d’une aspiration de manière à obtenir une rentabilité estimée à près de 80%. La fixation des prélèvements histologiques doit utiliser le formol.

Dans le cas d’une tumeur centrale sous-muqueuse ou péri-bronchique, la cytoponction trans-bronchique permet de réaliser de manière peu invasive un diagnostic et/ou un staging, avec un rendement diagnostique moyen de 70% [17]. La rentabilité diagnostique de la cytoponction trans-bronchique augmente jusqu’à 98% selon les études, quand elle est réalisée en écho-endoscopie.

Les développements récents, liés à l’apport de l’échographie endoscopique et au guidage par navigation électromagnétique ont permis l’exploration diagnostique des lésions périphériques, ainsi que l’évaluation du médiastin, limitant les procédures invasives, telles que la médiastinoscopie et la vidéothoracoscopie [18].

Ces progrès positionnent l’expert de l’endoscopie sur un pied d’égalité avec le radiologue pour l’évaluation de la lésion pulmonaire périphérique ou du chirurgien pour l’exploration médiastinale.

 

La ponction-biopsie par voie transpariétale

En cas de négativité de la bronchoscopie souple et de lésion accessible, une ponction-biopsie transpariétale réalisée sous anesthésie locale peut être proposée, guidée par scanner ou exceptionnellement par échographie en cas d’envahissement pariétal. Cet examen présente une sensibilité de 90% et une spécificité de 97%. Il est recommandé de réaliser 1 à 2 carottes, en gauge 18 et en coaxial.

Techniques chirurgicales

La vidéothoracoscopie et la thoracotomie doivent être limitées au cas où les techniques moins invasives n’ont pu être réalisées ou n’ont pas permis de confirmer le diagnostic. Chez un patient opérable, la thoracotomie peut permettre un geste à la fois diagnostique et thérapeutique si l’examen anatomopathologique extemporané conclut à la malignité.

Autres prélèvements

Les lésions suspectes, pleurale, ganglionnaire ou à distance, permettront un prélèvement qui aidera à poser le diagnostic et à préciser l’extension locorégionale ou métastatique.

 

5.    Annonce du diagnostic

Toute démarche clinique ayant abouti à un diagnostic de certitude de cancer bronchique doit obligatoirement être suivie par une annonce du diagnostic de la maladie au patient et à sa famille.

L’annonce diagnostique devra se faire dans des conditions optimales, avec un temps de consultation dédiée et des ressources adéquates (psycho-oncologue, infirmière, etc.). Le lien avec la médecine de ville sera renforcé. L’annonce portera sur le diagnostic mais aussi le plan personnalisé de soins et les mesures associées (déclaration de maladie professionnelle, préservation de la fertilité si applicable, etc.)

 

6.    Bilan pré-thérapeutique

La chirurgie constitue la thérapeutique la plus efficace du cancer bronchique non à petites cellules. Il est donc nécessaire de réaliser une sélection rigoureuse des patients candidats à la chirurgie, et cette sélection ne peut se faire qu’en réalisant un bilan d’extension locorégional et général aussi précis que possible.

Le bilan pré-thérapeutique doit être réalisé dans des délais les plus courts possibles et dépend évidemment de l’accessibilité aux examens et de l’état physiologique du patient [19].

Bilan d’extension

La prise en charge thérapeutique du cancer bronchique dépend du stade de la maladie, et de l’état physiologique et fonctionnel du patient. Le bilan d’extension est donc une étape primordiale, car il permet de déterminer le stade de la maladie par l’établissement de sa classification TNM.

De l’exhaustivité de ce bilan va dépendre la justesse de la décision, il doit être réalisé le plus rapidement possible. En cas de non disponibilité de la TEP-TDM les anciennes recommandations restent valables.

Les patients sont alors répartis en deux groupes au pronostic distinct : ceux dont la maladie est localisée (stade I, II ou III), qui peuvent bénéficier d’un traitement locorégional, et ceux découverts d’emblée au stade métastatique (stade IV), dont la survie globale est beaucoup plus sombre.

Au moment de la présentation du dossier à la RCP pour une décision thérapeutique, l’ancienneté de la date de réalisation du bilan pré-thérapeutique ne doit pas excéder 6 semaines.

Ce bilan d’extension est réalisé aujourd’hui selon la nouvelle classification de l’IASLC (8eédition) [20].

 

Tableau 2 : Classification TNM (8e édition)[20].

Stade

TNM

Description

T = tumeur primaire (taille tumorale de la plus grande dimension) ; N = ganglion régional ; M = métastase à distance.

Carcinome occulte

TX, N0, M0           

TX = Tumeur primaire non connue ou tumeur prouvée par la présence de cellules malignes dans les sécrétions broncho-pulmonaires mais non visible aux examens radiologiques et endoscopiques               

N0 = Aucune métastase ganglionnaire régionale.                      

M0 = Aucune métastase à distance.

0

Tis, N0, M0           

Tis= carcinome in situ : SCIS= carcinome épidermoïde in situ ; AIS= adénocarcinome in situ (Adénocarcinome lipidique pur ≤3 cm dans la plus grande dimension) N0.M0

IA1

T1a(mi), N0, M0  

T1a, N0, M0

T1 = Tumeur ≤3 cm, entourée par du poumon ou de la plèvre viscérale, sans évidence d’invasion plus proximale que les bronches lobaires à la bronchoscopie (c’est-à-dire pas dans les bronches souches).

T1a(mi) = Adénocarcinome minimalement-invasif : adénocarcinome (≤3 cm dans la plus grande dimension) principalement lipidique et une invasion ≤5 mm.N0.M0

T1a = Tumeur ≤1 cm. N0. M0

IA2

T1b, N0, M0

T1b = Tumeur> 1 cm mais ≤2 cm N0. M0

IA3

T1c, N0, M0

T1c = Tumeur> 2 cm mais ≤3 cm N0. M0

IB

T2a, N0, M0

T2 = Tumeur de plus de 3 cm, mais de moins de 5 cm OU avec un quelconque des éléments suivants

·   Envahissement d’une bronche souche quelle que soit sa distance par rapport à la carène mais sans envahissement de la carène,

·   Envahissement de la plèvre viscérale,

·   Existence d’une atélectasie ou pneumonie obstructive

T2a = Tumeur> 3 cm mais ≤4 cm.N0.M0

IIB

T1a, N1, M0         

T1a. N1 = Métastases ganglionnaires péri-bronchiques homolatérales et/ou hilaires homolatérales incluant une extension directe. M0

T1b, N1, M0

T1b.N1.M0

T1c, N1, M0

T1c. N1.M0

T2a, N1, M0

T2a. N1. M0

T2b, N1, M0

T2b = Tumeur> 4 cm mais ≤5 cm. N1. M0

T3, N0, M0           

T3 = tumeur> 5 cm mais ≤ 7 cm ou envahissant directement l’un des éléments suivants : plèvre pariétale, paroi thoracique (y compris les tumeurs du sommet), nerf phrénique, péricarde pariétal ; ou des nodules tumoraux séparés dans le même lobe que le primaire

N0. M0

IIIA

T1a, N2, M0         

T1a. N2= Métastases dans les ganglions médiastinaux homolatéraux et/ou dans les ganglions sous-carénaires. M0

T1b, N2, M0

T1b. N2.                M0

T1c, N2, M0

T1c. N2. M0

T2a, N2, M0

T2a. N2. M0

T2b, N2, M0

T2b. N2. M0

T3, N1, M0

T3. N1. M0

T4, N0, M0           

T4 = tumeur> 7 cm ou tumeur de toute taille envahissant un ou plusieurs des éléments suivants : diaphragme, médiastin, cœur, gros vaisseaux, trachée, carène, nerf récurrent, œsophage, corps vertébral ; ou associée à des nodules tumoraux séparés dans un lobe ipsilatéral différent de celui du lobe de la tumeur primaire. N0. M0

T4, N1, M0

T4. N1. M0

IIIB

T1a, N3, M0         

T1a. N3 = Métastases ganglionnaires médiastinales controlatérales ou hilaires controlatérales ou scaléniques, sus-claviculaires homo-ou controlatérales. M0

T1b, N3, M0

T1b. N3. M0

T1c, N3, M0

T1c. N3. M0

T2a, N3, M0

T2a. N3.M0

T2b, N3, M0

T2b. N3. M0

T3, N2, M0

T3. N2. M0

T4, N2, M0

T4. N2. M0

IIIC

T3, N3, M0

T3. N3. M0

T4, N3, M0

T4. N3. M0

IV

IVA

Tout T, Tout N, M1a

Tout T, Tout N, M1b

Tout T, Tout N

M1a = Nodule (s) tumoral (aux) séparés dans un lobe controlatéral, ou nodules pleuraux ou pleurésie maligne ou péricardite maligne

M1b = Une seule métastase extra-thoracique dans un seul organe

IVB

Tout T, Tout N, M1c

 

M1c = Plusieurs métastases extra-thoraciques dans un seul ou plusieurs organes

A.   Tumeur potentiellement accessible à un traitement locorégional

La classification TNM comprend une évaluation du statut tumoral (T), ganglionnaire (N) et métastatique (M)

Évaluation du statut tumoral (T)

  • TDM thoracique avec injection de produit de contraste
  • Bronchoscopie souple avec biopsies des éperons adjacents
  • IRM thoracique si tumeur de l’apex, suspicion d’atteinte vertébrale, médullaire, vasculaire (artère sous-clavière)
  • Échographie cardiaque endo-œsophagienne si doute sur une atteinte atriale

 

Évaluation du statut ganglionnaire (N)

  • TEP-TDM ou TDM thoracique si TEP non disponible
  • Confirmation histo-cytologique en cas d’hypermétabolisme ganglionnaire médiastinal à la TEP-TDM ou de ganglions médiastinaux> 15 mm à la TDM
  • Examen de référence : médiastinoscopie cervicale
  • Alternative : technique mini-invasive (ponction-biopsie transbronchique avec ou sans échoguidage, transoesophagienne échoguidée ou transthoracique) – médiastinoscopie indiquée si examen non contributif.

Évaluation du statut métastatique (M)

  • Examen clinique minutieux
  • Imagerie cérébrale systématique (TDM avec injection de produit de contraste si pas de contre-indication ou IRM)
  • TEP-TDM si non disponible (TDM abdominale ou échographie abdominale + scintigraphie osseuse)
  • Les zones fixantes à la scintigraphie doivent être explorées par des examens radiologiques appropriés.
  • En cas d’épanchement pleural, la ponction pleurale pour examen cytologique est recommandée : si cet examen est non contributif, une biopsie pleurale doit être faite (à l’aiguille et si négative thoracoscopie)
  • La recherche de la preuve histologique d’une lésion métastatique n’est justifiée que si celle-ci est unique et si cela peut modifier la stratégie thérapeutique.
  • Confirmation anatomopathologique de toute métastase susceptible de modifier le traitement

 

B.    Tumeur non accessible à un traitement locorégional

  • TEP-TDM non indiquée
  • En présence de signes d’appel, des examens complémentaires sont discutés selon la localisation suspectée et l’incidence thérapeutique attendue.

Bilan fonctionnel

Le bilan fonctionnel avant résection pulmonaire pour CBNPC a pour but de détecter les patients à risque de complications cardio-respiratoires per-opératoires. Il doit estimer le risque opératoire de la résection pulmonaire envisagée, identifier des actions ciblées pouvant diminuer ce risque ou en l’absence de telles actions, orienter vers des techniques chirurgicales moins invasives, voire vers des thérapies palliatives.

Évaluation clinique

Doit se faire chez un patient au mieux de sa forme, après arrêt du tabagisme et traitement des pathologies associées. Elle se focalisera sur les sphères respiratoire et cardio-vasculaire.

Bilan respiratoire préopératoire

Pour l’évaluation de la fonction respiratoire, la mesure du VEMS est indiquée en première intention. Selon les résultats du VEMS une démarche pouvant être divisée en trois étapes est recommandée (Fig 5).

CLI10

DLCO/ POP : valeur postopératoire prédite de la diffusion pulmonaire du monoxyde de carbone ; VEMS/POP : valeur postopératoire prédite du volume maximum expiré en 1 seconde ; VO2 max : consommation maximale d’oxygène (ml/kg/min) ; VT : valeur théorique.

Figure 5 : Algorithme de l’American Collège of Chest Physicians) [21].

Évaluation du risque cardio-vasculaire

Pour une pneumonectomie, les maladies cardio-vasculaires et l’âge sont les principaux facteurs de risque pour une complication cardio-pulmonaire [22]. L’évaluation du risque cardiologique est donc indispensable et bien codifiée [23]. Le bilan cardiologique minimum devrait comprendre une anamnèse des facteurs de risque et un ECG. Le bilan doit également rechercher d’autres comorbidités telles qu’anévrismes aortiques, sténoses carotidiennes, cirrhose hépatique, anémie préopératoire.

7.    Conclusion

Le cancer bronchique est un cancer fréquent et de mauvais pronostic dont le diagnostic à un stade précoce, associé à une résection chirurgicale carcinologique complète, offre les meilleures chances de guérison. Un bilan d’extension et fonctionnel de qualité sont donc essentiels pour une sélection optimale des patients opérables. Le scanner est l’examen de première intention permettant d’identifier les stades métastatiques évidents ou les envahissements ganglionnaires massifs. Dans les autres cas, le TEP-scanner a un rôle essentiel pour le bilan d’extension ganglionnaire et métastatique, cerveau exclus. La stadification repose actuellement sur la 8ème édition de la classification TNM qui met l’accent sur l’importance de la taille de la tumeur, ainsi que sur le caractère particulier des tumeurs oligo-métastatiques de meilleur pronostic. Le rôle du TEP-TDM est fondamental dès lors que la tumeur n’apparait pas d’emblée métastatique sur le scanner. Toute adénopathie ou masse périphérique hypermétabolique doit être prélevée pour analyse histologique si leur confirmation tumorale modifie la prise en charge thérapeutique.

 

Liens d’intérêts : L’auteure déclare ne pas avoir de liens d’intérêts en rapport avec cet article.

Références

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Prévention et dépistage du cancer du poumon

 Le tabagisme est connu depuis les années 1950 comme étant à l’origine de l’augmentation exponentielle des cas de cancer bronchique. Le sevrage tabagique et l’éviction du tabac constituent la prévention primaire du cancer du poumon..

 

Z.B. Benlahrech1, A. Kerboua2, K. Bouzid2

(1) EPH Laghouat et Université Amar Telidji Laghouat

(2) Centre Pierre et Marie Curie, Alger

 

Date de soumission : 21 Octobre 2020

 

Résumé : Le tabagisme est connu depuis les années 1950 comme étant à l’origine de l’augmentation exponentielle des cas de cancer bronchique. Le sevrage tabagique et l’éviction du tabac constituent la prévention primaire du cancer du poumon. Pour le dépistage, plusieurs études ont été menées en incluant des populations cibles, dont les études NLST et NELSON qui comprenaient un très fort effectif de tabagiques et d’anciens tabagiques, sont en faveur d’un dépistage organisé du cancer du poumon, avec des modalités à niveaux d’irradiation très bas.

Mots clés : cancer du poumon, prévention primaire, dépistage, tabac, étude NLST, étude NELSON.

Abstract: Lung cancer represents a public health problem since it constitutes the leading cause of cancer death in both men and women in Europe. Smoking has been known since the 50s to be the most important cause of lung cancer and smoking cessation, constitute the primary prevention of lung cancer. For screening, several studies have been carried out including the NLST and NELSON studies (which included a very high number of smokers and former smokers) are in favour of organized screening for lung cancer, with very low irradiation.

Key words: lung cancer, primary prevention, screening, tobacco, smoking, NLST study, NESLSON study.


 

  • Introduction 

Le cancer bronchopulmonaire représente un problème de santé publique puisqu’il constitue la première cause de mortalité par cancer en Europe chez l’homme comme chez la femme.

La survie des patients atteints de ce cancer après le diagnostic posé est estimée à 5 ans. Le meilleur taux de survie est enregistré aux États-Unis avec 15%, la moyenne de survie est de 10% en Europe et de 8,9% dans les pays en voie de développement [1].

  • Causes des cancers broncho-pulmonaires
  • Tabagisme

Le tabagisme est connu depuis les années 1950 comme étant à l’origine de l’augmentation exponentielle des cas de cancer bronchique. Le risque attribuable au tabagisme est ainsi estimé à 80-90% des cas incidents, affectant toutes les formes histologiques. Plus de 2.000 carcinogènes sont identifiés dans le tabac, dont les hydrocarbones polycycliques (Benzopyrène) et les nitrosamines [2].

Le risque lié au tabagisme dépend :

  • De la durée de la consommation, le facteur le plus important : le risque varie comme la puissance 4 de la durée (× 16) ; alors qu’il double si la quantité double.
  • De la quantité quotidienne consommée, par exemple un demi-paquet par jour pendant 40 ans est beaucoup plus « risqué » en termes de cancer pulmonaire qu’un paquet par jour pendant 20 ans.
  • Du type de tabac utilisés
  • De l’âge de début de la consommation [2].
  • Le tabagisme passif : Il correspond à l’exposition d’un non-fumeur à la fumée de cigarette. Il augmente de 30% le risque de cancer du poumon. On estime à quelques milliers (3 à 5.000), le nombre de morts par an liées au tabagisme passif, principalement par affections cardio-vasculaires [3].
  • Autres causes

Elles sont secondaires mais donnent également le cancer du poumon.

a. Les expositions professionnelles : l’amiante, le nickel, le chrome, l’arsenic, les chlorométhyléthers, le gaz moutarde, les hydrocarbures provenant du charbon et du pétrole, les radiations (les radiations externes, les radiations des matériaux radioactifs)

b. Les facteurs non professionnels

c. La pollution atmosphérique

d. Antécédents familiaux de cancer bronchique

  • Prévention primaire

Le tabac est le premier facteur de risque de cancer, responsable de plus de 30% des décès par cancer, soit 44.000 décès chaque année toute origine de cancer confondue. La consommation de tabac est associée à une moins bonne réponse aux traitements du cancer.

Ainsi, une démarche de sensibilisation et d’accompagnement à l’arrêt du tabac est nécessaire, faisant partie intégrante du plan cancer algérien 2014-2019, a notamment comme objectif de renforcer le plan national de lutte contre le tabac (4).

La stratégie MPOWER de l’OMS repose sur les six politiques les plus efficaces pour faire reculer l’épidémie de tabagisme : monitoring (surveiller la consommation de tabac et les politiques de prévention) ; protecting (protéger la population contre la fumée du tabac) ; offering (offrir une aide à ceux qui veulent arrêter de fumer) ; warning (mettre en garde contre les méfaits du tabac) ; enforcing (interdire la publicité en faveur du tabac, la promotion et le parrainage) ; raising (augmenter les taxes sur le tabac) [5].

Aussi, la lutte contre le tabagisme est donc un élément à part entière de ce plan stratégique. Cet axe favorise la mise en œuvre de la convention cadre pour la lutte antitabac de l’OMS (CCLAT) et en priorité les mesures prioritaires de la stratégie MPOWER. Cet axe se décline en 4 objectifs et chaque objectif se décline en actions et en mesures [5].

  • Objectif 1 – Renforcer la législation et la réglementation antitabac en conformité avec les dispositions de la CCLAT
  • Objectif 2 – Créer un environnement favorable pour réduire le tabagisme
  • Objectif 3 – Offrir une aide au sevrage tabagique
  • Objectif 4 – Mettre en place un système complet et permanent de surveillance du tabagisme [5]
  • Le dépistage
  • Radiographie pulmonaire et examen cytologique des expectorations

Jusqu’à la publication des résultats de l’étude randomisée PLCO qui portait sur plus de 150.000 participants, et qui a démontré de façon définitive que la radiographie pulmonaire n’est d’aucune utilité pour le dépistage, de nombreuses études ouvertes dont quatre études randomisées, (Mémorial Sloan-Kettering Lung Project, le John Hopkins Lung Project, le Mayo Lung Project) et une étude tchécoslovaque n’ont pas pu démontrer de réduction de la mortalité spécifique. Toutefois, les effectifs de ces études n’étaient pas très élevés de sorte que leur manque de puissance a longtemps été mis en avant [6].

  • Pour les marqueurs sanguins et plasmatiques

Aucun marqueur n’a démontré pour l’instant une sensibilité et spécificité importante. Toutefois, divers biomarqueurs sont à l’étude, soit en tant que tests applicables en première intention à l’ensemble de la population que l’on souhaite dépister, soit proposés après le scanner de dépistage pour séparer les vrais positifs des faux positifs. Les marqueurs les plus prometteurs sont les micro-ARN voire les cellules circulantes. Pour l’instant, ces marqueurs restent donc exclusivement l’objet de projets de recherche [6,7].

  • Scanner thoracique spiralé à faible dose

Les résultats ELCAP qui portait sur 1.000 volontaires fumeurs ou anciens fumeurs asymptomatiques et soumis à un dépistage scanographique par scanner thoracique faiblement dosé ont été rapportés. Parmi ceux-ci, 233 présentaient un ou plusieurs nodules non calcifiés et seulement 27 d’entre eux avaient un cancer. Toutes les études ouvertes comparables menées depuis dans le monde entier, ont montré comme cette étude que le scanner était plus sensible que la radiographie mais malheureusement peu spécifique car décelant beaucoup de faux positifs. Ensuite, les études randomisées se sont suivies dans le monde dont les résultats sont résumés sur le Tableau 1. On voit sur ce tableau : les critères d’inclusion, le rythme des dépistages, la nature du bras témoin et le nombre de sujets inclus différaient, ce qui rend ces essais peu comparables les uns avec les autres.


 

Tableau 1 : Les principaux essais randomisés. Source : Milleron B, et al. Le dépistage du cancer du poumon. Rev Pneumol Clin (2016)

La preuve de l’effet significatif du scanner faiblement dosé sur la mortalité spécifique par cancer bronchopulmonaire a été rapportée en 2011 lors de la publication des résultats du National Lung Screening Trial (NLST). Cet essai prospectif randomisé a comparé le scanner faiblement dosé à la radiographie standard et avait comme objectif principal de démontrer une diminution de 20% de la mortalité spécifique par cancer bronchopulmonaire. Le choix de la radiographie pulmonaire dans le bras témoin était lié au fait qu’au moment où cet essai a été conçu, les résultats de l’étude PLCO n’étaient pas encore connus. Plus de 53.000 participants ont été inclus. Âgés de 55 à 74 ans, ils devaient être fumeurs ou anciens fumeurs, leur tabagisme cumulé devait être au moins de 30 paquets/année et, s’ils étaient anciens fumeurs, ils devaient avoir arrêté depuis moins de 15 ans [8,9].

L’examen de dépistage (radiographie pulmonaire, ou scanner faiblement dosé) a été réalisé à l’inclusion, puis à 1 an et 2 ans (soit trois examens). Les scanners étaient considérés comme positifs lorsqu’ils objectivaient des nodules de plus de 4 mm.

 

Résultat de l’étude NLST

Expliqué dans le Tableau 2 avec comme point essentiel que l’objectif principal de cet essai était atteint puisque la mortalité spécifique était réduite de 20% (p=0,004) ; et que même la mortalité globale était réduite de 6,7% (p=0,02).

 

EPI2

Tableau 2 : Principaux résultats de l’étude NLST dans le bras scanner. Source: Milleron B, et al. Le dépistage du cancer du poumon. Rev Pneumol Clin (2016)

Aujourd’hui l’étude NLST qui est prospective multicentrique à fort effectif a été jugée de bonne qualité par le groupe Cochrane. Elle démontre, avec un niveau de preuve élevé, que le dépistage par scanner thoracique faiblement dosé diminue de façon importante et significative la mortalité spécifique de la maladie et même la mortalité globale, ce qui est rare dans une action de dépistage [10].

L’étude randomisée néerlando-belge NELSON, publiée dans le New England Journal of Medicine en janvier 2020 a rassemblé les données de 13.195 hommes (analyse primaire) et 2.594 femmes (analyses de sous-groupes) âgés de 50 à 74 ans, fumeurs et anciens fumeurs, qui ont fait l’objet d’un dépistage scanner à T0 (baseline), après 1 an ; 3 ans ; 5,5 ans, et un groupe témoin n’a pas été dépisté du tout. Les chercheurs ont obtenu des données sur le diagnostic du cancer, la date et la cause du décès grâce à des liens avec les registres nationaux aux Pays-Bas et en Belgique. Un comité d’examen a confirmé le cancer du poumon comme cause de décès lorsque cela était possible. Un suivi minimum de 10 ans jusqu’au 31 décembre 2015 a été réalisé pour tous les participants [11,12,13].

 

Des taux de décès significativement améliorés dans la population dépistée

Chez les hommes, l’adhésion moyenne au dépistage par scanner était de 90,0%. En moyenne 9,2% des participants sélectionnés ont subi au moins une tomodensitométrie supplémentaire. Le taux global de référence pour les nodules suspects était de 2,1%. À 10 ans de suivi, l’incidence du cancer du poumon était de 5,58 cas pour 1.000 personnes-années dans le groupe de dépistage et de 4,91 cas pour 1.000 personnes-années dans le groupe témoin. D’autre part, la mortalité par cancer du poumon était respectivement de 2,50 décès pour 1.000 personnes-années et de 3,30 décès pour 1.000 personnes-années. Le rapport des taux cumulés de décès par cancer du poumon à 10 ans était de 0,76 dans le groupe de dépistage par rapport au groupe témoin, similaire aux valeurs des années 8 et 9. Chez les femmes, le taux était de 0,67 à 10 ans de suivi, avec des valeurs de 0,41 à 0,52 des années 7 à 9 [11,12].

Dans cet essai impliquant des personnes à haut risque, la mortalité par cancer du poumon était significativement plus faible chez ceux qui ont subi un dépistage CT volumique, que chez ceux qui n’ont subi aucun dépistage. Cette étude semble donc en faveur d’un dépistage organisé du cancer du poumon, à une époque où les modalités ont atteint des niveaux d’irradiation très bas [6,11,12].

Inconvénients du dépistage par scanner low dose

  • Irradiation

La pratique des scanners de dépistage auxquels s’ajoutent les scanners de surveillance des positifs peut faire craindre qu’une irradiation liée aux scanners vienne compenser l’effet bénéfique du dépistage en induisant par elle-même des cancers. Ce risque est réel mais il est faible puisqu’avec 1,5 mSv par examen l’irradiation est comparable à 6 mois d’irradiation naturelle en France. De plus, cette irradiation survient dans une période moins à risque de cancers radio induits [6,9].

  • Surdiagnostic

Un cancer « surdiagnostiqué » est un cancer qui n’aurait jamais été décelé pendant la vie du patient s’il n’avait pas été dépisté et qui n’aurait entraîné ni symptôme ni décès. Il est généralement estimé par l’excès de cancers observé dans le bras expérimental par rapport au bras standard dans un essai randomisé. En fait, cet excès peut également être lié à une avance au diagnostic ou à la détection de cancers à évolution lente. Dans l’étude NLST, ce risque de surdiagnostic est estimé à 18,5%, et il est encore plus élevé pour les cancers bronchiolo-alvéolaires. Il faut noter toutefois que le recul de 6 ans dont disposaient les auteurs au moment de la publication reste modeste et ne présage pas d’une évolution indolente du cancer [6,8,9].

 

  • Altération de la qualité de vie et anxiété induite par le dépistage

Un travail a été mené sur qualité de vie et l’anxiété dans l’étude NLST. Il n’a pas été observé de variations significatives des scores de qualité de vie et d’anxiété sauf chez les vrais positifs. La diminution de l’anxiété passe par une bonne information initiale qui consiste à informer le patient de la possibilité fréquente que soit décelée une anomalie autre qu’un cancer [8].

  • Conclusion

On oppose souvent le dépistage à la prévention : il serait plus utile, pense-t-on souvent, de lutter contre le tabac que de dépister le cancer bronchopulmonaire. On oublie alors que les deux actions sont complémentaires car, même si une campagne de sevrage tabagique était totalement efficace, elle ne réduirait l’incidence du cancer bronchopulmonaire que 20 ou 25 ans plus tard.

Les études NLST et NELSON sont en faveur d’un dépistage organisé du cancer du poumon, avec des modalités a niveaux d’irradiation très bas.

 

Liens d’intérêts : Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts.

 


 

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Le cancer du poumon. Épidémiologie et facteurs de risque.

 Les cancers broncho-pulmonaires sont des cancers fréquents et de mauvais pronostic. C’est la première cause de décès par cancer en Algérie et dans le monde. Derrière ce pronostic défavorable se cachent de nombreuses disparités selon l’âge, le sexe, et l’exposition aux facteurs de risque.

 

C. Mazouzi (1), E. Kerboua (2), R. Aftis (1), N. Ferrah (1), S. Khaled (1), M. Hamdi-Cherif (3) K. Bouzid (2)

(1) Service d’Oncologie Médicale CHU Khelil Amrane de Bejaïa

(2) Centre Pierre et Marie Curie, Alger

(3) Service d’Épidémiologie CHU Saâdna Abdenour Sétif

 Date de soumission : 11 Octobre 2020

Résumé : Les cancers broncho-pulmonaires sont des cancers fréquents et de mauvais pronostic. C’est la première cause de décès par cancer en Algérie et dans le monde. Derrière ce pronostic défavorable se cachent de nombreuses disparités selon l’âge, le sexe, et l’exposition aux facteurs de risque. Il se situe au 4ème rang des cancers incidents des pays en voie de développement dont l’Algérie, tous sexes confondus. Il se place au 2e rang des cancers chez l’homme et au 3e rang chez la femme. Quel que soit l’âge observé, l’incidence de ce cancer est plus élevée chez l’homme que chez la femme ; toutefois l’écart se resserre au détriment de ces dernières. Les résultats de la recherche scientifique s’accordent pour mettre en relation les tendances des taux d’incidence et de mortalité avec la consommation de tabac, y compris le tabagisme passif. Par ailleurs, d’autres facteurs de risque sont évoqués comme l’exposition à l’amiante en milieu professionnel ou au radon pour la population générale, ou encore la prédisposition génétique. Cependant, le poids de ces facteurs étiologiques et/ou de prédisposition n’est en aucun cas comparable à celui du tabac dans la genèse du cancer du poumon et dans la mortalité qui en résulte. Nous proposons une revue de littérature dans notre article sur l’épidémiologie descriptive et analytique du cancer du poumon .

Mots clés : Cancer du poumon, incidence, mortalité, facteurs de risques.

 

Abstract: Broncho pulmonary cancers are frequent cancers with a poor prognosis. It is the first cause of death from cancer in Algeria and in the world, behind this unfavourable prognosis hides many disparities according to age, sex, and exposure to risk factors, ranks 4th among cancers incidents and developing countries including Algeria, all sexes combined. It ranks second among cancers in men and third among women. Regardless of age, the incidence of this cancer is higher in men than in women; however, use is decreasing to the detriment of the latter. Scientific research results agree to relate trends in incidence rates and mortality to tobacco consumption, including passive smoking. In addition, other risk factors are mentioned such as exposure to asbestos in the workplace or to radon for the general population, or even genetic predisposition. However, the weight of these etiological and/or predisposing factors is in no way comparable to that of tobacco in the genesis of lung cancer and in the resulting mortality. We provide a review of the literature in our article on the descriptive and analytical epidemiology of lung cancer.

Key words: Lung cancer, incidence, mortality, risk factors.

 

Introduction

Avant les années 1920, les cas de cancer du poumon étaient rares. Au cours des deux décennies suivantes, on a observé une incidence croissante, qu’on a cependant attribuée à un diagnostic amélioré et à certains facteurs connexes. L’incidence et la mortalité se sont accrues rapidement. On a observé un facteur d’âge, car les personnes âgées de 60 ans étaient 100 fois plus susceptibles de recevoir un diagnostic de cancer du poumon que celles âgées de 40 ans, et un facteur de sexe, car les hommes étaient 7 fois plus susceptibles que les femmes de recevoir ce diagnostic. Dans les années 1960, l’incidence chez les hommes a atteint un sommet, puis a commencé à diminuer, tandis que chez les femmes, ce taux a continué de s’accroître. En 1983, le taux hommes/femmes avait diminué à 2,8 [1].

Dans les années 1950, on a commencé à consigner systématiquement des historiques sur l’usage du tabac chez les patients souffrant de maladies multiples. On a alors reconnu que les non-fumeurs ne contractaient pas le cancer du poumon. On a réalisé que le lien entre l’usage du tabac et le cancer ne pouvait être démontré que par des études prospectives à grande échelle qui permettraient de dresser des historiques sur l’usage du tabac chez des personnes en apparence saines, dont on assurait le suivi sur plusieurs années. Ces études avaient pour faiblesse le manque de fiabilité des autoévaluations des mœurs tabagiques. La première étude à établir un lien de cause à effet entre le cancer et l’usage du tabac a donc été réalisée auprès de médecins, que l’on jugeait plus fiables que la population générale à cet égard. 40.000 médecins britanniques, recrutés pour l’étude par Richard Doll et Austin Bradford Hill dans les années 1950, ont été surveillés pendant les 25 années suivantes [2]. Puisque ces médecins faisaient l’objet d’un suivi serré, leur historique d’usage du tabac était plus fiable que certaines autres études, et les effets des changements de mœurs tabagiques ont donc pu être étudiés.

L’incidence mondiale du cancer du poumon

Le cancer du poumon est le type de cancer le plus répandu à travers le monde depuis 1985 [1]. En 2002, on a comptabilisé 1,35 millions de nouveaux cas, soit 12,4% des nouveaux cas de cancer. C’était également la principale cause de décès par cancer avec 1,18 millions de décès, soit 17,6% des décès par cancer dans le monde. Le cancer du poumon est le premier cancer chez l’homme en termes d’incidence et de mortalité, chez la femme son incidence arrive en 3ème place après le cancer du sein et le cancer colorectal, il arrive en 2ème place après le cancer du sein en termes de mortalité [3].

En 2012, le nombre de nouveaux cas a été estimé à 1,82 millions dont 1,24 millions d’hommes et 0,58 millions de femmes, la mortalité était de 1,59 millions de personnes. Le cancer du poumon représente 13% de l’ensemble de cas de cancer qui ont été diagnostiqués en 2012, et représente un pourcentage de 19,4% de mortalité liée au cancer.

En 2018, les nouveaux cas dans le monde ont été estimés à 46.363 (31.231 hommes et 15.132 femmes), l’évolution du taux d’incidence entre 1990 et 2018 est de -0,3% par an en moyenne chez l’homme (2010-2018) et de +5,3% par an en moyenne chez la femme.

Partout dans le monde, c’est de loin, le cancer le plus fréquent chez les hommes avec les taux les plus importants observés en Amérique du Nord et en Europe (en Europe de l’Est en particulier). Des taux modérément haut sont également observés en Australie/Nouvelle-Zélande et dans l’est asiatique (Chine et Japon). Les taux les plus élevés sont retrouvés en Amérique du Nord et en Europe. La Chine enregistre également une incidence relativement élevée [2,3,4].

Figure 1 : Incidence du cancer du poumon dans le monde 2018 (Globocan)

  • Le cancer du poumon chez la femme

Le cancer du poumon se situe au 4ème rang des cancers incidents, tous sexes confondus. Il se place au 2ème rang des cancers chez l’homme et au 3ème rang chez la femme. Quel que soit l’âge observé, l’incidence de ce cancer est plus élevée chez l’homme que chez la femme, toutefois l’écart se resserre au détriment de ces dernières. L’évolution des cas de ce cancer dans la population féminine pose question. En effet, alors que l’incidence du cancer du poumon est globalement stable, voire diminue, chez l’homme (Figure 2), et que la mortalité est en baisse, ce n’est pas le cas chez la femme. Au contraire : les taux d’incidence comme de mortalité féminines sont en forte progression depuis 1990. (Figure 3)[5].

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Figure 2 : Courbe d’incidence du cancer du poumon chez l’homme (Europe 2015)

 

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Figure 3 : Courbe d’incidence du cancer du poumon chez la femme (Europe 2015). (Source : Estimation nationale de l’incidence et de la mortalité par cancer en France – Volume 1 – tumeurs solides)

 

Aux États-Unis et en Europe, la mortalité liée au cancer du poumon diminue chez l’homme depuis près de dix ans alors qu’elle est en constante augmentation chez la femme.

Entre 1990 et 2006, le taux de mortalité due au cancer du poumon chez les hommes a diminué de 25% alors que dans le même temps la mortalité par cancer du poumon chez les femmes a augmenté de près de 7%. Parallèlement, la mortalité globale liée aux cancers a diminué de près de 12% dans la population féminine.

Ces changements du taux de mortalité sont principalement liés aux caractéristiques épidémiologiques et en premier lieu à la consommation de tabac. Il existe une très bonne corrélation entre la diminution du tabagisme chez l’homme, la baisse de l’incidence puis de la mortalité par cancer du poumon et également une corrélation entre l’augmentation de la consommation de tabac chez la femme et l’accroissement du nombre de cancers du poumon et de décès. L’amélioration des traitements du cancer du poumon a permis de prolonger sensiblement la survie sans progression (PFS) ainsi que la survie globale (OS) à 12 ou 24 mois, mais avec un impact très modeste sur la survie à long terme. En effet, les statistiques américaines montrent que la survie à cinq ans des cancers du poumon est passée de 13% en 1975 à 16% en 2000 [6].

 

  • Distribution selon l’âge 

Dans les pays occidentaux, où la prévalence de cancer broncho-pulmonaire est importante, l’âge est un déterminant majeur du risque de développement de ce type de cancer. Son incidence est ainsi multipliée par 90 chez l’homme et par 30 chez la femme lorsque l’on compare les âges de 35 et de 75 ans. Le vieillissement de la population n’explique pas à lui seul l’accroissement de l’incidence des cancers pulmonaires en Europe, puisqu’on observe également une augmentation du nombre de décès prématurés, survenant avant l’âge de 65 ans. L’âge de survenue des cancers bronchiques est variable en Europe d’un pays à l’autre, résultant principalement des habitudes tabagiques des populations (Tableau I). L’analyse des incidences dans les tranches d’âge inférieures à 45 ans, entre 45 et 65 ans et au-delà de 70 ans, montre que dans les 20 prochaines années, la Grèce, l’Espagne, la France et la Belgique présenteront l’incidence la plus élevée de cancer bronchique en Europe. À l’inverse, comme cela est déjà le cas aux États-Unis, l’incidence devrait décroître chez l’homme dans les pays du Nord de l’Europe, et en particulier au Royaume-Uni, mais continuer à augmenter chez la femme [7].

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Tableau I : Distribution du cancer du poumon selon l’âge en Europe 2015 [8]. (Source : INCA 2017).

 

 

  • La distribution géographique 

Près de 60% des cas d’incidents de cancer broncho-pulmonaire surviennent dans les pays industrialisés. Il occupe ainsi la première place en termes de prévalence et de mortalité chez l’homme en Europe, Amérique du Nord, les Caraïbes, l’Amérique du Sud, l’Australie, la Nouvelle-Zélande et l’Asie du Sud-Est. Dans le monde, l’incidence la plus élevée se rencontre parmi la population masculine noire de Louisiane (110/100.000 habitants). Elle est de 62/100.000 chez les Américains de race blanche et en moyenne de 52/100.000 en Europe. À l’inverse, cette incidence reste faible en Inde rurale (1,5/100.000 habitants), en Afrique de l’Est et de l’Ouest (5/100.000 habitants) [9]. Chez l’homme, l’incidence la plus élevée est retrouvée en Belgique (75,2/100.000 habitants). Ces variations régionales sont essentiellement sensibles chez l’homme, suggérant le rôle associé de facteurs de risque d’origine professionnelle et industrielle, alors que les variations relevées chez la femme sont parallèles à la taille des agglomérations, en lien probable avec le tabagisme [10].

 

En Algérie

30.000 nouveaux cas de cancer sont diagnostiqués chaque année, avec une augmentation de 50% du nombre de personnes atteintes entre 1986 et 2000 (ANDS, 2003). Soit 3.399 nouveaux cas de cancers ont été enregistrés durant l’année 2003 dans la région Centre (sauf la région de Bejaïa et de Blida), avec un sex-ratio égal à 0,92 (Hammouda et al, 2003) [11]. Ces derniers chiffres sont malheureusement augmentés chaque année avec une prise en charge de moins en moins importante.

Le cancer du poumon occupe la première place chez l’homme, il représente 15% des cancers masculins, suivi du cancer colorectal et de la vessie. Tandis que chez la femme le cancer du sein se place au premier rang, suivi du cancer colorectal, du col utérin et de la thyroïde (Hammouda et al, 2003) [11]. Les données statistiques fournies par le registre du cancer concernant la région de Sétif, estiment que le cancer broncho-pulmonaire représente 18% des cancers. Il vient en première position avec un taux d’incidence standardisé (par rapport à la population mondiale) de 15,5/100.000 habitants (Hamdi-Cherif et al, 1991). Des données plus récentes (2015) fournies dans le registre du cancer de la Wilaya d’Oran, indiquent que l’incidence standardisée d’atteinte d’un cancer est de 105.4/100.000 chez les personnes de sexe masculin et de 111.5/100.000 chez les personnes de sexe féminin. [12]

Une classification rigoureuse des cancers les plus fréquemment recensés dans la population de l’Ouest algérien, a permis de classer le cancer du poumon en 2ème position, avec un pourcentage d’atteinte de 10,9% chez les deux sexes. Le cancer du poumon occupe la première position chez les personnes de sexe masculin avec 23,4%, suivi du cancer de la vessie et du cancer colorectal. Tandis, qu’il occupe le 11ème rang chez les personnes de sexe féminin avec un pourcentage de 1,1%, et se trouve largement devancé par le cancer du sein. Ce dernier est classé au 1er rang avec un pourcentage de 55,5% (Fouatih et al, 2015) [13];

En 2018, le cancer du poumon est placé en 2ème position après le cancer du sein, selon les estimation Globocan, avec 3.835 nouveaux cas tous sexes confondus, une prévalence de 3.645 cas traités pendant la même année, et une mortalité estimée à 3.826 décès, le plaçant au 1er rang en termes de mortalité (Tableau 2). Il est plus fréquent chez l’homme avec une incidence de 17,7/100.000 habitants et 2,9/100.000 habitants chez la femme (Figure 4,5) [14].

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Tableau 2 : Incidence, prévalence, mortalité du cancer du poumon Algérie 2018 (Source : Estimation Globocan 2018)

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Figure 4 : Incidence des cancers par sexe – estimations Globocan 2018 Algérie (Hamdi-Cherif, Registre du cancer Sétif 2018)

  • Distribution du cancer du poumon selon le type histologique et le pronostique

Les cancers du poumon sont classés en deux grandes catégories: le cancer du poumon non à petites cellules (NSCLC) qui représente 85% de tous les cancers du poumon et le cancer du poumon à petites cellules (SCLC) qui représente 15% (Herbst, Heymach, et Lippman 2008) [15]. Le NSCLC apparait souvent dans les tissus pulmonaires périphériques (Mac Redmond et al. 2006) [16] ; 25% des cas de NSCLC affectent les non-fumeurs (Sun, Schiller, et Gazdar 2007) [17]. Le NSCLC est caractérisé par un temps de doublement plus long (Aberle et al. 2014)[18], est divisé en 3 sous types pathologiques adénocarcinome, carcinome épidermoïde et carcinome à grandes cellules

  • L’adénocarcinome est le type le plus répandu de NSCLC, il représente 38,5% de tous les cas des cancers du poumon (Howlader et al, 2010; (Herbst, Heymach, et Lippman 2008) [15]. Il se présente sous forme un nodule périphérique (Kodama et al. 1984) [19], il est lié au tabac mais est également très fréquent chez les non-fumeurs et notamment chez la femme (Saito et al. 2017) [20].
  • L’épidermoïde qui représente 20% de tous les cancers du poumon (Herbst, Heymach, et Lippman 2008) [15], est fortement lié au tabagisme, le carcinome épidermoïde survient habituellement dans les vois respiratoires de façon centralisé (Tomashefski et al. 1990 ) [21], et il est caractérisé par une différenciation squameuse (Kumar V et al, 2013)[22].
  • Le carcinome à grandes cellules qui représente 2,9% de tous les cancers du poumon (Herbst, Heymach, et Lippman 2008) [15], est étroitement lié au tabagisme. Il se produit sous forme d’une grande masse périphérique, et est caractérisé par une croissance rapide et des métastases précoces (Ginsberg, Grewal, et Heelan 2007) [23].

Le cancer du poumon à petites cellules est la forme la plus agressive du cancer du poumon représente 14% de tous les cancers de poumon (American Cancer Society, 2014), il est associé à l’exposition au tabac (Herbst, Heymach, et Lippman 2008) [15]. Apparait fréquemment sou forme d’une masse centrale, et environ 25% sont présents en périphérie (Colby T et al, 1995) [24].

Facteurs de risque

  • Des agents reconnus cancérogènes pour le poumon

La responsabilité du tabac dans la survenue de cette maladie est un fait clairement établi. Ainsi, on estime que 80% à 90% des cancers du poumon sont directement liés au tabagisme [25]. C’est la présence de substances cancérigènes dans la fumée de tabac qui explique ce phénomène. Ce facteur de risque majeur présente certaines variations en fonction du mode de consommation du tabac et de caractéristiques individuelles :

  • La quantité de cigarettes fumées chaque jour. Plus elle est importante et plus le risque augmente.
  • La durée du tabagisme. Plus une personne fume depuis longtemps et plus elle est exposée à un risque de cancer du poumon.
  • L’âge du début du tabagisme. Bien que cela ne soit pas formellement démontré, plus la consommation de tabac est précoce et plus le risque serait élevé
  • La façon d’inhaler la fumée. Plus l’inhalation est fréquente et profonde, et plus le risque augmente.
  • L’usage d’un filtre. Il pourrait diminuer légèrement les risques.

La fumée de tabac comporte plus de 2.500 substances dont près de 60 ont été identifiées comme cancérogènes probables ou possibles. La question de l’association entre cancer bronchique et exposition passive à la fumée de tabac a été soulevée au début des années 1980 par deux publications mettant en évidence un excès de risque chez les épouses de sujets fumeurs. Depuis, plus de 50 études épidémiologiques ont été consacrées à l’analyse des effets de l’exposition à la fumée de tabac environnementale, que cela soit au domicile (exposition par le conjoint fumeur) ou sur les lieux de travail. Ces travaux notent de manière quasi constante une élévation significative du risque de mortalité par cancer bronchique dans les deux situations d’exposition [26].

L’amiante est sans conteste la plus fréquente des expositions professionnelles associées au cancer bronchique. Toutes les sortes de fibres d’amiante sont aujourd’hui reconnues comme facteur de risque du cancer bronchique. Les secteurs les plus à risque sont l’industrie textile (OR de 2 à 10), le secteur de l’isolation thermique (OR de 3 à 6), la fabrication d’amiante ciment (OR de 1,5 à 5,5), et de matériaux de friction (OR de 1,5 à 3,5)[27].

La silice

Le risque relatif de cancer du poumon associé à l’exposition professionnelle à la silice cristalline est généralement compris entre 1,2 et 1,4. Ce risque relatif, en présence de silicose, étant plus généralement compris entre 2 et 2,5, et d’environ 1,6 après ajustement sur le tabagisme [28].

Il ressort de l’analyse des cohortes les plus récentes concernant les sujets exposés au cadmium en milieu de travail, que le risque de cancer du poumon est observé dans les populations ayant eu les expositions les plus anciennes, et des niveaux d’exposition cumulée vraisemblablement les plus élevés, avec éventuellement association à d’autres agents cancérogènes, parfois incomplètement évalués. Le risque de cancer du poumon associé aux expositions environnementales au cadmium a été moins documenté [29].

L’existence d’un risque de cancer du poumon radio-induit est désormais bien établie, et plusieurs études fournissent des estimations de la relation dose-effet, en particulier pour ce qui est de l’exposition externe ou de l’inhalation de radon. Des incertitudes demeurent pour ce qui concerne l’estimation des doses et des risques associés aux expositions internes.

Parmi les autres facteurs épidémiologiques, le rôle de la substitution hormonale est régulièrement évalué dans les analyses populationnelles. Alors que plusieurs études de cohortes avec 10.000 à 20.000 participantes se sont révélées négatives, une légère augmentation du risque de cancer du poumon non à petites cellules (NSCLC) a été observée dans l’étude VITAL [30], vaste étude épidémiologique sur près de 168.000 individus aux États-Unis. Dans cette étude, le risque relatif de développer un cancer du poumon était augmenté d’un facteur de 1,48 uniquement pour les substitutions hormonales combinant œstrogènes et progestatifs mais n’a pas été observé lors de substitution par œstrogènes seuls (RR : 1,04). Par ailleurs, l’étude suisse de Bouchardy et coll., a montré que des patientes sous antiœstrogènes pour un cancer du sein, avaient une diminution de la mortalité lors de la survenue d’un cancer pulmonaire, confortant ainsi l’hypothèse que la substitution hormonale modifie le pronostic du cancer pulmonaire [31].

 

  • Des facteurs de risque encore débattus

Les données dans l’ensemble sont peu convaincantes dans l’industrie de production pour une association entre cancer du poumon et exposition aux fibres minérales artificielles (essentiellement laine de verre, laine de roche, laine de laitier). Il est actuellement trop tôt pour évaluer le risque de cancer du poumon lié aux fibres céramiques réfractaires.

Concernant les fumées de diesel, l’EPA (Environmental Protection Agency) énonce sa conclusion comme suit : « En conclusion, les études épidémiologiques sur le risque de cancer du poumon associé à l’exposition aux fumées diesel montrent des évidences cohérentes avec un lien causal. L’association observée est peu vraisemblablement le résultat de la chance ou de biais. Beaucoup d’études n’avaient pas d’informations sur le tabac, mais il est peu probable que le tabac soit à l’origine de ces résultats en particulier parce que les populations comparées dans ces études ont des caractéristiques socio-économiques proches. La force de l’association (entre 1,2 et 2,6) est relativement modeste par rapport aux standards épidémiologiques, et une relation dose-effet a été observée dans plusieurs études. Enfin, le fait que les fumées diesel augmentent le risque de cancer du poumon chez l’homme, est très plausible sur le plan biologique » [32].

Beaucoup de sociétés savantes considèrent que cette conclusion est cohérente avec les données de la littérature.

L’association entre pesticides et risque de cancer du poumon est une question difficile à documenter compte tenu des nombreux produits utilisés et de leur évolution en fonction de la période d’utilisation et des types de cultures [33].

Il existe d’autres substances cancérigènes d’origine professionnelle que l’amiante, favorisant le cancer du poumon, elles sont inscrites sur les tableaux des maladies professionnelles : les rayonnements ionisants, l’acide chromique et les chromates, les goudrons de houille, les huiles de houilles et les suies de combustion du charbon, l’inhalation de poussières ou de vapeurs arsenicales, l’inhalation de poussières ou de vapeurs renfermant des arsénopyrites aurifères, l’inhalation de poussières d’amiante, les opérations de grillage de mattes à nickel, le travail dans les mines de fer, l’inhalation de poussières ou fumées renfermant du cadmium, l’inhalation de poussières de cobalt associées au carbure de tungstène, le bis (chlorométhyl) éther. D’autres substances peuvent provoquer un cancer pulmonaire comme le béryllium [27].

  • La pollution atmosphérique ?

L’expertise collective de l’INSERM (Institut National de la Santé et de la Recherche Médicale Française) et de l’AFSSET (Agence Française de Sécurité Sanitaire de l’Environnement et du Travail), rendue publique en octobre 2008, a démontré que la pollution atmosphérique, d’origine automobile et industrielle, est un facteur, certes mineur comparé au tabac, mais qui pourrait favoriser le cancer pulmonaire. Cette pollution est due à des gaz, comme le dioxyde de soufre (SO2), le dioxyde d’azote (NO2), l’ozone (O3) et les fumées de diesel (Trédaniel et al., 2009). Il s’agit néanmoins de données préliminaires qui doivent être vérifiées [33].

  • Les antécédents personnels et familiaux

Les antécédents personnels d’affections respiratoires sont également un facteur de risque de cancer du poumon, en particulier les personnes atteintes de broncho-pneumopathie chronique obstructive (BPCO), de silicose, de bérylliose et de tuberculose. De même, les personnes qui ont déjà été atteintes d’un cancer pulmonaire ont davantage de risque de développer un deuxième cancer pulmonaire que la population générale. Par ailleurs, un cas de cancer pulmonaire familial augmente également le risque de survenue de ce cancer (Li et al. 2008) [34]. L’existence de facteurs génétiques protecteurs est fortement probable et pourrait expliquer qu’un grand nombre de fumeurs (plus de 80%) ne développent pas de cancers pulmonaires car ils ont la capacité de mieux métaboliser les constituants cancérogènes contenus dans la fumée de cigarette. Au contraire, il existe également des facteurs de susceptibilité génétique favorisant ce cancer. Certains polymorphismes de gènes sont connus pour être associés à un risque accru de cancer du poumon. C’est le cas des gènes codant pour les sous-unités α3, α5 et β4 des récepteurs nicotiniques à l’acétylcholine, pour lesquels certains polymorphismes nucléotidiques sont fortement liés à la dépendance tabagique et au cancer pulmonaire (Amos et al. 2008) [35] ; et pour le gène TERT qui code pour la télomérase reverse transcriptase (McKay et al., 2008). Cependant les mécanismes par lesquels ces polymorphismes sont associés aux cancers ne sont pas connus. De plus, Bell et al., ont décrit la présence d’une mutation germinale p.T790M du gène EGFR dans une famille présentant de multiples cas d’adénocarcinome de type bronchiolo-alvéolaire (Bell et al., 2005). Cette mutation était déjà connue comme mutation somatique, c’est-à-dire uniquement présente dans les cellules tumorales. La présence de cette mutation est associée à une résistance au traitement par anti-EGFR. Plus récemment, une mutation germinale sur l’exon 21 du gène EGFR (p.V843I) a également été décrite (Ikeda et al., 2008) [35,36].

  • Conclusion

Le cancer du poumon demeure un enjeu de santé publique majeur, avec une prévention primaire possible (tabagisme) et une prévention secondaire souhaitable. Le carcinome pulmonaire non à petites cellules est une maladie hétérogène dont les femmes constituent un sous-groupe distinct, en augmentation. Malgré les avancées thérapeutiques le pronostic reste mauvais, la bonne connaissance des facteurs de risque du cancer du poumon est un moyen efficace sur l’incidence du cancer broncho-pulmonaire, selon de nombreuses études actualisées, le tabac constitue le facteur de risque primordial dans la cancérigène de ce type de cancer, il est important de souligner les données épidémiologiques récentes en termes de mortalité et de prévalence dans notre pays pour orienter une optique préventive dans les planifications des stratégies de lutte contre le cancer du poumon.

 

Liens d’intérêts : Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts.


 

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Mot de la coordinatrice

Des progrès récents et convergents rendent désormais possible la notion longtemps théorique de traitement personnalisé du cancer.

 

Le mot de la coordinatrice

 

Des progrès récents et convergents rendent désormais possible la notion longtemps théorique de traitement personnalisé du cancer.

L’amélioration de la compréhension des mécanismes fondamentaux de la transformation épithéliale bronchique a permis la conception de nouvelles molécules thérapeutiques pour inhiber les signalisations cellulaires de la prolifération.

 De cette meilleure compréhension sont nées, à l’orée de ce siècle, des thérapeutiques « concepts » les thérapies ciblées qui ont, en 10 ans, prouvé leur bien-fondé.

Ainsi, au cours de la décennie écoulée le CBNPC a été la tumeur solide qui a connu le plus profond bouleversement, passant par un véritable démembrement moléculaire et une révolution thérapeutique, d’autres grandes avancées ont suivi avec le développement de l’immunothérapie.

Les articles du présent numéro permettent de faire le point sur la prise en charge des cancers bronchiques non à petites cellules au niveau national et international . Pour cela je tiens à remercier tous les auteurs et co-auteurs qui sans hésitation aucune, ont répondu positivement à la réalisation de ce numéro de la Revue El Hakim.

 

Professeur E. Kerboua

Chef d’Unité Hommes

Centre Pierre & Marie Curie, Alger

 

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Editorial

Cette revue des actualités récentes sur les cancers bronchiques met en exergue les progrès réalisés ces trente dernières années dans ce domaine de l’oncologie.

 

 

Éditorial

Cette revue des actualités récentes sur les cancers bronchiques met en exergue les progrès réalisés ces trente dernières années dans ce domaine de l’oncologie.

Pour rappel, la chimiothérapie anticancéreuse avait été comparée dans une méta-analyse, aux meilleurs traitements symptomatiques au milieu de la décennie 1990, pour être validée en pratique courante. Cette chimiothérapie anticancéreuse avait été renforcée par des drogues de deuxième puis de troisième génération et enfin par des thérapies ciblées essentiellement des anticorps monoclonaux et des inhibiteurs de tyrosine kinase. Cela avait déjà permis d’augmenter la survie des cancers bronchiques non à petites cellules localement avancés et métastatiques de manière significative, permettant de dépasser 18 mois de survie. Alors que celle-ci ne dépassait pas six mois il y a vingt-cinq ans.

Les données obtenues avec ces thérapies ciblées et ces nouvelles drogues de chimiothérapie ont permis d’avancer dans la connaissance plus intime de la cancérogénèse bronchique.

Et d’ouvrir de nouvelles voies thérapeutiques révolutionnaires que ce soit dans d’autres anticorps monoclonaux, d’autres TKI plus affinées en fonction des voies de signalisation, mais aussi et surtout un autre mécanisme de lutte anticancéreuse : l’immunothérapie qui a changé radicalement les paradigmes de la prise en charge des CBNPC.

En témoignent les différentes contributions de spécialistes algériens dans cette revue actualisée, qui permettront aux patients, à leurs familles et aux soignants, de passer d’une maladie mortelle à une maladie chronique dans de bonnes conditions de qualité de vie.

Professeur Kamel Bouzid

Service d’Oncologie Médicale

EHS Spécialisé en Cancérologie

Centre Pierre et Marie Curie, Alger

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