Interview ; « Le cancer du poumon à l’ère de la médecine personnalisée »

Le cancer du poumon est un véritable problème de santé publique, il représente en effet la première cause de mortalité par cancer dans le monde et en Algérie. Il occupe, dans notre pays, le deuxième rang des cancers chez l’homme après les cancers colorectaux,

 

Interview du Pr Z.C. Amir

 

  • Le cancer du poumon est en nette croissance, responsable du plus grand nombre de décès par cancer dans le monde. Pourriez-vous nous parler de la situation épidémiologique en Algérie ? (Incidence en constante croissance, mortalité dans les deux sexes, diagnostic tardif) …

Le cancer du poumon est un véritable problème de santé publique, il représente en effet la première cause de mortalité par cancer dans le monde et en Algérie. Il occupe, dans notre pays, le deuxième rang des cancers chez l’homme après les cancers colorectaux, avec une incidence brute de 12,5/100.000 habitants, et un âge moyen de 61 ans (Réseau des registres des tumeurs, Pr. Hamdi Cherif, 2017). Chez la femme, il viendrait au 7ème rang, avec une incidence estimée à 5,3/100.000 habitants (registre des tumeurs d’Alger, 2017).

L’incidence du cancer du poumon suit l’évolution de la consommation tabagique. En effet, le tabac demeure le principal facteur de risque de ce cancer, par conséquent nous n’insisterons jamais assez sur la lutte anti-tabagique, seul moyen de prévention qui permettra de faire baisser cette incidence.

Durant l’année 2020, année de la pandémie Covid-19, 327 cas de cancer du poumon ont été pris en charge dans notre service d’anatomie et de cytologie pathologiques du CHU Mustapha Bacha. Les carcinomes bronchiques non à petites cellules (carcinomes épidermoïdes et adénocarcinomes) sont de loin les plus fréquents et représentent 81%, avec une nette prédominance des adénocarcinomes. Une fois que le diagnostic d’adénocarcinome est établi, le pathologiste doit identifier des cancers du poumon différents sur le plan moléculaire. Dans 85% des cas, le pathologiste est confronté à des prélèvements de petite taille (biopsies bronchiques, biopsies transpariétales et cytoblocs), pour porter le diagnostic de certitude, déterminer le pronostic et évaluer les marqueurs prédictifs à la réponse thérapeutique.

La problématique réside dans le fait que plus de 85% des cancers du poumon sont diagnostiqués à un stade tardif, par conséquent ces patients ne peuvent bénéficier d’une chirurgie, leur seule alternative thérapeutique restera le traitement médical ou chimiothérapie. Malgré une amélioration de la survie globale avec un traitement à base de platine le pronostic reste sombre, avec une survie globale de 10% à 5 ans. Les progrès ont été considérables ces dernières années tant du point de vue des techniques de diagnostic, que thérapeutique (traitement médical, thérapie ciblée, immunothérapie).

Les biomarqueurs éléments clé de la médecine de précision

  • À la base des avancées révolutionnaires dans le cancer du poumon, il y a la compréhension de la génétique et des voies pathologiques qui sont responsables du cancer. Pourriez-vous nous expliquer le rôle des biomarqueurs, mutations précises ou des expressions génétiques dans la prise en charge du cancer du poumon ?

Ces dernières années le développement de la biologie moléculaire a permis une meilleure compréhension de l’oncogenèse (en particulier des voies de signalisations oncogénétiques), et le développement de nouvelles thérapies ciblées (inhibiteurs des tyrosines kinases ‘TKI’) souvent associées à un type et/ou sous-type histologique spécifique. De multiples altérations génétiques ayant un impact dans la sélection thérapeutique ont été identifiées telles que la mutation EGFR, la translocation ou fusion ALK, la translocation ROS1, la mutation BRAF V600E, l’amplification MET exon 14 skipping, NTRK, RET, KRAS), qui seraient mutuellement exclusives (les chevauchements sont rares, on parle d’altérations concurrentes retrouvées dans 1 à 3% des cas).

Ces testing moléculaires sont réalisés à un stade avancé et métastatique de la maladie, sur des types histologiques spécifiques, essentiellement les adénocarcinomes, carcinomes bronchiques non à petites cellules NOS, carcinomes à grandes cellules. Pour le carcinome épidermoïde, l’indication est posée sur décision de la réunion pluridisciplinaire (si le patient est non ou peu fumeur, si la biopsie est de petite taille peu représentative, et s’il y a suspicion d’une histologie mixte).

D’autres anomalies moléculaires sont des mutations de résistance aux TKI telles que la mutation EGFR T790M, la mutation KRAS.

Plus récemment, l’immunothérapie, une autre alternative thérapeutique prometteuse, basée sur le principe de la restauration de l’immunité anti-tumorale a été approuvée par la FDA dans les cancers bronchiques non à petites cellules (adénocarcinomes et carcinomes épidermoïdes), qui ne présentent pas d’anomalie moléculaire EGFR/ALK/ROS1/BRAF/KRAS ; et qui expriment PD-L1 en immunohistochimie (Expression déterminée par le ‘tumor proportion score : TPS‘). Un entrainement approprié des pathologistes est essentiel pour une interprétation adéquate du TPS.

Tous ces progrès en oncologie imposent au pathologiste une démarche plus large, un challenge, pour une prise en charge optimale du cancer du poumon. Actuellement, la seule plateforme de biologie moléculaire fonctionnelle qui prend en charge le testing moléculaire du cancer du poumon en Algérie est celle du service d’anatomie, de cytologie pathologiques et de biopathologie du CHU Mustapha.

Des traitements de plus en plus personnalisés

  • Grâce aux traitements “sur mesure”, on espère ainsi une meilleure efficacité de la prise en charge, moins d’effets indésirables et une meilleure qualité de vie. À cet effet, l’accès aux thérapies innovantes est une priorité pour le patient (quel serait votre message d’espoir) ?

Les modalités de prise en charge du patient doivent faire l’objet d’une discussion pluridisciplinaire (RCP) tenant compte de son âge, du PS, de ses comorbidités, du stade TNM, du type histologique et des caractéristiques moléculaires. Les thérapies ciblées et l’immunothérapie, ont apporté de nouveaux espoirs. Ces thérapies innovantes sont adaptées en fonction des caractéristiques morphologiques et moléculaires de la tumeur. Le tissu tumoral reste à ce jour la clé de l’analyse moléculaire et du ciblage thérapeutique, c’est un nouveau challenge pour les pathologistes qui doivent réaliser plus de tests pour peu de tissu tumoral, et en peu de temps pour les faire.

Notre message d’espoir est que ces thérapies innovantes ont véritablement révolutionné la façon dont est traité le cancer du poumon, nous devons cependant développer des moyens pour accroître d’une part l’accès au diagnostic, en assurant une équité d’accès aux tests moléculaires innovants et des tests de qualité à travers tout le territoire national et enfin et surtout, la disponibilité de ces traitements pour tous les patients.

Les décisions de ces thérapies doivent être prises en RCP dans le but de traiter uniquement les patients pour lesquels le bénéfice est très important, traduisant une bonne efficacité et d’éviter un traitement inutile, coûteux, toxique en préservant une bonne qualité de vie.

Enfin, il reste indispensable de lutter contre le tabagisme, d’encourager et d’accompagner le sevrage tabagique en prévention primaire, mais aussi après le cancer, car la poursuite du tabagisme majore notamment le risque de complications des traitements, de second cancer, et a un impact sur la survie.

 

 

Références

 

  • Hamdi Cherif : Réseau National des registres du cancer Algérie (incidences 2015), Registre des Tumeur d’Alger
  • Planchard. Et al. Lung and chest tumours metastatic non-small lung cancer. ESMO guidelines. Ann. Oncol, 2018, 29 (suppl 4)iv192-iv237
  • Planchard . La Lettre du Cancérologue • Vol. XX – n° 6 – juin 2011
  • Dr Tasuku Honjo won the 2018 Nobel Prize in physiology or medicine for discovering the immune T-cell protein PD-1.
  • Novello S, Barlesi F, Califano R, Cufer T, Ekman S, Levra MG, et al. Metastatic non-small-cell lung cancer: ESMO Clinical Practice Guidelines for diagnosis, treatment and follow-up. Ann Oncol Off J Eur Soc Med Oncol. sept 2016;27(suppl 5):v1‑27.
  • National Comprehensive Cancer Network (NCCN) Non-small cell lung cancer guidelines. version 4 – 2021
  • GLOBOCAN 2018 : Estimated Cancer Incidence, Mortality and Prevalence Worldwide in 2018. IARC, World Health Organization. undefined

 

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Interview ; « Le cancer du poumon à l’ère de la médecine personnalisée »

Selon les données du réseau national des registres des cancers présenté par le Professeur Hamdi-Cherif en Avril 2021, 40.446 nouveaux cas ont été enregistrés, le cancer du poumon arrive en première position chez l’homme avec 3.198 nouveaux cas.

 

Interview du Pr F. SEGHIER

 

1. Le cancer du poumon est en nette croissance responsable du plus grand nombre de décès par cancer dans le monde, pourriez-vous svp nous parler de la situation épidémiologique en Algérie ? (Incidence en constante croissance, mortalité dans les deux sexes, diagnostic tardif).

Selon les données du réseau national des registres des cancers présenté par le Professeur Hamdi-Cherif en Avril 2021, 40.446 nouveaux cas ont été enregistrés, le cancer du poumon arrive en première position chez l’homme avec 3.198 nouveaux cas. Tout en sachant que la pandémie Covid-19 a eu un impact négatif sur la collecte des données, puisque le taux de couverture d’enregistrement était de 82% à la différence de l’année 2017 ou il avait atteint les 90%.

Concernant la mortalité, selon le rapport de l’INSP de 2015-2016 les tumeurs tous cancers confondus étaient responsables de 12% des décès. Malheureusement, nous ne disposons pas des causes de décès selon la localisation, cependant les estimations faites par le Globocan 2020, le cancer bronchique est responsable de plus de 4.000 décès.

En 2021, on continue à recevoir les malades à des stades localement avancés et métastatiques limitant la prise en charge thérapeutique à la chimiothérapie et parfois relevant uniquement de soins de support.

2. Le tabac apparait comme principal facteur de risque du cancer du poumon, pourriez-vous en dire un peu plus ainsi que sur les autres facteurs impliqués dans la survenue du cancer pulmonaire ?

Le cancer est multifactoriel, le rôle du tabac a été démontré depuis plusieurs décennies suites aux études faites dans les années cinquante (Hill et Doll), le tabagisme actif est en nette progression, on compte à ce jour 1,3 milliard de fumeurs dans le monde, soit une personne sur cinq. Il faut savoir qu’une personne qui fume multiplie par 10 à 15 son risque de développer un cancer du poumon par rapport à non-fumeur.

Ces dernières années on remarque l’émergence du tabagisme féminin à un âge jeune, à côté de cela il faut noter que les femmes sont plus sensibles à l’effet carcinogène de la fumée du tabac par rapport aux hommes, le tabagisme passif est aussi responsable de la survenue de cancer bronchique chez la plupart des patients non-fumeurs, et justifie les campagnes de prévention du tabagisme passif par l’interdiction de fumer dans les lieux publics.

En plus du tabac, la consommation de cannabis semble induire un risque plus important de survenue de cancer bronchique que celle de la fumée de tabac.

D’autres facteurs sont aussi incriminés dans la survenue du cancer bronchique mais à moindre fréquence à savoir l’arsenic l’amiante, le radon, et les particules diésel.


 

Des traitements de plus en plus personnalisés

3. Les récentes innovations en médecine de précision telles que les thérapies ciblées et les immunothérapies, représentent de grands espoirs d’avancées décisives contre les cancers permettant de proposer des traitements à la carte adaptée à chaque profil de patient. Qu’en pensez-vous ?

Il y a une vingtaine d’année pour traiter un cancer du poumon on avait besoin de connaitre en plus du stade de la maladie, le type histologique, est-ce un cancer à petites cellules ou un cancer non à petites cellules, puis est venue l’ère de la thérapie ciblée et de la biologie moléculaire. Actuellement il est primordial de connaitre, en plus de la variété histologique, l’analyse de biologie moléculaire (en cas d’adénocarcinome), à la recherche de certaines mutations telle que l’EGFR, la translocation du gène ALK, du ROS1 ou bien la mutation du BRAF V600e. Si une mutation est détectée, le patient sera candidat à recevoir une thérapie ciblée lui permettant d’améliorer sa survie globale. Ce traitement est maintenu jusqu’à progression de la maladie, la biopsie est refaite à ce moment-là pour rechercher de nouvelles mutations, et de là, proposer d’autres traitements. On est dans l’ère du traitement à la carte.

À côté de la thérapie ciblée, on a vu depuis 2015 l’émergence d’un traitement innovant qui est l’immunothérapie, qui a pour objectif d’activer les défenses immunitaires du patient pour combattre les cellules cancéreuses, son utilisation seule ou en association avec la chimiothérapie dépend de l’expression de PD1 ou PDL1 (Programmed Death-Ligand 1), qui sont des protéines exprimées à la surface des cellules immunitaires et des cellules tumorales.

Pratiquement tous les essais qui ont été fait ont démontré la supériorité de l’immunothérapie par rapport à la chimiothérapie avec des survies qui peuvent aller jusqu’à 3 ans voire plus, ce traitement ne peut être qu’à 40% les patients.

4. Grâce aux traitements “sur mesure” on espère ainsi une meilleure efficacité de la prise en charge, moins d’effets indésirables et une meilleure qualité de vie, à cet effet l’accès aux thérapies innovantes est une priorité pour le patient (quel serait votre message d’espoir) ?

Il est vrai que donner le bon traitement au bon patient a l’avantage d’être efficace et permet d’améliorer sa qualité de vie et lui évite de subir des effets secondaires inutilement. Je suis de nature optimiste quant à l’acquisition des thérapeutiques innovantes qui sont, il faut le souligner, assez chères, mais en attendant, j’aimerais dire un dernier mot : le cancer du poumon est un cancer qui peut être évitable si on arrive à éradiquer le tabagisme dans toutes ses formes, d’où la place de la prévention.

 

 

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Adénocarcinome pulmonaire métastatique EGFR muté (cas clinique)

Environ 10% des personnes atteintes d’un CBNPC (Cancer Bronchique Non à Petites Cellules) présentent une mutation du gène de l’EGFR. La recherche de cette mutation est pertinente seulement dans le cas des CBNPC qui sont à un stade de développement métastatique ou avancé.

 

S. Ould Hadj, S. Lanasri, E. Kerboua, K. Bouzid, EHS Centre Pierre et Marie Curie, Alger

 

Date de soumission : 08 Février 2021

 

Résumé : Environ 10% des personnes atteintes d’un CBNPC (Cancer Bronchique Non à Petites Cellules) présentent une mutation du gène de l’EGFR. La recherche de cette mutation est pertinente seulement dans le cas des CBNPC qui sont à un stade de développement métastatique ou avancé. La présence d’une mutation est plus fréquente chez certaines catégories de patients. Elle se retrouve en effet plus souvent chez les femmes, les non-fumeurs, les personnes d’origine asiatique ou chez les personnes atteintes d’adénocarcinome. A cet égard, il nous semble intéressant de vous rapporter ce cas d’une patiente présentant un CBNPC avec cette mutation EGFR, prise en charge au service d’oncologie médicale du Centre Pierre et Marie Curie à Alger.

Mots clés : CBNPC, EGFR, thérapie ciblées.

 

Abstract: About 10% of patients with NSCLC (Non-Small Cell Lung Cancer) have an EGFR mutation. The search for this mutation is relevant only in the case metastatic or advanced stage of NSCLC. This mutation is more frequent in few categories of patients. It is indeed found more often in women, non-smokers, people of Asian origin or in people with adenocarcinoma. In this regard, it seems interesting to report this case of a patient with NSCLC with EGFR mutation, treated in medical oncology department of Centre Pierre et Marie Curie, Algiers.

Key words: NSCLC, EGFR, targeted therapy.

Observation clinique 

C’est une femme née en mars 1957, originaire et demeurant à Alger, mariée et mère d’une fille, médecin de profession, aux antécédents (ATCD) familiaux de cardiopathie ischémique chez le frère, et ATCD personnels d’hypertension artérielle, et de diabète non insulino-dépendant sous traitement médical depuis 20 ans, et une intoxication tabagique occasionnelle depuis une dizaine d’années.

Son histoire de la maladie remontait à Avril 2018 ou elle avait présenté un syndrome temporal fait de troubles mnésiques très espacés mais recrudescents, des céphalées paroxystiques soulagées par la prise d’antalgiques, puis une aphasie. Devant la persistance de la symptomatologie elle avait consulté chez son médecin qui avait demandé une imagerie par résonance magnétique (IRM) cérébrale qui avait retrouvée deux processus intra parenchymateux gauche expansifs, un frontal de 22*19 mm et un autre temporal de 32*27 mm. Ces lésions sont entourées d’une importante réaction œdémateuse expansive effaçant les sillions corticaux en regard avec effet de masse sur le ventricule latéral évocatrices de localisations secondaires.

 IRM cérébrale avril 2018

Devant ces images fortement évocatrices de localisations secondaires, une recherche étiologique s’imposait, un pet scanner à la recherche de la tumeur primitive avait été demandé, ce dernier avait retrouvé le 5 mars 2018, une masse tumorale parenchymateuse du segment apical du lobe inferieur du poumon gauche, hyper métabolique (SUV max 24,68), mesurant 50/63/79 mm avec envahissement scissural et une large base d’implantation pariétale et costo-vertébrale, sans signe d’envahissement en regard avec une adénopathie non hypermétabolique de la loge de baryté de 7 mm dont la nature métastatique ne pouvait être formelle, il n’avait pas trouvé par ailleurs d’autres foyers hypermétaboliques suspects.

Devant ce tableau clinique et radiologique évoquant un néoplasie pulmonaire lobaire inférieure gauche avec métastases cérébrales révélatrices, classée T4N0M1b de stade IVb ; une biopsie avait été demandée sur la tumeur primitive mais malheureusement cette dernière n’avait pas été concluante, ce qui nous avait amené à faire une biopsie stéréotaxique dans un service de neurochirurgie. Le diagnostic histologique d’adénocarcinome pulmonaire avait été posé avec à l’immunohistochimie une mutation activatrice sur l’exon 18.

Notre patiente avait été orientée pour faire une radiothérapie cérébrale stéréotaxique qui avait été réalisé au Maroc, à son retour au mois de mai 2018 un traitement médical type thérapie ciblée par un inhibiteur de tyrosine kinase (TKI) avait été entamé à la dose de 250 mg dose quotidienne, ce traitement avait été bien conduit et très bien toléré avec une réponse thérapeutique qui avait été estimée à 75% lors de la première évaluation.

Après un suivi de 16 mois, une progression radiologique avait été rapportée tant sur le plan local pulmonaire que sur le plan cérébral, ce qui nous avait contraint à arrêter le traitement et à rechercher à l’histologie la mutation de résistance T 790M qui lui avait valu un autre déplacement au Maroc. Malheureusement, cette mutation n’était pas retrouvée, et un traitement par chimiothérapie type sels de platine associé au pémétrexed tous les 21 jours, avait été instaurée chez elle, dès son retour en septembre 2019, ce dernier et malgré une toxicité assez importante avait conduit à une réponse objective qui avait été estimée cette fois ci a 50%.

Mais la patiente n’en pouvait plus et avait demandé qu’on fasse la recherche du PDL1 sur ses blocs de prélèvements anatomopathologiques, ce dernier examen avait retrouvé une surexpression du PDL1 à raison de 80%, à cet effet nous avons donc entamé un traitement par immunothérapie type pembrolizumab à la dose de 200 mg mensuel. Ce dernier avait été bien toléré mais avait conduit à une progression radiologique après 8 cycles de traitements. Nous avions donc associé la chimiothérapie à ce traitement par immunothérapie car la patiente avait émis le désir de garder l’immunothérapie mais malheureusement après 3 cycles, notre patiente avait été infectée par la Covid-19 en novembre 2020 est actuellement en très mauvais état général.

Nous avons obtenu chez notre patiente un bénéfice de 16 mois de survie sans progression avec la thérapie ciblée anti EGFR au profil d’une bonne tolérance et observance du traitement. Malgré les réticences de la patiente le traitement standard avec chimiothérapie avait permis une réponse thérapeutique objective avec un gain en survie mais au prix d’une toxicité non négligeable.

Nous avions suivi notre patiente durant 30 mois, depuis le début de sa maladie en avril 2018 jusqu’à ce jour, le 1er février 2021, ou nous venons de la perdre suite aux complications de sa Covid-19.

Discussion 

Les mutations les plus fréquemment retrouvées dans l’adénocarcinome pulmonaire sont mentionnées dans la figure ci-dessous, ces mutations sont généralement activatrices et mutuellement exclusives.

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Le gène EGFR, situé sur le bras court du chromosome 7 (7p11.2), comporte 28 exons et code pour une protéine transmembranaire comportant un site extra-membranaire (récepteur) et un domaine cytoplasmique avec une activité tyrosine kinase. L’EGFR fait partie de la famille de récepteurs tyrosine kinase HER/erbB comprenant quatre protéines (EGFR/HER-1, HER-2/neu, HER-3, HER-4) avec une structure moléculaire similaire. La liaison du ligand avec l’EGFR entraîne une activation du système tyrosine kinase et une transduction du signal en aval contrôlant la prolifération, l’apoptose, l’angiogenèse, l’invasion tumorale. Les mutations de l’EGFR sont présentes dans environ 10% des CNPC. Elles sont plus fréquentes dans les adénocarcinomes (15-20%), en particulier chez les patients de sexe féminin, non-fumeurs et d’origine asiatique (environ 40-50%). Elles sont associées à un meilleur pronostic (survie globale de 37 mois). Il s’agit majoritairement de mutations des exons 18-21 avec dans 90% des cas des délétions de l’exon 19 (associées à 70-100% de réponses aux TKI) ou des mutations ponctuelles dans l’exon 21 (associées à 20-70% de réponses aux TKI). Les cellules cancéreuses avec ces mutations de l’EGFR ont une sensibilité augmentée aux TKI ; d’une part, parce que leur survie dépend de cette voie de signalisation et, d’autre part, parce que les TKI ont vraisemblablement une plus grande affinité avec l’EGFR muté.

L’évaluation de l’efficacité potentielle des traitements anti-EGFR chez des patients avec un CNPC est malheureusement compliquée du fait qu’il existe de nombreuses mutations différentes de l’EGFR. Certaines mutations de l’EGFR comme T790M (primaire ou secondaire), en diminuant l’affinité du médicament avec l’EGFR, prédisent à l’inverse une résistance à la thérapie. Par ailleurs, une résistance acquise s’observe chez les patients après traitement par des anti-EGFR de type TKI, due au développement de nouvelles mutations (par exemple : T790M).

Bien qu’il s’agisse de la mutation la plus fréquente (25-30%), il n’existe pour l’instant pas de thérapie ciblée pour KRAS. Typique chez les patients fumeurs, elle est associée à une résistance à l’anti-EGFR et à un mauvais pronostic (survie globale de quinze mois).

Les mutations du gène BRAF (par exemple : V600E), codant pour une kinase située immédiatement en aval de KRAS dans la voie de signalisation, se retrouvent dans environ 3% des adénocarcinomes avec EGFR et KRAS non mutés. Elles sont aussi associées à une résistance aux anti-EGFR.

Le gène de fusion ALK-EML4 (Anaplastic lymphoma receptor tyrosine kinase-Echinoderm microtubule-associated protein-like 4) sur le chromosome 2p est présent dans environ 3-7% des adénocarcinomes.

Certaines mutations peuvent être associées à une morphologie et/ou à des sous-types histologiques particuliers d’adénocarcinomes. De ce fait, les mutations les plus probables, et à rechercher en priorité pourraient être prédites sur la base de la morphologie de l’adénocarcinome. Bien que les mutations de l’EGFR fassent actuellement partie des tests moléculaires courants pour le CBNPC, d’autres cibles thérapeutiques potentielles sont en cours d’investigation (par exemple : BRAF, HER-2, c-KIT,). Il est donc très probable que le nombre et la diversité de ces analyses moléculaires augmentent dans le futur, globalement mais aussi pour chaque cas individuel.

Aussi il faut savoir que le carcinome pulmonaire non à petites cellules est une maladie hétérogène dont les femmes constituent un sous-groupe distinct, en augmentation. Des variations dans l’expression et le taux de mutation dans plusieurs voies de signalisation, des capacités de réparation de l’ADN moindre ainsi que des effets hormonaux sont des facteurs pouvant expliquer les disparités observées entre hommes et femmes face au CBNPC. Globalement, les femmes présentent des cancers pulmonaires avec un profil plus favorable ainsi qu’un taux de réponses aux traitements classiques (chirurgie, radiothérapie et chimiothérapie) meilleur que les hommes. Ces distinctions biologiques et leur impact sur la survie rendent indispensable la stratification par genre dans les études cliniques. En effet, une meilleure compréhension des différences moléculaires des tumeurs pulmonaires chez l’homme et la femme permettra d’ouvrir de nouvelles voies de recherche et de développer des prises en charge plus personnalisées afin d’améliorer le pronostic de patients atteints d’un CBNPC.

Conclusion

Les nouvelles thérapies ciblées reposent sur une étude moléculaire de l’oncogenèse, de la prolifération et de l’environnement tumoraux dans leur grande complexité.

Cibler le récepteur EGFR semble représenter une stratégie intéressante dans les CBNPC métastatiques, potentiellement en toute ligne de traitement. La stratégie de blocage de l’EGFR suscite également un vif intérêt dans les stades plus précoces de la maladie, par exemple dans des prises en charges multimodales à visée curative pour les tumeurs encore localisées.

En deçà de ces données empiriques, la recherche de base et translationnelle est centrale dans l’identification des facteurs prédictifs de survie liés à l’administration de ces traitements, afin de savoir sélectionner de façon optimale à l’avenir les patients qui doivent – ou ne doivent pas – en bénéficier. De nouveaux inhibiteurs irréversibles de la tyrosine-kinase de l’EGFR sont actuellement développés et permettent une réponse durable chez des patients choisis. Ces développements laissent augurer, à terme, de réels progrès dans la prise en charge du cancer du poumon.

 

Liens d’intérêts : Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts.

AD2

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Pet scanner de mai 2018

 

 

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Image de contouring pour radiothérapie stéréotaxique


 

Références 

 

1.      Soria JC, Ohe Y, Vansteenkiste J, Reungwetwatta- na T, Chewaskulyong B, Lee KH et coll. Osimertinib in untreated EGFR-mutated advanced non-small- cell lung cancer. N Engl J Med 2018;378:113-25.

2.      Société canadienne du cancer. Tumeurs cancéreuses du poumon. [en ligne] undefined ca/fr-ca/cancer-information/cancer-type/lung/lung-cancer/cancerous-tumours/?region=qc (site visité le 23 décembre 2018).

3.      Institut national d’excellence en santé et services sociaux (INESSS). Tagrisso — Cancer du poumon non à petites cellules. Avis de refus d’inscription aux listes des médicaments. [en ligne] undefined Juin_2017/Tagrisso_2017_06.pdf (site visité le 9 juin 2018).

4.      Barlesi F, Mazieres J, Merlio J-P, Debieuvre D, Mosser J, Lena H et coll. Routine molecular profiling of patients with advanced non-small-cell lung cancer: results of a 1-year nationwide programme of the French Cooperative Thoracic Intergroup (IFCT). Lancet 2016;387:1415–26.

5.      Midha A, Dearden S, McCormack R. EGFR mutation incidence in non-small-cell lung cancer of ad- enocarcinoma histology: a systematic review and global map by ethnicity (mut Map II). Am J Cancer Res 2015;5:2892-911.

6.      Sun JM, Park K. Can we define the optimal sequence of epidermal growth factor receptor tyrosine kinase inhibitors for the treatment of epidermal growth factor receptor-mutant non-small cell lung cancer? Curr Opin Oncol 2017;29:89-96.

7.      Sullivan I, Planchard D. Osimertinib in the treatment of patients with epidermal growth factor receptor T790M mutation-positive metastatic non- small cell lung cancer: clinical trial evidence and experience. Ther Adv Respir Dis 2016;10:549-65.

8.      Kuiper JL, Heideman DAM, Thunnissen E, Paul MA, van Wijk AW, Postmus PE et coll. Incidence of T790M mutation in (sequential) rebiopsies in EGFR-mutated NSCLC patients. Lung Cancer 2014;85:19–24.

9.      AstraZeneca. Monographie de produit : TAGRIS- SOMD (osimertinib). [en ligne] undefined trazeneca.ca/content/dam/azca/downloads/production formation/tagrisso-product-monograph-fr.pdf (site visité le 2 juin 2018).

10.    AstraZeneca. Approbation par Santé Canada de TAGRISSOMD (osimertinib) pour le traitement des patients atteints d’un cancer du poumon non à petites cellules localement avancé ou métastatique porteur de la mutation T790M de l’EGFR. [en ligne] undefined contacts/press-releases/2016/approbation-par- santé-canada-de-tagrisso.html# (site visité le 2 juin 2018).

11.    Mok TS, Wu YL, Ahn MJ, Garassino MC, Kim HR, Ramalingam SS et coll. Osimertinib or platinum- pemetrexed in EGFR T790M-positive lung cancer. N Engl J Med 2017;376:629-40.

12.    Ramalingam SS, Yang JC, Lee CK, Kurata T, Kim DW, John T et coll. Osimertinib as first-line treatment of EGFR mutation-positive advanced non- small-cell lung cancer. J Clin Oncol 2018;36:841-9.

13.    Soria JC, Ohe Y, Vansteenkiste J, Reungwetwat- tana T, Chewaskulyong B, Lee KH et coll. Osimertinib in untreated EGFR-mutated advanced non-small-cell lung cancer—Supplementary Appendix. [en ligne] undefined full/10.1056/NEJMoa1713137#article_supple- mentary_material (site visité le 9 juin 2018).

14.    Soria JC, Ohe Y, Vansteenkiste J, Reungwetwattana T, Chewaskulyong B, Lee KH et coll. Osimertinib in untreated EGFR-mutated advanced non-small-cell lung cancer—Protocol. [en ligne] undefined Moa1713137/suppl_file/nejmoa1713137_proto- col.pdf (site visité le 9 juin 2018).

 

 

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Expertise locale du cancer du poumon sur 8 ans Au niveau de l’unité hommes du service d’Oncologie Médicale du Centre Pierre et Marie Curie

Nous rapportons par cette étude rétrospective les résultats de la prise en charge des Cancers Bronchiques Non à Petites Cellules (CBNPC) dans l’unité hommes du Service d’Oncologie Médicale sur 8 ans.

 

E. Kerboua1, S. Ouldhadj1, M. Hamzaoui1, W. Boulfoul1, S. Lanasri 1, F. Oudjida2, K. Bouzid1

(1) oncologie médicale Centre Pierre & Marie Curie Alger

(2) Service d’anatomie pathologie Beni Messous

 Date de soumission : 22 Février 2021

Résumé : Nous rapportons par cette étude rétrospective les résultats de la prise en charge des Cancers Bronchiques Non à Petites Cellules (CBNPC) dans l’unité hommes du Service d’Oncologie Médicale sur 8 ans. L’objectif étant d’avoir une idée sur le profil épidémiologique des patients algériens et d’identifier les contraintes et les faiblesses du diagnostic (clinique, radiologique, histologique et moléculaire), et du traitement (chirurgie, radiothérapie, chimiothérapie, thérapie ciblée et immunothérapie). Cette série pourrait servir de rationnel pour une étude prospective afin d’améliorer la prise en charge de cette pathologie.

Mots clés : CBNPC, étude rétrospective, contraintes et faiblesses de prise en charge.

 

Abstract: We report through this retrospective study the results of the management of Non-Small Cell Lung Cancer (NSCLC) in the Male Unit of the Medical Oncology Department over 8 years, the objective is to have an idea of the epidemiology of Algerian patients and to identify constraints and weaknesses in diagnosis (clinical, radiological, histological and molecular) and treatment (surgery, radiotherapy, chemotherapy, targeted therapy and immunotherapy). This series could serve as a rationale for a prospective study in order to improve the management of this pathology.

Key words: NSCLC, retrospective study, constraints and weaknesses in the management.


 

Introduction

Les différentes armes thérapeutiques du cancer du poumon sont adaptées à chaque cas, elles devraient être organisées de manière à concilier efficacité thérapeutique et qualité de vie. Cette organisation de soin se caractérise par une articulation et une coordination entre les actions de tous les professionnels intervenant dans la prise en charge du cancer du poumon et qui se prolongera après la fin des traitements.

Les étapes du parcours de soins d’un patient (bilan initial, thérapeutique, suivi) devraient être bien définies pour un résultat maximal. Par cette modeste étude nous avons essayé d’identifier les contraintes et les faiblesses de notre prise en charge.

Patients-Méthodes

Il s’agit d’une série rétrospective de Janvier 2011 à Décembre 2018, 200 patients traités pour CBNPC et 50 patients pour CPC dans l’unité hommes du Service d’Oncologie Médicale au Centre Pierre et Marie Curie d’Alger. Nos données portent uniquement sur les CBNPC.

Résultats

Les caractéristiques de nos patients sont résumées dans le tableau 1. Le sex-ratio est de 10H/1F avec un âge moyen de 60 ans (34-83) (Figure 1).

Figure 1 : répartition selon l’âge (ans)

60% sont fumeurs avec une moyenne de 50 paquets/année. Le mode de découverte le plus fréquent sont les signes respiratoires avec une proportion de 55%, les signes neurologiques sont retrouvés dans 18%, les douleurs osseuses témoignant d’une extension dans 12%, des syndromes paranéoplasiques dans 5%, et enfin dans 4% des cas il s’agit d’une découverte fortuite chez des gros fumeurs ou lors de consultation de médecine du travail (Figure 2).

EX1

Figure 2 : Mode de découverte

Le délai moyen de diagnostic est de 45 jours. Le diagnostic a été posé par biopsie bronchique et transpariétale dans 30% des cas respectivement, une biopsie cérébrale dans 15%, ce qui n’est pas du tout négligeable, 9% par biopsie ganglionnaire, 8% par biopsie chirurgicale et 6% par biopsie osseuse.

Des formes associées à d’autres cancers ont été retrouvées (4 cancers du sein, 3 cancers de vessie, 2 cancers du larynx, 2 cancers de la prostate, 1 cancer du testicule et 1 cancer du cavum).

Sur le plan histopathologique l’immunohistochimie a été réalisée systématiquement pour tous les prélèvements. Nous avons colligé 115 adénocarcinomes, 55 carcinomes épidermoïdes et 30 autres. La mutation EGFR a été recherchée pendant cette période chez 50 patients uniquement avec 10 positifs, 2 patients ont présenté secondairement la mutation T790M, 2 patientes étaient ALK positives, 1 patient PDL1 100%, 8 patients PDL1 ›50%.

Les stades localement avancés et métastatiques sont les plus fréquents avec des taux respectifs de 20% stades IIIB et 65% stades IV. Les sites métastatiques les plus fréquents sont l’os et le cerveau (30% et 27%) (Figure 3).

EX2

Figure 3 : sites métastatiques


 

Tableau 1 : Caractéristiques des patients

Paramètres

Résultats

   

Age moyen (ans)

 60 (34-83)

Sexe

10 H /1F

Status tabagique

60% Fumeurs /

Moy. 50 paquets/année

Mode de découverte

 55% signes respiratoires

18% signes neurologiques

12% douleurs osseuses

5% syndrome paranéoplasiques

4% découverte fortuite

Diagnostic

-30% Biopsie bronchique

-30% Biopsie trans pariétale

-15% Biopsie cérébrale

-9% -Biopsie ganglionnaire

– 8% Biopsie chirurgicale

– 6% Biopsie osseuse

Type Histologique

Adénocarcinomes

Carcinome épidermoïde

Autres

 N=115

 N=55

N=30

Status moléculaires

EGFR mutés

ALK +

Mutations T790M

PDL1 100%

PDL1 ›50%

n=10

n=2

n=2

n=1

n=8

Stades

IB

IIA

IIB

IIIA

IIIB

IV

1%

1%

2%

12%

20%

65%

Sites métastatiques

Os ………………………………. 30%

Cerveau ……………………… 27%

Surrénale …………………… 14%

Plèvre ………………………… 12%

Foie ……………………………. 10%

Ganglions ……………………… 7%

  • Le traitement : 80% des patients ont été traités par chimiothérapie (en moyenne deux lignes) (Figure 4), dont 60% avec bevacizumab, 4 patients par TKI dont 10 en 1ère ligne (gefitinib), et 5 en 2ème ligne (erlotinib), 4 patients par immunothérapie (pembrolizumab), 60 patients ont bénéficié d’une maintenance dont la durée moyenne est de 8 mois (2-28) :
  • 6 mois pour le pémétrexed (0-24)
  • 10 mois pour le Bevacizumab seul (2-28)
  • 3 mois pour Pémétrexed associe au bevacizumab (2-6)

EX3

Figure 4 : Protocole de chimiothérapie

Quarante-trois patients ont subi une radiothérapie encéphalique, 10 patients par radiothérapie décompressive, 15 patients ont bénéficié d’une chirurgie première ; et 10 patients ont eu une radiothérapie locorégionale.

Les réponses objectives (Figure 5) sont comme suit :

  • Réponses partielles : ………………………….. 22%
  • Stabilisations : …………………………………… 44%
  • Progressions : …………………………………… 27%

EX4

Figure 5 : Réponses objectives

La toxicité digestive a été la plus fréquente avec 20%, suivie de la toxicité hématologique 15% (Figure 6).

EX5

Figure 6 : Toxicité des protocoles

La survie globale moyenne est de 23 mois (15-3) ; IC 95% avec une médiane de 9 mois (4-13) IC 95% (Figure 7).

 

EX6

Figure 7 : Courbe de survie (mois)

Commentaires 

Notre étude a été comparée aux données de la littérature du Moyen-Orient et du Maroc avec des résultats similaires (Tableau 2). Selon le réseau national des registres des cancers 2.856 nouveaux cas ont été enregistrés en 2015 en Algérie, l’incidence augmente chez la femme mais la prédominance reste masculine, avec un âge moyen de 60 ans.

Malheureusement le diagnostic reste tardif (problèmes de moyens de diagnostic, insuffisance des RCP, de Pet scan, de médiastinoscopie, délai anatomopathologie, biologie moléculaire). Les stades IV restent prédominants dépassant les 50%, il y a une insuffisance des plateformes moléculaires, les délais de prise en charge restent trop longs en moyenne 45 jours. Des difficultés thérapeutiques subsistent de radiothérapie, de radio-chimio concomitantes inexistantes malgré les indications, les services de chirurgie thoraciques sont insuffisants, les thérapies ciblées sont très peu nombreuses beaucoup n’ont pas encore l’AMM en Algérie et l’immunothérapie enregistrée n’est toujours pas disponible. Toutes ces difficultés constituent une barrière pour optimiser la prise en charge, faciliter le parcours du patients et améliorer les résultats thérapeutiques.

 

Study

Age (years)

Sex %

Smoking history %

Histology

Stage%

EGFR

Morocco 2010-2012

N=137

JCO 2015

59 (37-87)

66 H

44 F

E 58

N 42

ADK 100%

IV 100

Mut 29/137 21%

Ex 19 69

Ex 21 21

Middle East Lebanon

N=204 2013-2015

C. Epidemio 2015

65,5 (31-87)

61,2 H

38,8 F

E 78,1

N 21,9

ADK 90,5%

IV 69,7

L.A 17,4

L 12,9

Mut 24/204 11,9%

Ex 19 48

Ex 21 40

KSA 1989-2003 n=45

Human Pathology 2006

59 (38-78)

79H

21F

E 9/45

ADK26/45

 

Mut 6/45 15,3%

Huang et al

Asian

Clin Cancer Res 2004

         

Mut 43

Ex 19 35

Ex 21 48

Castro et al.

White

Rev Port Pneumol 2013

         

Mut 29/216 13%

Ex 19 39

Ex 21 33

Our study 2011-2018 n=200

F. Oudjida 2015

60 (34-83)

H 150

F 50

E 60

ADK 115/200

IV 65

Mut 10/50 20%

Ex 19 50%

63 cas ADK PCR.,37 contributifs

 8 cas sont EGFR mutés.

 6 cas ex 19 (21,6%)

 2 cas ex 21

 Tableau 2 : Nos résultats et données de la littératures

 

Conclusion : Nos résultats démontrent la difficulté de la prise en charge des CBNPC. Beaucoup d’efforts restent à faire en passant par la prévention, le diagnostic jusqu’à la prise en charge thérapeutique afin d’améliorer le pronostic et la survie des patients.

 

Liens d’intérêts : Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts.

 

 

 

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Immunothérapie dans les cancers bronchiques non à petites cellules(CBNPC) de stade avancé

Ces dernières décennies, de nombreuses recherches ont permis une meilleure compréhension des mécanismes du développement et de la progression du cancer. De ces connaissances, ont émergé de nouvelles cibles thérapeutiques.

 

A. Mégaïz, A. Bousahba, Service d’Oncologie Médicale du CHU Benaouda Benzerdjeb, Oran, Faculté de médecine, Oran 1

 

Date de soumission : 17 Janvier 2021

 

Résumé : Ces dernières décennies, de nombreuses recherches ont permis une meilleure compréhension des mécanismes du développement et de la progression du cancer. De ces connaissances, ont émergé de nouvelles cibles thérapeutiques. Des médicaments innovants notamment les thérapies ciblées (les anticorps monoclonaux, les inhibiteurs de tyrosine kinase et autres), et récemment les inhibiteurs de points de contrôle immunitaire (anti-CTLA-4 et surtout, anti-PD-1), ont alors été élaborés spécifiquement pour atteindre ces cibles thérapeutiques. L’immunothérapie antitumorale utilisant des inhibiteurs de points de contrôle immunologique est devenue incontournable dans l’arsenal thérapeutique des patients atteints d’un cancer bronchique de stade avancé. Ces médicaments sont prescrits à un nombre plus grand de malades dans des indications de plus en plus nombreuses.

Mots-clés : cancer, immunothérapie, inhibiteurs des points de contrôle,

Abstract: In recent decades, much research has led to a better understanding of the mechanisms of cancer development and progression. From this knowledge, new therapeutic targets have emerged. Innovative drugs, in particular targeted therapies (monoclonal antibodies, tyrosine kinase inhibitors and others), and recently inhibitors of immune checkpoints (anti-CTLA-4 and especially, anti-PD-1), have then been developed specifically to reach these therapeutic targets. Antitumor immunotherapy using immunological checkpoint inhibitors has become essential in the therapeutic arsenal of patients with advanced bronchial cancer. These drugs are prescribed to a greater number of patients in more and more indications.

Keywords: cancer, immunotherapy, checkpoint inhibitors.


 

Introduction 

Au diagnostic, plus de 60% des patients porteurs d’un CBP présentent déjà une maladie avancée pour laquelle la prise en charge thérapeutique oncologique n’aura pour but qu’une amélioration des symptômes et de la survie sans possibilité toutefois de guérison.

Ces dernières années, le traitement du cancer bronchique a beaucoup évolué avec le développement de plusieurs options thérapeutiques. En première ligne métastatique, il reposait essentiellement sur l’association d’un sel de platine avec un cytotoxique de troisième génération en fonction du sous type histologique1. Une meilleure connaissance des différentes voies de signalisation a permis de mettre en route certaines molécules qui ont permis d’améliorer les taux de réponse et d’augmenter la survie des patients.

Dans les stades localement avancés pour lesquels un traitement multimodal n’est pas recommandé (radiothérapie associée à une chimiothérapie) et les stades métastatiques, le choix thérapeutique en première ligne dépend de plusieurs paramètres : l’âge, l’état général du patient (PS), la présence de comorbidités, le sous type histologique, la présence d’altération moléculaire ciblable (EGFR, ALK, ROS1, BRAF) et plus récemment du statut PDL1.

Des progrès thérapeutiques, dans les formes localement avancées ou métastatiques, comme l’immunothérapie, ont apporté un bénéfice en survie.

Immunothérapie dans le CBNPC 

La stratégie thérapeutique en cancérologie a été récemment bouleversée par l’avènement de l’immunothérapie apportant un nouvel espoir thérapeutique pour le cancer bronchique dont le pronostic reste sombre. Son mode d’action est totalement différent de la chimiothérapie et de la thérapie ciblée.

  • Stratégie de l’immunothérapie 

L’environnement immunitaire joue un rôle important dans l’évolution tumorale. Trois phases se succèdent dans le processus d’immunité anti-tumorale : une phase d’élimination, un état d’équilibre, puis une phase d’échappement. La réponse immunitaire anti-tumorale implique un cycle d’évènements immunologiques complexes, et les lymphocytes T jouent un rôle majeur. Les cellules T cytotoxiques lysent les cellules tumorales en collaboration avec des lymphocytes T aux fonctions auxiliaires ².

Le rôle de l’immunothérapie (IT) spécifique est de rétablir une réponse immunitaire antitumorale adaptée. Ainsi, des éléments clés des mécanismes d’inhibition des lymphocytes T, appelés « points de contrôle immunitaire », peuvent être bloqués par des traitements, appelés « inhibiteurs de points de contrôle immunitaire ». Le blocage de ces freins réactive alors le système immunitaire et lui permet ainsi de lutter plus efficacement contre les cellules tumorales (Fig. 1).

Les points de contrôle du système immunitaire sont des récepteurs qui interviennent dans la modulation de l’activation des cellules immunitaires afin de limiter la durée et l’intensité de la réaction immune. Il existe à la surface d’une même cellule des récepteurs co-activateurs qui renforcent l’activation et des récepteurs co-inhibiteurs qui diminuent l’activation. L’équilibre complexe entre les signaux activateurs et les signaux inhibiteurs détermine si une cellule immunitaire peut s’activer.

Les anti-checkpoints permettent de renverser l’immunosuppression induite par la tumeur.

 

Actuellement, les plus utilisés en oncologie thoracique ciblent des récepteurs inhibiteurs (tableau 1) :

  • le CTLA4 (Cytotoxic T Lymphocyte-Associated antigen 4),
  • le PD1 (Programmed cell Death protein 1) et son ligand PD-L1

Tableau I. Les différents inhibiteurs de checkpoints indiqués dans le CBP

Cible

Anticorps

PD-1

Nivolumab

Pembrozlumab

PD-L1

Atézolizumab

Durvalumab

CTLA-4

Ipilumumab

  • Les biomarqueurs associés aux inhibiteurs de points de contrôle 

La mise en évidence de biomarqueurs prédisant l’efficacité ou la toxicité des inhibiteurs de points de contrôle est un enjeu de recherche fondamental. L’expression de PD-L1 par les cellules tumorales et du microenvironnement évaluée par immunohistochimie est prédictive de réponse pour certains cancers. Les lymphocytes circulants pourraient représenter un biomarqueur prédictif notamment via la mesure du ratio polynucléaire neutrophile sur lymphocytes (NLR)14. D’autres biomarqueurs sont en cours d’études mais non encore validés tels que le microbiote, la charge mutationnelle, les néo antigènes tumoraux et certains cytokines15(Figure 1).

 

  • Place de l’immunothérapie 
  • En première ligne 

L’ajout de l’IT à une chimiothérapie (doublet de sels de platine) en première ligne de traitement a permis de prolonger la SSP et la SG comparativement à la chimiothérapie seule. Suite aux résultats positifs de l’étude Keynote-89, Le pembrolizumab en association avec la combinaison pémétrexed et sels de platine est indiqué en 1ère ligne chez les patients atteints d’un CBNPC non épidermoïde, sans altération de l’EGFR ou d’ALK, quel que soit le niveau de PDL1. L’étude Keynote 0423 a démontré la supériorité de pembrozilumab en monothérapie par rapport à un doublet de sels de platine pour un taux d’expression de PD-L1≥ 50%. Dans cette étude, le taux de SG à 12 mois était significativement améliorée (70 vs 54%), de même pour le taux de réponse (44 vs 27%).

L’association atézolizumab plus carboplatine, paclitaxel et bévacizumab comparée dans l’essai IMPOWER 150 4 au schéma standard (paclitaxel-carboplatine-bévacizumab) a permis d’améliorer de façon significative la SG des patients atteints de CBNPC non-squameux.       

  • En consolidation 

L’étude de phase III PACIFIC5, une étude randomisée, multicentrique, a posé la question de la place d’une immunothérapie par durvalumab (anti-PDL1) en traitement de “consolidation” après une radio-chimiothérapie concomitante chez des patients porteurs d’un CBNPC de stade III non évolutif. Cette étude a montré une amélioration de la SSP (16,8 vs 5,6 mois), du taux de survie à un an (83,1 vs 75,3 mois) et du taux de réponse par rapport au placebo 5.

 

  • En deuxième ligne et troisième ligne 

Au cours du traitement de première intention, 30% des patients atteint d’un CBNPC peuvent progresser et nécessitent un traitement ultérieur6.Ce dernier dépend essentiel du PS du patient, du traitement de première ligne et du type de progression.

De nombreuses études de phase II et III ont démontré l’efficacité de l’IT dans le CBNPC en traitement de deuxième et de troisième ligne avec une amélioration de la SG, du taux de réponse et de la durée de réponse7. Le suivi des patients sous nivolumab a montré une réponse tardive également plus prolongée par rapport à la chimiothérapie8. Une hyper-expression de PD-L1 était corrélée à une meilleure réponse pour le pembrozilumab (Tableau II).

Tableau II. Principales études comparant l’immunothérapie vs chimiothérapie en 2ème ligne

 

Checkmat 57 7

CBNPC non squameux IIIB/IV

Keynote 010 9

CBNPC IIIB/IV

Poplar10

CBNPC IIIB/IV

Oak11

CBNPC IIIB/IV

Traitement

Nivolumab 3 mg/kg/2 S

(n = 292)

vs

Docétaxel (n = 290)

Pembrolizumab 2 mg/kg

(n = 344) vs pembrolizumab

10 mg/kg (n = 346)

vs docétaxel (n = 343)

Atézolizumab

(n = 142) vs

Docétaxel (n = 135)

Atézolizumab

 (n = 425) vs docétaxel (n = 425)

SG (mois)

12,2 vs 9,4

HR = 0,73

10,4

vs 2,7 (HR = 0,71)

vs 8,5 (HR = 0,61)

12,6 vs 9,7

HR = 0,69

13,8 vs 9,6

HR = 0,73

SSP (mois)

2,3 vs 4,2

HR = 0,92

5

vs 5,2 (HR = 0,59)

vs 4,1 (HR = 0,59)

2,7 vs 3

HR = 0,94

2,8 vs 4

HR = 0,95

SG : survie globale ; SSP : survie sans progression ; HR :hazard-ratio

Dans l’étude Keynote 010, le taux de survie des patients à 3 ans était meilleur dans le bras pembrozilumab (23%) vs docétaxel (11%).

Devant une progression à un traitement de première ligne, il est recommandé une rebiopsie du tissu tumoral ou une biopsie liquide afin de rechercher les altérations moléculaires, les résistances mutationnelles ou une trans-différenciation en carcinome à petites cellules (CPC).

  • Patients traités préalablement par immunothérapie : après échec à une immunothérapie en première ligne, il n’est pas recommandé d’indiquer une nouvelle immunothérapie12. Une chimiothérapie à base de sels de platine sera proposée si le PS le permet.
  • Patients n’ayant pas reçu d’immunothérapie en première ligne : une immunothérapie peut être proposée en deuxième ligne chez les patients n’ayant pas reçu ce traitement en première intention et en absence d’addiction oncogénique.
  • L’atézolizumab et le nivolumab ont démontré leur efficacité par rapport au docétaxel, pour tout niveau de PDL111, 13.
  • Le pembrolizumab a démontré aussi une supériorité par rapport au docétaxel pour les patients dont la tumeur exprimait le PDL1 à plus de 1% 9.

Conclusion 

L’immunothérapie est une approche thérapeutique qui agit sur le système immunitaire d’un patient pour lutter contre sa maladie. Elle ne s’attaque pas directement à la tumeur, mais stimule les cellules immunitaires impliquées dans sa reconnaissance et sa destruction.

Actuellement, il est bien établi que l’immunothérapie est un facteur clé dans la prise en charge du cancer. Son efficacité dans le cancer bronchique a été clairement démontrée dans plusieurs études. L’immunothérapie prend donc place dans notre pratique quotidienne dans la prise en charge du cancer bronchique en première, deuxième et troisième ligne et même en maintenance.

 

Liens d’intérêts : Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts.

 

Références :

 

  • NSCLC Meta-Analyses Collaborative Group : Chemotherapy in addition to supportive care improves survival in advanced non-small cell lung cancer: a systematic review and meta-analysis of individual patient data from 16 randomized controlled trials. J Clin Oncol 2008; 26: 4617-25.
  • Molina, « Immunité innée et adaptative en pathologie tumorale », Ann. Pathol., vol. 24, p. 35‑36, nov. 2004.
  • Lopes G, et al. Pembrolizumab (pembro) versus platinium-based chemotherapy (chemo) as first-line therapy for advanced/metastatic NSCLC with a PD-L1 tumor proportion score (TPS) ≥ 1% :Open-label, phase 3 KEYNOTE-042 study.
  • Reck M, et al. Atezolizumab plus bevacizumab and chemotherapy in non-small-cell lung cancer (IMPOWER 150) : key subgroup analyses of patients with EGFR mutations or baseline liver metastases in a randomised, open-label phase 3 trial. Lancet 2019 ; 7 (5) : 387-401
  • Antonia S.J, et al. Durvalumab after Chemoradiotherapy in Stage III Non–Small-Cell Lung Cancer. N Engl J Med 2017;377:1919-29.
  • Weiss JM, Stinchcombe TE. Second-Line Therapy for Advanced NSCLC. Oncologist 2013 ;18(8):947-953.
  • Gralla RJ, Spigel D, Bennett B, et al.PD1.01 (also presented as P2.46): LCSS as a marker of treatment benefit with nivolumab vs docetaxel in pts with advanced non-squamous NSCLC from Checkmate 057 (abstract). J ThoracOncol2016;11:S171.
  • Horn L, Spigel DR, Vokes EE, et al. Nivolumab versus docetaxel in previously treated patients with advanced non small-cell lung cancer: two-year outcomes from two randomized, open-label, phase III trials (CheckMate 017 and CheckMate 057). J Clin Oncol2017;35:3924-33.
  • Herbst RS, Baas P, Kim DW, et al. Pembrolizumab versus docetaxel for previously treated, PD-L1-positive,advanced non-small-cell lung cancer (KEYNOTE-010): a randomised controlled trial. Lancet 2016;387:1540‑
  • Fehrenbacher L, Spira A, Ballinger M, et al. Atezolizumab versus docetaxel for patients with previously treated non-small-cell lung cancer (POPLAR): a multicentre, open-label, phase 2 randomised controlled trial. Lancet 2016;387:1837-46.
  • Rittmeyer A, Barlesi F, Waterkamp D, et al. Atezolizumab versus docetaxel in patients with previously treated non-small-cell lung cancer (OAK): a phase 3, open-label, multicentre randomised controlled trial. Lancet 2017;389:255‑
  • Couraud S, Westeel V, Toffart A-C, Souquet P-J. et le comité de rédaction des référentiels Auvergne Rhône-Alpes en oncologie thoracique. Référentiel sur le cancer bronchique non à petites-cellules : actualisation 2019. ARISTOT.2019. ISBN 978-2-490858-00-2. undefined Pages/ referentiels. aspx et sur www.lecancer.fr.
  • Borghaei H, Paz-Ares L, Horn L, Spigel DR, Steins M, Ready NE, et al. Nivolumab versus Docetaxel in Advanced Non-squamous Non-Small-Cell Lung Cancer. N Engl J Med. 22 oct 2015;373(17):1627‑
  • Moschetta M, Kasenda B, Mak G, Voskoboynik M, Martynyuk N, Formica V, et al. Early neutrophil to lymphocyte ratio dynamics to predict progression free survival in patients treated with immune-checkpoint inhibitors [abstract]. J Clin Oncol2016;34.
  • Gupta V, Davancaze T, Good J, Kalia N, Anderson M and al., Bioanalytical qualification of clinical biomarker assays in plasma using a novel multi-analyte Simple Plex™ platform, Bioanalysis2016; 8(23):2415-2428.
  • Alexandra Frelau, Marc Pracht, Samuel Le Sourd, Alexandra Lespagnol, Romain Corre, et al.. Biomarqueurs prédictifs de réponse aux inhibiteurs de points de contrôle immuns. Bulletin du Cancer, John Libbey Eurotext, 2018, ⟨1016/j.bulcan.2017.10.031⟩. ⟨hal-01815717⟩

 Figure 1. Biomarqueurs prédictifs de réponse aux inhibiteurs de checkpoint (points de contrôle) immuns lors de la réaction immunitaire antitumorale

 

 

 

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Thérapie ciblée dans le cancer bronchique non à petites cellules avec addiction oncogéniques

La découverte d’anomalies moléculaires des cellules tumorales des cancers pulmonaires non à petites cellules (CBNPC) jouant un rôle d’addiction oncogénique a modifié considérablement la prise en charge de ces tumeurs.

 

E. Kerboua, S. Lanasri, S. Ouldhadj, K. Bouzid, Unité Homme, Service d’Oncologie Médicale, Centre Pierre et Marie Curie, Alger

 Date de soumission : 27 Janvier 2021

Résumé : La découverte d’anomalies moléculaires des cellules tumorales des cancers pulmonaires non à petites cellules (CBNPC) jouant un rôle d’addiction oncogénique a modifié considérablement la prise en charge de ces tumeurs. Un nombre non négligeable de patients sont porteurs de ces anomalies. Les cibles principales sont epidermal growth factor (EGFR), anaplastic lymphoma kinase (ALK) pour lesquels le traitement de référence est maintenant en première ligne, une thérapeutique ciblée. D’autres anomalies moléculaires sont identifiées, certaines ont accès à des traitements spécifiques (ROS1, BRAF) en pratique courante et d’autres prochainement (Kras, HER2, MET). Les progrès sont très rapides, et de nouvelles molécules ciblant les mécanismes de résistance au traitement de première ligne sont en cours de développement (EGFR, ALK). L’arsenal thérapeutique s’enrichit, et de nouvelles stratégies de traitement sont en cours de développement (association thérapeutique, séquences thérapeutiques, etc.).

Mots clés : CBNPC, addictions oncogéniques, thérapie ciblée.

Abstract: Significant advances have been made in recent years on knowledge of oncogenesis of Non-Small Cell Lung Cancer (NSCLC) particularly in the discovery of specific oncogenic drivers playing major role in oncogenic addiction responsible for the occurrence of NSCLC. The main targets are Epithelium Growth Factor Receptor (EGFR) mutation, ALK (Anaplastic Lymphoma Kinase) rearrangement for which the standard treatment in first line is a specific inhibitor. Other molecular abnormalities like ROS1, BRAF, have access to specific treatments in clinical practice and others (KRAS, HER2, MET) very soon. The mechanisms of resistance to first generation treatment in particular for EGFR TKI begins to be well known and specific treatments are under development. The therapeutic possibilities are growing and the best treatment scheme has not been defined. (Drug, sequence, treatment combination, etc.

Key words: NSCLC, oncogenic drivers, target therapy

 

Introduction

Les dix dernières années ont vu l’émergence de l’histologie (cancers épidermoïdes versus non épidermoïdes) comme un facteur déterminant dans la prise en charge thérapeutique du cancer du poumon, mais surtout, il existe une proportion importante de tumeurs porteuses d’anomalies moléculaires accessibles à un ciblage thérapeutique (mutations, gène de fusion). Actuellement, la majorité de ces cibles visées par le traitement personnalisé appartient à la catégorie des adénocarcinomes pulmonaires. Nous allons aborder les plus avancés sur le plan thérapeutique.

Fig. D.S. Hong, et al., ESMO® 2020, Abs # LBA12570

  • Inhibiteurs de l’EGFR

a. L’EGFR fait partie de la famille la plus connue de récepteurs membranaires à activité tyrosine kinase (TK). Les inhibiteurs de TK (TKI) Erlotinib, Géfitinib, basés sur la présence des mutations activatrices de l’EGFR, ont été les chefs de file de la thérapie ciblée du cancer du poumon dès le début des années 2000 (1,2).

Ainsi 10 à 15% des patients caucasiens et plus de 40% des patients asiatiques atteints d’adénocarcinome pulmonaire ont une tumeur avec mutation activatrice du récepteur à l’EGF, qui les rend particulièrement sensibles à l’action des TKI de l’EGFR, d’abord en deuxième ligne après chimiothérapie, puis en première ligne grâce à des essais randomisés (2,3). L’étude IPASS (4) a permis de démontrer l’efficacité du Gefitinib sur la SSP avec un Hazard Ratio de 0,48 ; une médiane de SSP de 9,5 mois dans le bras Gefitinib versus 6,3 mois dans le bras carboplatine/paclitaxel, le taux de réponse objective a été de 71,2% dans le bras Gefetinib versus 47,3% dans le bras doublet platine p<0,001, la médiane de survie globale.

D’autres molécules sont venues enrichir le panel thérapeutique, en 2012, dans l’étude LUX-LUNG3, 345 patients avec mutation EGFR ont été randomisés en première ligne pour recevoir soit un TKI de deuxième génération, l’afatinib, soit la chimiothérapie de référence le doublet Pémétrexed-Cisplatyl, cet essai a confirmé un doublement de la survie sans progression (SSP) sous TKI par rapport à ceux sous chimiothérapie, correspondant à une réduction du risque de progression de 42% avec une médiane de 11 versus 7 mois dans le bras chimiothérapie. Ces résultats ont abouti à l’AMM en premier ligne.

L’essai FLAURA, comparant l’osimertinib (TKI de 3ème génération) à un traitement par TKI de 1ère génération (Erlotinib ou Gefitinib) en 1ère ligne chez les patients présentant une délétion 19 ou une mutation L858R dans l’exon 21, a montré une amélioration significative de la survie sans progression (18,9 mois vs 10,2 mois ; HR=0,46 [0,37-0,57] ; p<0.001) et de la survie globale (38,6 mois vs 31,8 mois ; HR=0,799 (0,641-0,957) ; p=0,0462) (5,6) en faveur du bras osimertinib. Le profil de tolérance (tous grades confondus et grades 3/4) est en faveur de l’osimertinib. On notera également la remarquable réponse à l’osimertinib à l’étage cérébral par comparaison au bras contrôle (7) l’osimertinib a ainsi obtenu l’AMM en première ligne.

La tolérance de ces molécules s ‘est révélée sans commune mesure avec celle de la chimiothérapie, et ces patients porteurs de mutations EGFR peuvent recevoir ces TKI pendant plusieurs années, malgré une toxicité cutanée à type de rash ou de dermite séborrhéique pouvant, sur le long terme contraignante nécessitant des traitements préventifs, par topiques locaux corticoïdes et antibiotiques, voire par des cyclines orales et pouvant justifier des réductions posologiques sans risque majeur de progression. La diarrhée doit aussi être prévenue, notamment chez les sujets âgés.

De même, plusieurs molécules avec une efficacité sur les mutations (non T790M) de l’exon 20 sont en cours de développement et il est conseillé de rechercher une inclusion dans un essai clinique. Enfin, des données récentes incitent à envisager une chimiothérapie plutôt qu’un TKI en cas de mutations rares (hors T790M et insertions de l’exon 20) puisque la survie globale s’établit à 27,7 mois vs 16,9 mois sous TKI. Cependant, en cas de mutation L858R associée (28% des cas), il est préférable d’envisager un TKI (survie globale à 30,8 mois.

En l’absence de mutation activatrice de l’EGFR, ou si le statut mutationnel de la tumeur n’est pas disponible ou incertain, il n’y a pas d’indication à un traitement par ITK.

b. Recherche du mécanisme de résistance : En cas de progression, un prélèvement (sang/tissus) doit être fait. Une recherche de la mutation T790M sur ADN tumoral circulant peut être réalisée. Sa détection permet de proposer un traitement de seconde ligne par osimertinib 80mg/j (si non utilisé en 1ère ligne) et qui constitue le standard thérapeutique dans cette indication (8,9).

En l’absence de détection de mutation T790M dans l’ADN circulant, il est recommandé de re-biopsier (tissu) le patient à la recherche du mécanisme de résistance (trans-différenciation en cancer à petites cellules, autre altération moléculaire, ou mutation T790M). En cas de mutation T790M, l’Osimertinib est la molécule de choix, si bien sûr elle n’a pas été utilisée en première intention (10). En cas d’identification d’un autre mécanisme moléculaire de résistance, il est recommandé de proposer un essai clinique, le cas échéant adapté au mécanisme de progression identifié.

En deuxième ligne chez un patient traité initialement par TKI, sans mutation T790M, une chimiothérapie à base de sels de platine, en l’absence de contre-indication, doit être utilisée et obéit aux mêmes règles (évaluation de l’éligibilité au bevacizumab et à un traitement de maintenance) qu’une première ligne chez les patients non mutés. L’osimertinib n’a pas d’indication en deuxième ligne et ultérieures, en l’absence de documentation de mutation T790M. Afin d’éviter tout risque d’effet « rebond » à l’arrêt du TKI, il est recommandé de stopper le TKI 1 à 7 jours avant l’administration de la première cure de chimiothérapie. Il est également recommandé d’envisager l’inclusion du patient dans des essais cliniques dédiés.

 

  • Tumeurs avec réarrangement ALK

a. Le dénombrement moléculaire des CBNPC notamment par séquençage génomique de nouvelle génération (NGS), a permis l’existence de réarrangements chromosomiques multiples, générant des gènes de fusion qui codent pour des oncoprotéines responsables de phénomènes d’addiction oncogéniques se comportant comme des drivers oncogéniques. Ces oncoprotéines contiennent toutes le domaine tyrosine kinase d’un récepteur à tyrosine kinase RTK, fusionné en N-Terminale au domaine coiled-coil (super enroulé) d’un autre gène, domaine permettant l’homodimérisation de ces oncoprotéines localisées dans le cytoplasme, cette homodimérisation étant responsable d’une modification conformationnelle du domaine kinase, qui est alors constitutivement activé, c’est ainsi que les réarrangements d’EMLA-ALK par inversion d’un fragment chromosomique 2p ont été décrits dans les adénocarcinomes, ces réarrangements mettent bout à bout les séquences d’ADN codant pour le domaine coiled-coil d’un gène du développement embryonnaire EML4 et le domaine catalytique du RTKALK1 chez 5% des patients. Le premier inhibiteur de la tyrosine kinase ALK, le crizotinib a connu un développement clinique rapide puisque la publication princeps du réarrangement ALK remonte à 2007 (11) ; et que le premier essai de phase 1 testant le crizotinib a été publié dans le New England Journal of Medicine en 2010 (12), permettant du fait de l’ampleur du bénéfice obtenu, son enregistrement aux États-Unis, ce qui constitue un cas unique depuis l’enregistrement de l’imatinib dans la LMC.

Dans cet essai sur 1.500 patients, 82 présentent un réarrangement d’ALK et ont reçu en deuxième ou troisième ligne de traitement du crizotinib avec des réponses majeures spectaculaires avec un taux de réponses objectives de 57% et une SSP à 6 mois de 72% ; un risque de progression diminué de 51% et une médiane de SSP non atteinte lors de la publication, 24 mois après le début de l’essai.

Cette étude a été confirmée par un essai de phase III, PROFILE 1007, qui a randomisé 318 patients avec un réarrangement ALK après une première ligne de chimiothérapie à base de platine, pour une chimiothérapie de deuxième ligne par pémétrexed ou docetaxel versus crizotinib. Le crizotinib a permis un allongement de SSP de 2,6 (docétaxel) et 4,7 (pémétrexed) à 7,7 mois (p<0,001) avec un taux de RO de 65,5% (versus respectivement 6,9 et 29,3%), permettant l’obtention de l’AMM en deuxième ligne. La toxicité s’est révélée très modeste, consistant à des troubles visuels transitoires de l’accommodation, et en de rares diarrhées, l’essai PROFILE a permis l’obtention de l’AMM en première ligne.

Le crizotinib (250 mg x 2/j) et le ceritinib (750 mg/j) avaient démontré leur supériorité comparés à la chimiothérapie en première ligne des CBNPC avec réarrangement de ALK (13,14). Bien que ces deux molécules disposent d’une AMM dans cette indication, une troisième molécule a démontré sa supériorité, il s’agit de l’alectinib (600 mg x 2/j), avec une efficacité supérieure au crizotinib (250 mg x 2/j) en première ligne en termes de taux de survie sans événement à 12 mois (68,4% vs 48,7%) (HR pour décès ou progression à 0,47 [IC95% 0,34-0,65)], P<0,001) (13). Récemment, des données de survie globale actualisée ont été rapportées avec un taux de survie à 4 ans de 64,5% (IC95% 55,6-73,4) dans le bras alectinib et 52,2% dans le bras crizotinib. Son efficacité est particulièrement notable dans le contrôle des métastases cérébrales connues, ou dans le délai d’apparition de métastases cérébrales (15-16). L’alectinib a une AMM dans cette indication. Il doit être considéré comme le standard thérapeutique en première ligne des CBNPC avancés avec réarrangement ALK. L’étude ALESIA au design identique mais chez des patients asiatiques a montré un bénéfice de survie globale (HR 028 (IC95% 0,12–0,68), P = 0,0027) bien que celle-ci soit encore immature (17).

L’étude ALTA-1L a comparé le brigatinib (90 mg x1/j pendant 7j puis 180 mg x1/j) au crizotinib (250 mg x2/j) (17). Les patients inclus devaient être naïfs de traitement par TKI anti-ALK mais pouvaient avoir reçu une chimiothérapie. Le HR pour la survie sans progression était de 0,49 (IC95% 0,33-0,74, P<0,001), pour une médiane de survie à 9,8 mois dans le bras crizotinib et non-atteinte dans le bras brigatinib. Le taux de survie sans progression à 1 an était de 67% (IC95% 56-75) dans le bras brigatinib contre 43% (IC95% 32-53) dans le bras crizotinib. La survie sans progression intracrânienne était supérieure dans le bras brigatinib (HR=0,27 [IC95% 0,13-0,54] (18).

b. Recherche du mécanisme de résistance : Il est conseillé de déterminer le mécanisme de résistance par la recherche des mutations de résistance par l’ADN tumoral circulant et/ou re-biopsie, la fréquence et le type de mutation de résistance sont variables en fonction du type du TKI anti-ALK préalablement utilisé. Ainsi les mutations de résistance ALK sont plus fréquentes avec le brigatinib (71%), le ceritinib (54%), l’alectinib (53%), tandis qu’elles restent peu fréquentes après crizotinib (20%). La mutation G1202R (sensible en données précliniques au crizotinib et à l’alectinib) est présente dans 43% des cas après brigatinib, 29% après alectinib et 21% des cas après ceritinib (19).

  • En cas de progression lente et peu symptomatique, il est possible de poursuivre le TKI, avec une réévaluation précoce.
  • En cas de première progression sous TKI, il est possible d’adapter le traitement au profil moléculaire de résistance si celui-ci est disponible.
  • En l’absence de données moléculaires, il est recommandé d’utiliser le Anti ALK qui n’a pas été utilisé auparavant

 

 

  • Tumeurs avec réarrangement ROS1

a. Un nouveau réarrangement a été décrit début 2012 (20) chez moins de 1% des patients atteints de CBNPC impliquant là encore le domaine kinase d’un RTK peu connu, ROS1, qui avait été décrit sous forme de fusion oncogénique dans certains glioblastomes, chez 20 patients évaluables de la publication princeps, le crizotinib s’est encore là avéré spectaculairement efficace avec plus de 50% de réponse et 70% de contrôle de la maladie après 8 semaines de traitement, c’est ainsi que le crizotinib a une AMM dès la première ligne en cas de réarrangement de ROS1 (21). Les données Françaises de l’étude ACSé confirment toutefois son efficacité (22).

Le lorlatinib a été évalué dans une étude de phase 1/2 chez 69 patients ROS1 dont 21 étaient naïfs de tout traitement par TKI (23). Le taux de réponse objective est de 62% chez les TKI-naïfs et 35% chez les antérieurement traités (taux de contrôle de la maladie de 91% et 75% respectivement). Le temps médian de réponse est de 25,3 mois et 13,8 mois respectivement.

  • Tumeur avec mutation de BRAF V600E

Chez les patients présentant une mutation BRAF V600E, l’association dabrafenib (ciblant BRAF, 150 mg x2/j) et trametinib (ciblant MEK, 2 mg x 1/j) a montré son efficacité (dans un essai non contrôlé) en première et en seconde ligne de traitement (24-25). Les résultats de la cohorte française ACSé ont également été rapportés à l’ESMO 2018 pour les mutations V600E. Il s’agissait de patients prétraités (≥1 ligne), parfois lourdement, non éligibles à des essais thérapeutiques (N=101) et traités par vemurafénib. Le taux de réponse était de 45% et la durée médiane de réponse de 6,4 mois. Le vémurafénib n’a pas d’AMM dans cette indication.

En deuxième ligne chez un patient traité initialement par TKI, une chimiothérapie à base de sels de platine est indiquée, et obéit aux mêmes règles qu’une première ligne chez les patients non mutés.

L’utilisation de l’immunothérapie chez ces patients, peut être considérée dans les mêmes conditions que chez les patients non mutés. Dans l’étude ImmunoTarget, les patients présentant une altération de BRAF présentent un taux de contrôle de 54% sous immunothérapie seule en monothérapie, semblant peu impacté par le statut PDL1. Il existe toutefois une différence numérique nette entre les BRAF non V600E (médiane de survie sans progression à 4,1 mois) et les V600E (médiane de survie sans progression à 1,8 mois) (26).

Dans une étude cas-contrôle française rétrospective, il semble que le pémétrexed soit le doublet permettant les meilleurs événements en survie chez les patients avec mutation de BRAF (27).

  • Tumeur avec Fusion de NTRK 

Une étude groupée de trois études de phase 1 et 2, totalisant 55 patients (adultes et enfants) avec une tumeur solide présentant une fusion de NTRK (Neurotrophic Tyrosine Receptor Kinase) traités par larotrectinib, a été publiée en 2018. Dans cette étude, 4 patients présentant un cancer du poumon ; 4 patients étaient PS 2, 1 patient présentait des métastases cérébrales, et 27 patients n’avaient reçu aucune ligne ou seulement une préalablement. Le taux de réponse objective était de 75% (taux de contrôle 88%). La médiane de survie sans progression n’était pas atteinte après un suivi médian de 9,9 mois (28). Suite à cette étude, le larotrectinib a obtenu une ATU de cohorte avec l’indication suivante « en monothérapie dans le traitement des patients adultes et pédiatriques à partir d’un mois, atteints de tumeurs solides localement avancées ou métastatiques présentant une fusion NTRK, réfractaires aux traitements standards ou en l’absence d’alternative thérapeutique appropriée ». Le traitement est à poursuivre jusqu’à progression de la maladie ou jusqu’à l’apparition d’une toxicité inacceptable. Une AMM a été obtenue en septembre 2019.

L’entrectinib a également été testé dans cette situation dans 2 études de phase 1 totalisant 54 patients (dont 10 atteints de cancers bronchiques) (29). Les résultats montrent un taux de réponse objective de 57% (70% pour les cancers bronchiques), grâce à ces données, la FDA a approuvé ce médicament aux États-Unis pour les cancers avec fusion NTRK.

 

 

  • Tumeur avec mutations dans l’exon 14 de MET

L’étude Française ACSé crizotinib a récemment été publiée (22). Au total, 28 patients ont été traités par crizotinib dans le cadre de l’essai. Le taux de réponse objective à deux cycles était de 10,7% et le meilleur taux de réponse était de 36%. La médiane de survie sans progression dans cette cohorte s’établissait à 2,4 mois. Suite à ces résultats, une ATU est demandée pour le crizotinib, pour les mutations de MET exon 14 uniquement.

Plus récemment, les résultats d’inhibiteurs spécifiques ont été rapportés. Ainsi, le tepotinib a été testé dans l’étude VISION auprès de 87 patients (48 avec une biopsie liquide et 51 avec une biopsie tissulaire). Le taux de réponse objective était de 50% (taux de contrôle 66,7%) dans la cohorte biopsie liquide et 45,1% (72,5%) dans la cohorte biopsie tissulaire. On notera que certains patients étaient traités en 1ère ligne avec une réponse objective de bonne qualité (58,8% et 44,4% respectivement). Enfin, le profil de tolérance était correct (19,5% de grades 3 et plus) (30).

 

  • Tumeur avec réarrangement de RET 

On estime que 1 à 2% des CBNPC présentent une fusion dans RET (31,32). Dans une méta-analyse récente, il semble que les caractéristiques cliniques des patients présentant ce type d’anomalie soient le sexe féminin et le jeune âge (<60 ans), sans impact évident du statut tabagique (33). Le pralsetinib (BLU-667) est un inhibiteur avec une haute affinité pour RET (34). A l’ASCO 2019, Gainor (35) a rapporté les premiers résultats de l’étude ARROW évaluant le Pralsetinib (400mg x 1/j) chez des patients avec un cancer broncho-pulmonaire présentant un réarrangement RET avant 1ère ligne par sel de platine (N=40) ; ou progressant après une première ligne de platine (N=80). Le taux de réponse objective de l’ensemble de la population était de 58% (Taux de contrôle à 96%) sur les 58 patients évaluables (60% et 100% respectivement chez les 35 patients préalablement traités par sels de platine et évaluables).

Le selpercatinib (LOXO-292) est également un inhibiteur de RET. Il a montré son intérêt dans l’étude LIBRETTO rapportée au WCLC 2019 (36), auprès de 105 patients avec un cancer bronchique, tous préalablement traités. Le taux de réponse objective était de 68% (Taux de contrôle à 94%) avec une médiane de survie sans progression de 18,4 mois.

 

Conclusion : Au total la prise en charge thérapeutique du cancer du poumon évolue de manière spectaculaire grâce au développement des plateformes de biologie moléculaire et aux traitements de plus en plus personnalisés et efficaces.

 

Liens d’intérêts : Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts.

 

Tableau : DIFFERENTS TKI DANS le CBNPC AVEC ADDICTIONS ONCO

TKI

POSOLOGIE

DOSAGES

ADAPTATION (/prise)

CIBLE (S)

AUTORISATION

Afatinib* GIOTRIF

(Boehringer Ingelheim)

40 mg x 1 /J

20 mg

30 mg

40 mg

50 mg

/ 10 à 20 mg

EGFR

AMM

Alectinib

ALECENSA

(Chugal / Roche)

600 mg x 2/J

150 mg

/ 150 mg

ALK

AMM

Brigatinib*

ALUNBRIG (Takeda)

90 mg x 1/J 7J

Puis 180 mg

x 1/J

30 mg

90 mg

180 mg

Voir notice

ALK

AMM

BLU-667

Pralsetinib*

(Blueprint)

400 mg x 1/J

100mg

 

RET

ATU

Nominative

Capmatinib*

(Novartis)

400 mg x 2/J

200 mg

/ 100 mg

MET

(Mt ex 14)

ATU

Nominative

Ceritinib* ZYKADIA (Novartis)

450 mg x 1/J

150 mg

/ 150 mg

ALK

AMM

Crizotinib

XALKORI (Pfizer)

250 mg x 2/J

200 mg

250 mg

A 200 mg x 2

Ou à 250 mg x 1

ALK

ROS1

AMM

Dabrafenib*

TAFINLAR (Novartis)

150 mg x 2/J

50 mg

75 mg

/ 50 mg

BRAF

AMM

Entrectinib

ROZLYTREK (Roche)

600 mg x 1/ J

100 mg

200 mg

/ 200 mg

ROS1

ALK

NTRK

 

Erlotinib*

TARCEVA (Roche)

150 mg x 1/J

25 mg

100 mg

150 mg

/ 50 mg

EGFR

AMM

Gefitinib* IRESSA

(Astra Zeneca) & génériques

250 mg x 1/J

250 mg

Aucune

EGFR

AMM

 

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Chimiothérapie des cancers bronchiques non à petites cellules (CBNPC).

Plus de 80 % des cancers du poumon sont diagnostiqués à un stade avancé ou disséminé allant du stade IIB au stade IV du fait d’une maladie longtemps asymptomatique et de l’absence de dépistage. En absence d’addiction oncogénique, le traitement standard de 1ère ligne des CBNPC associe un sel de platine et un cytotoxique de 3ème génération, avec une efficacité similaire des différents schémas thérapeutiques.

 

F. Hadjam, M. Oukkal, Oncologie Médicale CHU Issaad Hassani, Béni Messous, Alger.

 

Date de soumission : 21 Octobre 2020

Résumé : Plus de 80 % des cancers du poumon sont diagnostiqués à un stade avancé ou disséminé allant du stade IIB au stade IV du fait d’une maladie longtemps asymptomatique et de l’absence de dépistage. En absence d’addiction oncogénique, le traitement standard de 1ère ligne des CBNPC associe un sel de platine et un cytotoxique de 3ème génération, avec une efficacité similaire des différents schémas thérapeutiques. Les progrès ont été limités aux carcinomes non-épidermoïdes avec la stratégie de maintenance utilisant la poursuite du pémétrexed en monothérapie et l’adjonction du bevacizumab. La chimiothérapie de deuxième ligne du cancer bronchique non à petites cellules est un concept récent, puisque les premiers essais de phase III établissant son intérêt datent de 2000. Successivement, le docetaxel à la dose de 75 mg/m2 toutes les 3 semaines, puis le pémétrexed est comparé au docetaxel dans une étude de non infériorité à la dose de 500 mg/m2 également toutes les 3 semaines avec autant d’efficacité et significativement moins de toxicité que le docetaxel. La stratégie de maintenance consiste à poursuivre un traitement après réponse ou stabilisation de la maladie sous une première ligne de chimiothérapie, ce traitement est soit utilisé lors de l’induction “continuation”, soit distinct du traitement d’induction “substitution”. Elle est fondée sur : la courte durée du contrôle de la maladie après une première ligne de chimiothérapie, le pémétrexed améliore la survie des patients atteints de cancers non épidermoïdes, en maintenance de continuation ou de substitution. La décision d’adopter une stratégie de maintenance dépend de multiples facteurs, incluant les choix du patient.

Mots-Clés : Cancer bronchique non à petites cellules, chimiothérapie, maintenance.

 

Abstract: Over 80% of lung cancers are diagnosed at an advanced or disseminated stage ranging from stage IIB to stage IV due to a long asymptomatic disease and the absence of screening. First-line treatment of metastatic NSCLC without oncogenic addiction remains based on chemotherapy regimen combining a platinum salt and a third-generation cytotoxic drug, with similar results for the different available schedules. The improvement of chemotherapy results has been limited to non-squamous carcinoma, deriving from maintenance strategies mainly based on continuation of pemetrexed as a single agent and on addition of bevacizumab to chemotherapy. Second line chemotherapy for advanced non-small cell lung cancer is a recent concept as the first phase III studies demonstrating its efficacy were published in 2000. Docetaxel was the first agent explored and deemed efficient in this setting at the dose of 75 mg/m2 every 3 weeks. Then pemetrexed was compared to docetaxel in a non-inferiority randomized trial at the dose of 500 mg/m2 every 3 weeks and demonstrated similar efficacy with significantly less toxicity than docetaxel. Maintenance strategy consists of continuing treatment after response or stabilization disease under a first-line chemo­therapy. This treatment could be either with an agent already used during induction (“continuation maintenance”), or with the introduction of a different agent (“switch maintenance”). The rationale of maintenance therapy is based on the short duration of disease control after first-line chemotherapy, maintenance therapy with pemetrexed, both in continua­tion or switch maintenance, improves overall survival for patients with non-squamous cell carcinoma. The individual decision to give a maintenance treat­ment needs to take several parameters into consideration, including the patient’s wishes.

Keywords: Non-small cell lung cancer, chemotherapy, maintenance.

 


 

Introduction 

Le cancer bronchique représente un problème majeur de santé publique puisqu’il s’agit de la première cause de décès par cancer dans le monde. Le carcinome bronchique non à petites cellules (CBNPC) est le type histologique le plus fréquent, représentant près de 80 % de l’ensemble des cas. En absence de dépistage, plus de 50 % des patients sont diagnostiqués à un stade localement avancé ou métastatique (1). Le traitement du cancer du poumon dépend de plusieurs paramètres en particulier, le stade de la maladie, le type histologique et moléculaire et de l’état du patient (statut de performance, comorbidités et âge du patient). La classification TNM et son regroupement par stades repose sur la taille de la tumeur (T), l’atteinte ganglionnaire (N) et de la présence ou non de métastases (M). Le traitement des formes localisées (stades I, II et IIIA) repose sur la chirurgie plus ou moins chimiothérapie et radiothérapie. Le traitement des formes localement avancées (IIIB) et/ou métastatiques repose sur le traitement systémique.

L’avènement des drogues à base de sels de platine a ouvert une nouvelle ère dans le traitement médical des cancers bronchiques, ces drogues restent à la base de la plupart des protocoles de chimiothérapie actuels qui associent un sel de platine (cisplatine ou carboplatine) à une drogue de nouvelle génération (pémétrexed, gemcitabine, vinorelbine ou une taxane), on parle alors de doublets à base de platine.

Malgré les progrès de la biologie moléculaire avec l’individualisation d’altérations moléculaires (mutation activatrice de l’EGFR, réarrangement de ALK) impliquées dans la genèse des carcinomes bronchiques non à petites cellules (CBNPC) et utilisées comme cibles thérapeutiques, le traitement de la majorité des patients repose sur une stratégie fondée sur plusieurs lignes de chimiothérapie cytotoxique ; et la survie après un traitement à base de sels platines (cisplatine ou carboplatine) est de 8 à 10 mois.

Chimiothérapie de première ligne 

La chimiothérapie associée à une combinaison de platines et d’un autre agent cytotoxique (paclitaxel, docetaxel, vinorelbine, gemcitabine ou pémétrexed) pendant quatre à six cycles reste le traitement standard pour les patients ayant un bon statut de performance (ECOG 0 ou 1) et absence d’addiction oncogénique (récepteur EGFR inconnu ou non muté). Il est établi qu’une chimiothérapie associée à une combinaison de deux agents de chimiothérapie (un doublet) est supérieure à une monothérapie (2).

L’étude de Schiller et collaborateurs (3) a comparé quatre de ces combinaisons de chimiothérapie pour le traitement de première intention d’un CBNPC localement avancé ou métastatique. La survie médiane obtenue était de 7,8 mois avec la cisplatine et le paclitaxel ; de 8,1 mois avec la cisplatine et le gemcitabine ; de 7,4 mois avec la cisplatine et le docetaxel et de 8,1 mois avec la carboplatine et le paclitaxel. L’efficacité des quatre protocoles et la tolérance des patients étaient donc semblables. Dans cette étude, les patients ayant un statut de performance de 0 à 1 avaient une meilleure survie médiane (respectivement de 10,8 mois et de 7,1 mois) comparativement aux patients ayant un statut de performance de 2 (3,9 mois) lors d’un traitement de chimiothérapie.

L’étude de Scagliotti et collaborateurs (4) a également conclu à une efficacité semblable entre une chimiothérapie à base de cisplatine et de vinorelbine, de cisplatine et de gemcitabine et de paclitaxel/carboplatine. L’avènement du pémétrexed a ajouté une autre réflexion. En fait, l’histologie a pris une place importante après la publication de l’étude de Scagliotti et collaborateurs (5) comparant l’association pémétrexed/cisplatine à l’association gemcitabine/cisplatine dans le traitement de première ligne des CBNPC localement avancés et/ou métastatiques. La survie médiane des patients ayant un adénocarcinome était meilleure avec la combinaison de cisplatine et de pémétrexed (12,6 mois comparativement à 10,9 mois avec la gemcitabine combiné à la cisplatine, p=0,03), et elle était meilleure aussi pour les patients ayant un carcinome à cellules larges (10,4 mois versus 6,7 mois avec la cisplatine combiné à la gemcitabine, (p=0,03).

L’association de la gemcitabine avec la cisplatine était cependant supérieure pour les patients avec une histologie épidermoïde, qui obtenaient une survie médiane de 10,8 mois comparativement à 9,4 mois avec la combinaison de pémétrexed et de cisplatine (p=0,05). Comme le statut de performance est un facteur prédictif de la survie après une chimiothérapie, une question se posait sur l’utilisation de la chimiothérapie pour les patients dont l’état général était moins favorable, soit les patients avec un statut de performance de 2, qui tolèrent moins la chimiothérapie, l’avantage sur la survie d’une combinaison avec une platine restait à démontrer.

L’étude de Zukin et collaborateurs (6) a évalué l’utilisation du pémétrexed seul en le comparant à l’association de carboplatine et de pémétrexed en première intention pour le traitement d’un CBNPC localement avancé ou métastatique chez 217 patients ayant un statut de performance de 2. La survie médiane était de 5,3 mois avec le pémétrexed seul et de 9,3 mois avec l’association pémétrexed et carboplatine (p=0,001), le taux de réponse était de 10,5 % avec le pémétrexed seul versus 24 % avec la combinaison (p=0,032). La toxicité hématologique était plus importante avec la combinaison, sans différence entre les deux groupes quant à l’incidence de thrombocytopénie et de neutropénie fébrile. Quatre décès secondaires à l’association de chimiothérapie (par insuffisance rénale, septicémie, pneumonie et thrombocytopénie) ont été rapportés dans cette étude.

Traitement de maintenance 

Le traitement d’entretien se définit comme la poursuite de la chimiothérapie immédiatement après quatre à six cycles d’une chimiothérapie de première ligne lors de l’obtention d’une réponse partielle ou d’une stabilisation de la maladie. Il s’administre jusqu’à la progression de la maladie. La poursuite du traitement peut se faire avec le même agent de chimiothérapie utilisé en première ligne (continuation) ou un agent différent (switch maintenance). Les médicaments évalués en continuation sont le pémétrexed, la gemcitabine, le paclitaxel et le bevacizumab et ceux évalués en switch maintenance sont le docetaxel, le pémétrexed et l’erlotinib.

Les essais de continuation maintenance 

L’étude de Sandler et collaborateurs (7), telle qu’elle a été décrite précédemment a démontré une survie prolongée de deux mois avec le bevacizumab en induction et en continuation, mais le groupe comparateur comportait la chimiothérapie seule en induction et le placebo en continuation. L’étude n’a donc pas évalué le seul effet d’entretien du bevacizumab.

L’étude Paramount de Paz-Ares et collaborateurs (8) a évalué quant à elle l’effet du pémétrexed comparé au placebo en continuation après une chimiothérapie à base de cisplatine et de pémétrexed sur quatre cycles auprès de patients atteints d’un CBNPC non épidermoïde, en raison de l’efficacité du pémétrexed en présence de ce type histologique. La survie médiane obtenue était de 13,9 mois avec le pémétrexed versus 11 mois dans le groupe placebo (p = 0,019).

 

Les essais de Switch maintenance 

Pour ce qui est de l’entretien avec un agent modifié, l’étude de Cielineau (9) a montré que la survie était statistiquement meilleure avec le pémétrexed en entretien avec une survie médiane de 13,4 mois comparativement à 10,6 mois avec le placebo, (p=0,012). Le pémétrexed était administré après une induction avec une chimiothérapie combinant une platine et un autre agent cytotoxique approuvé en première ligne à l’exception du pémétrexed dans l’étude d’entretien portant précisément sur cette molécule.

Dans l’étude de Shepherd (10), le docetaxel en entretien a amélioré la survie sans progression de la maladie (5,7 mois versus 2,7 mois, p<0,001), sans avantage statistiquement significatif sur la survie globale, car contrairement aux deux autres médicaments, l’objectif de l’étude consistait à évaluer l’efficacité du docetaxel en entretien ou en deuxième ligne, le groupe comparateur était donc le docetaxel en deuxième ligne. Cette stratégie prolonge significativement la SSP et la survie globale au prix d’une toxicité additionnelle acceptable, sans détérioration de la qualité de vie des patients.


 

Chimiothérapie de deuxième ligne 

Le docetaxel a été le premier médicament approuvé en deuxième ligne pour le traitement du cancer du poumon lors d’une progression faisant suite à un traitement de chimiothérapie à base de platine.

Deux études de phase III, ont mené à l’approbation du docetaxel en 2ème ligne de traitement des CBNPC.

La première étude, TAX 317 (11), a comparé deux doses de docetaxel, soit 75 mg/m2 et 100 mg/m2 intraveineux toutes les trois semaines, au placebo en deuxième ligne. Seule une dose de docetaxel de 75 mg/m2 a démontré un avantage sur la survie médiane, soit 7,5 mois comparativement à 4,6 mois avec le placebo (p=0,01). La toxicité hématologique était néanmoins plus importante avec la dose de 100 mg/m2, car 85,7 % des patients de ce groupe ont développé une neutropénie de grade 3 ou 4, tel qu’évaluée par l’échelle de toxicité du National Cancer Institute, et 22,4 % une neutropénie fébrile comparativement à respectivement 67,3 % et 1,8 % des patients ayant reçu une dose de 75 mg/m2.

La 2ème étude, la TAX 320 (12), a comparé en deuxième ligne de traitement le docetaxel à la dose de 75 mg/m2 ou 100 mg/m2 avec la vinorelbine ou l’ifosfamide au choix de l’investigateur et le résultat a confirmé les données obtenues par l’étude TAX 317, c’est -à- dire une survie à un an significativement améliorée avec le docetaxel à 75 mg/m2 (32 % versus 19 %, p = 0,025). Ainsi, le docetaxel s’administre à une dose intraveineuse de 75 mg/m2, toutes les trois semaines jusqu’à progression de la maladie. Le pémétrexed à 500 mg/m2 intraveineux toutes les trois semaines a également été comparé au docetaxel dans l’étude de Hanna et collaborateurs (13) et a démontré une non-infériorité. La survie globale était de 8,3 mois dans le groupe pémétrexed comparativement à 7,9 mois dans le groupe docetaxel (p=0,226). L’incidence d’effets secondaires était moindre dans le groupe pémétrexed comparativement au groupe docetaxel en ce qui concerne : la neutropénie de grade 3 ou 4 (40,2 % vs 5,3 %; p<0,001), la neutropénie fébrile (12,7 % vs 1,9 %; p<0,001),la neutropénie avec infections (3,3 % vs 0 %; p=0,004), l’hospitalisation pour neutropénie fébrile (13,4 % vs 1,5 %; p<0,001) et l’hospitalisation pour autres effets (10,5 % vs 6,4 %; p=0,092).

 

Effets secondaires de la chimiothérapie (14)

La chimiothérapie présente des effets secondaires peu spécifiques. Ainsi, la toxicité hématologique est un effet commun aux chimiothérapies. L’incidence de neutropénie et de neutropénie fébrile est particulièrement plus élevée lors d’un traitement au docetaxel, c’est-à-dire une incidence des neutropénies de grade 3 ou 4 variant de 60 à 70 %, ce qui justifie l’utilisation d’un facteur de croissance granulocytaire (G-CSF), soit le filgrastim ou le pegfilgrastim, pour les patients sélectionnés.

Cette incidence est de 27 à 52 % avec le paclitaxel (et 2 % de neutropénie fébrile) et moindre avec les autres molécules. L’anémie de grade 3 ou 4 apparait avec une incidence de 8 % sous gemcitabine, de 6 à 16 % sous paclitaxel, de 9 % sous docetaxel et de 4 % sous pémétrexed. La thrombocytopénie de grade 3 ou 4 est plus prévalente sous l’effet de la carboplatine (25 %).

Les nausées et vomissements sont deux effets potentiels des platines. La cisplatine en cause plus que la carboplatine. Pour ce qui est des autres effets non hématologiques des platines, les effets secondaires de la carboplatine sont plus tolérables. Ainsi, une néphrotoxicité et une ototoxicité peuvent survenir sous l’effet de la cisplatine, ce qui justifie la modification du traitement en faveur de la carboplatine. Des neuropathies périphériques sensorielles peuvent également survenir, mais avec une fréquence moindre comparativement aux taxanes et aux alcaloïdes de la vinca.

Parmi les autres effets possibles de la gemcitabine, on peut noter : le syndrome pseudo-grippal et l’éruption cutanée. Ce médicament est considéré comme faiblement émétisant. Les deux taxanes, soit le docetaxel et le paclitaxel, peuvent quant à eux causer des neuropathies périphériques. Pour ce qui est des autres effets plus fréquents, le docetaxel provoque de la rétention hydrique, nécessitant également une prémédication avec la dexamethasone, il cause aussi l’onycholyse, l’alopécie totale, des arthralgies et des myalgies. Le pémétrexed s’administre avec une prémédication particulière servant à diminuer l’apparition des effets secondaires hématologiques et non hématologiques. Les effets fréquents, autres qu’hématologiques, sont des diarrhées, de la mucosité et une éruption cutanée. Bien qu’elle soit moins fréquente, la néphrotoxicité est à surveiller.

La prémédication habituellement utilisée consiste en de l’acide folique à une dose de 0,4 à 1 mg par voie orale, une fois par jour, de 7 à 14 jours avant le début de l’administration du pémétrexed et pendant toute la durée des traitements, la vitamine B12 (cyanocobalamine) à raison de 1000 mcg par voie intramusculaire, une à deux semaines avant la première administration de pémétrexed puis toutes les neuf semaines jusqu’à l’arrêt du pémétrexed et finalement, pour prévenir l’éruption cutanée, la dexamethasone doit être administrée à une dose de 4 mg deux fois par jour par voie orale pendant trois jours, la première dose devant être débutée la veille de la chimiothérapie. La vinorelbine, alcaloïde de vinca, peut causer des toxicités non hématologiques, telles que des neuropathies périphériques qui sont cumulatives au fil des traitements et ne sont que lentement réversibles. Mentionnons aussi un ralentissement de la motilité gastro-intestinale menant à des crampes intestinales et à de la constipation.

Conclusion

En l’absence de mutation activatrice de l’EGFR, le traitement de première ligne des patients atteints de CBNPC avancé mais conservant un bon état général (PS≤1) repose sur un doublet comportant un sel de platine et un cytotoxique de troisième génération, auxquels peut être ajouté un anticorps anti-angiogénique chez les patients éligibles à ce type de traitement. La chimiothérapie est interrompue au terme de 4 à 6 cycles pour les patients dont la maladie est contrôlée (réponse objective au traitement ou stabilisation de la maladie). La stratégie de maintenance constitue une voie majeure d’optimisation de la première ligne de traitement des CBNPC avancés pour les patients dont la maladie est contrôlée, avec un impact cliniquement significatif sur la survie et une tolérance acceptable avec le pémétrexed. Le changement des pratiques cliniques imposé par cette nouvelle stratégie au profit de séquences thérapeutiques plus longues est loin d’être négligeable, ne serait-ce que parce que la durée indéfinie du traitement qu’implique la maintenance confronte très tôt le patient à l’incurabilité de sa maladie.

 

 

Liens d’intérêts : Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts.

Références :

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  • Bunel, T. Berghmans. Traitement de 1ere ligne. Revue des Maladies Respiratoires Actualités Volume 6, Issue 2, May 2014, Pages 121-125
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Place de la radiothérapie dans le traitement du cancer bronchique non à petites cellules non métastatique

La radiothérapie est une arme thérapeutique incontournable dans la prise en charge des cancers bronchiques non à petites cellules non métastatiques qui s’inscrit avec la chirurgie et les traitements systémiques, la chimiothérapie, les thérapies ciblées et l’immunothérapie, dans une approche pluridisciplinaire.

 

A. Boukerche, Service de Radiothérapie – EHSO Emir Abdelkader, Oran. Faculté de Médecine, Université d’Oran 1.

 Date de soumission : 27 Janvier 2021

Résumé : La radiothérapie est une arme thérapeutique incontournable dans la prise en charge des cancers bronchiques non à petites cellules non métastatiques qui s’inscrit avec la chirurgie et les traitements systémiques, la chimiothérapie, les thérapies ciblées et l’immunothérapie, dans une approche pluridisciplinaire. Notre objectif est de décrire les principes de la radiothérapie conformationnelle en 3 dimensions (RT-3D) thoracique utilisée en routine, certaines nouvelles techniques : radiothérapie conformationnelle avec modulation d’intensité (RCMI), radiothérapie en conditions stéréotaxiques (SBRT), radiothérapie asservie à la respiration (Gating) et d’aborder les indications de radiothérapie dans les cancers bronchiques non à petites cellules non métastatiques.

Mots clés : Cancer bronchique non à petites cellules non métastatique, indication de la radiothérapie, radiothérapie conformationnelle 3 D.

 

Abstract: Radiotherapy is an essential therapeutic weapon in the management of non-small-cell non-metastatic lung cancer which is combined with surgery and systemic treatments, chemotherapy, targeted therapies and immunotherapy, in a multidisciplinary approach. Our objective is to describe the principles of conformational radiotherapy in 3 dimensions (RT-3D) thoracic used routinely, certain new techniques: conformational radiotherapy with intensity modulation (RCMI), radiotherapy in stereotactic conditions (SBRT), respiratory gated radiotherapy (Gating) and to address the indications for radiotherapy in non-small cell, non-metastatic lung cancer.

Keywords: Non-small-cell non-metastatic lung cancer, indication of radiotherapy, 3-D Conformal radiotherapy.

 


 

Introduction 

Les formes dites « non à petites cellules » représentent environ 85% des cancers du poumon et constituent l’histologie prédominante. Réputée de pronostic sombre, la survie de ces cancers est étroitement liée au stade de la maladie lors de son diagnostic et à sa prise en charge. Tous stades confondus, leurs taux de survie globale à 5 ans sont estimés autour de 14% à 20% [1-2].

Indications de la radiothérapie dans les stades non métastatiques 

La stratégie thérapeutique initiale des cancers du poumon non à petites cellules est orientée grâce à la classification selon leur stade Tumor Node Metastasis (TNM) de l’Union Internationale Contre le Cancer (UICC) [8eme édition]. La détermination des volumes d’intérêt (volumes cibles et organes à risque), ainsi que la prescription des doses constituent des étapes clés pour la réussite du plan personnalisé du patient.

 

Stade I et II 

La chirurgie représente la principale arme thérapeutique contre ces tumeurs. La radiothérapie normo fractionnée à visée curative est indiquée chez les patients non opérables ou refusant la chirurgie si l’état respiratoire du patient le permet. L’irradiation ne concernera que les volumes tumoraux. Pour les stades II, une radiothérapie post-opératoire peut être discutée en cas d’exérèse incomplète ou atteinte pariétale ; alors que pour les stades I, la radiothérapie en condition stéréotaxique devient une option thérapeutique [3,4].

 

Stade III et II 

Pour les stades III résécables, il n’existe pas une attitude thérapeutique standardisée. La prise en charge repose sur un traitement multimodal, associant la chimiothérapie et la radiothérapie, voire la chirurgie. Pour les stades III non résécables, la chimioradiothérapie concomitante constitue le traitement de référence, mais elle doit être réservée aux patients en bon état général (indice de performance 0 ou 1), âgés de moins de 70 ans avec peu de maladies associées. Alors que pour les autres patients pour lesquels une chimioradiothérapie est difficile à réaliser, en raison de l’âge, de comorbidités associées, d’une altération de l’âge ou d’un important volume tumoral, le traitement séquentiel garde sa place. La radiothérapie exclusive peut être proposée. En situation postopératoire, les stades pN2 et les stades pT3R0 sont discutées en réunion de concertation pluridisciplinaire. Pour les stades pT3R1, la radiothérapie adjuvante constitue un standard [5-9].

Radiothérapie conformationnelle en 3 dimensions (RT 3D) 

La RT 3D thoracique est la technique standard utilisée en routine pour les tumeurs en place ou en situation post-opératoire. Elle nécessite une évaluation préalable de la fonction respiratoire (VEMS et DLCO) et l’obtention du TEP scan du bilan diagnostique, qui permet de distinguer la tumeur de l’éventuelle atélectasie d’aval et de repérer les adénopathies. Une IRM d’évaluation peut être indiquée pour les tumeurs de l’apex ou situées dans la gouttière costo-vertébrale [10-11].

  • Délinéation des volumes d’intérêt 

Avant tout traitement, il est important de délinéer les volumes d’intérêt : volumes cible et organes à risque.

Pour cela, l’acquisition des données anatomiques doit être la plus précise possible. Elle est réalisée à l’aide d’une scanographie en position de traitement : en décubitus dorsal, avec le plus souvent un simple repose-bras ou un système d’immobilisation personnalisé pour améliorer la reproductibilité, les bras au-dessus de la tête ou le long du corps en cas de tumeur apicale, avec une injection de produit de contraste, après vérification de la clairance de la créatinine. Elle doit couvrir l’ensemble des structures anatomiques d’intérêt (poumons en totalité, cœur, œsophage, moelle épinière.). Habituellement, sa limite supérieure est la glotte et la limite inférieure est l’interligne L1–L2. L’épaisseur des coupes doit être inférieure à 5 mm ; une épaisseur de 2,5 mm est recommandée pour avoir une acquisition de qualité [12].

  • Volume cible 

Il comporte selon les situations cliniques : la tumeur, les adénopathies et les aires ganglionnaires atteintes selon la classification de Mountain. En cas de tumeur de l’apex ou d’atteinte massive des aires médiastinales hautes sous-jacentes (aire 1 et 2), l’aire sus claviculaire est irradiée. En cas de chimiothérapie néoadjuvante, le volume cible macroscopique correspond au volume tumoral initial d’avant la chimiothérapie à l’exception de la présence d’une importante atélectasie [13-15].

Le volume tumoral macroscopique (GTV T et GTV N)

Il correspond à la tumeur pulmonaire (GTVT) et aux adénopathies visibles à l’imagerie (GTVN). La définition de la fenêtre de contourage optimale pour la scanographie est importante. Pour la visualisation de la tumeur intra parenchymateuse, les valeurs optimales sont un niveau de –600 unités Hounsfield (UH) et une fenêtre de ±1600 UH ; et pour le médiastin, les valeurs optimales sont un niveau de +20 UH et une fenêtre de ±400 UH. Pour la tomographie par émission de positons (TEP), il n’y a pas de valeurs recommandées. Tout ganglion est considéré comme pathologique si son petit diamètre est supérieur à 1 cm, s’il fixe sur la TEP ou en cas de confirmation histologique de l’atteinte histologique (Prélèvement par médiastinoscopie, échoendoscopie bronchique…) [16-18].

 

Le volume cible anatomoclinique (CTV)

Il inclut le volume tumoral macroscopique de plus la maladie infraclinique :

Le CTVT : autour du GTVT, une marge est à ajouter. Elle doit tenir compte de l’envahissement tumoral microscopique non visible à l’imagerie. Cet envahissement varie de 5 à 8 mm selon le type histologique. Il inclut la bronche souche, le hile homolatéral et les éventuelles extensions de la plèvre médiastinale péri-tumorale en cas de situation postopératoire [19].

Le CTVN : pour les ganglions envahis, il est recommandé une marge de 5-8 mm autour du GTVN en fonction de la taille du ganglion et du type histologique de la tumeur primitive [19-21]. Lorsque la radiothérapie postopératoire est indiquée dans les stades localement avancés, le CTV comprend le moignon bronchique, les aires ganglionnaires médiastinales envahies selon le compte rendu histologique, le hile homolatéral et les aires ganglionnaires 4 et 7 [22].

Le volume cible prévisionnel (PTV) 

La valeur de la marge autour du CTV est déterminé pour chaque centre en fonction de la technique utilisée ou la procédure de traitement. Le plus souvent, il s’agit d’une marge de 5 à 10 mm. Cette marge se décompose en marge pour tenir compte des mouvements internes (volume cible interne) et marge de positionnement (set-up margin). Ces deux marges sont indépendantes et doivent s’additionner de manière quadratique. Pour réduire le volume cible interne, en cas de tumeurs des lobes moyen et inférieur, il est recommandé d’utiliser une technique d’asservissement respiratoire (en blocage volontaire ou actif en inspiration profonde), ou une mid-ventilation à partir d’une scanographie quadridimensionnelle (4D-CT) [12,15,23-24].

  • Les organes à risque (OAR)

Les principaux organes à risque pour l’irradiation pulmonaire comprennent les deux poumons, le cœur, l’œsophage, le plexus, les vertèbres et la moelle épinière. L’ensemble de ces organes doit apparaître sur les histogrammes dose-volume (Tableau 1) [25-26].

Pour les vertèbres, une attention particulière doit être portée aux doses reçues aux vertèbres qui peuvent présenter des fractures radio-induites secondaires. En cas de tumeurs de l’apex et des doses au-delà de 50 Gy, le plexus brachial doit être délinéé. La dose maximale à ne pas dépasser selon l’extension tumorale est de 55-60 Gy, une dose supérieure peut être délivrée, surtout lorsque la tumeur comprime le plexus brachial, après évaluation du rapport bénéfice-risque [27-28].

 


 

  • Dose totale et fractionnement 

La dose prescrite varie selon le type de radiothérapie délivrée : exclusive, en association ou non à la chimiothérapie ou en situation postopératoire.

En cas d’irradiation exclusive, la dose totale recommandée est de 66 à 70 Gy. Elle peut être abaisser en fonction des histogrammes dose-volume (HDV), de l’état respiratoire du patient (résultats des épreuves fonctionnelles respiratoires), de l’association concomitante à une chimiothérapie, mais jamais inférieure à 60 Gy, avec un étalement classique de 2 Gy qui est recommandé ; alors que l’irradiation prophylactique médiastinale à la dose de 46 Gy est proscrite en l’absence d’aires ganglionnaires envahies sur la tomodensitométrie ou la TEP [14,29-31].

En situation postopératoire, la place de la radiothérapie est discutée depuis la méta-analyse PORT. Une dose de 60 à 66 Gy est prescrite en zone d’exérèse, en cas de résection R1 ; et une dose de 50 à 56 Gy est à discuter en cas de tumeurs de stade pT3R0. Pour les stades pN2, la dose de 46 à 54 Gy au niveau médiastinal peut être proposée [8-9,32-34].

Radiothérapie conformationnelle avec modulation d’intensité (RCMI)

Technique de radiothérapie innovante en plein essor, la RCMI est de plus en plus utilisée dans le cancer du poumon, en particulier pour les tumeurs proches de la moelle épinière ou du cœur

Elle permet d’irradier des volumes concaves tout en générant de forts gradients de dose entre les volumes à traiter et à épargner, permettant ainsi une escalade de dose. Elle est proposée dans le traitement des formes localement avancés en raison du bénéfice dosimétrique théorique qu’elle apporte. Certaines études ont montré le bénéfice apporté par l’utilisation de cette technique sur le contrôle local et la survie, ainsi qu’une moindre toxicité pulmonaire post-radique ou œsophagienne, tout en permettant une escalade de dose [35-38].

Radiothérapie thoracique en conditions stéréotaxiques (SBRT) 

Dans le cancer du poumon, la SBRT est réservée aux petites lésions : les T1N0 ou T2N0 inférieures à 5 cm, chez des patients le plus souvent inopérables en raison de comorbidités associées. La plupart des études ont rapporté un taux de control local supérieur à 85% et des taux de survie variables. Les fortes doses prescrites une précision millimétrique sont très hétérogènes. Elles varient de 3 à 22 Gy par fraction pouvant aller jusqu’ à des doses totales de 60 Gy en 3 fractions pour les tumeurs périphériques. Ces fortes doses délivrées par fraction correspondent à une dose équivalente biologique élevée supérieur à 100 Gy en fractionnement classique. En fonction de la localisation et la taille de la tumeur, le schéma de fractionnement est adopté [39-42].

Radiothérapie asservie à la respiration (Gating) 

La technique de gating permet de mieux adapter les faisceaux d’irradiation à la tumeur pour protéger certains organes à risque, surtout le poumon et le cœur,

La technique la plus utilisée est celle du blocage spirométrique volontaire qui consiste à traiter le patient en inspiration profonde bloquée, sur un volume inspiratoire prédéfini, chaque faisceau étant délivré lors d’une courte apnée.

Alors que les techniques de synchronisation respiratoires consistent à suivre la respiration libre en temps réel et à déclencher l’acquisition du scanner puis de l’accélérateur linéaire toujours sur la même phase du cycle respiratoire, habituellement en fin d’expiration profonde car la moins mobile.

Cette technique est principalement utilisée pour l’irradiation des tumeurs proches du diaphragme, très mobiles et chez les patients atteints d’une insuffisance respiratoire importante [23,43-45].

Conclusion 

La radiothérapie thoracique semble occuper une place de plus en plus importante dans la stratégie thérapeutique globale des cancers bronchiques non à petites cellules, surtout avec les avancées technologiques considérables que connait la radiothérapie, s’inscrivant ainsi dans une prise en charge pluridisciplinaire et multimodale.

 

Liens d’intérêts : Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts.

 

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Tableau 1 : Principales contraintes de dose aux organes à risque pour une irradiation thoracique normo fractionnée [25-26].

Poumon

RT

ARCC

Post

Lobectomie

Post Pneumonectomie

Dose moyenne pulmonaire (Gy)

<20Gy

<20Gy

<15Gy

<8-10Gy

V20

<40%

≤35%

<20%

<10%

V30

≤20%

≤20%

   

Cœur

       

V40

≤30%

 

 

 

D100

≤30Gy

 

 

 

Œsophage

   

 

 

V50

≤35%

 

 

 

Moelle épinière

   

 

 

Dose maximale

45 Gy

 

 

 

RT : radiothérapie ; ARCC : association radiochimiothérapie

 

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La chirurgie du cancer bronchique non à petites cellules

La meilleure chance de guérison pour le CBNPC reste la chirurgie, lorsque la tumeur est localisée. Nous avons les exérèses réglées (lobectomie, bilobectomie et pneumonectomie), associées à un curage ganglionnaire médiastinal homolatéral, 

 

K. Achour, Service de chirurgie Thoracique, CHU Lamine Debaghine, Bab El Oued, Alger

Date de soumission : 03 Janvier 2021

 

Résumé : La meilleure chance de guérison pour le CBNPC reste la chirurgie, lorsque la tumeur est localisée. Nous avons les exérèses réglées (lobectomie, bilobectomie et pneumonectomie), associées à un curage ganglionnaire médiastinal homolatéral, mais parfois on peut être amené à réaliser des élargissements a certains organes de voisinage pour être carcinologique. Actuellement avec les progrès technologiques, nous assistons à l’apparition de nouvelles procédures mini-invasives et le développement de la chirurgie en ambulatoire, avec la mise en place de programmes de récupération améliorée après chirurgie (RAAC). Toutes ces interventions se déroulent toujours selon les mêmes règles carcinologiques qu’une intervention classique et donnent de nombreux avantages, en termes de réduction des douleurs postopératoires et de durée de convalescence

Mots clés: cancer, chirurgie, techniques mini invasives, programmes de récupération améliorée après chirurgie.

 

Abstract: The best chance of a cure for NSCLC is surgery, when the tumour is located. We have regulated exereses (lobectomy, bilobectomy and pneumonectomy) associated with ipsilateral mediastinal lymph node dissection, but sometimes we may have to carry out enlargements to certain neighbouring organs to be carcinological. Currently with technological progress, we are witnessing the appearance of new minimally invasive procedures and the development of outpatient surgery with the establishment of enhanced recovery programs after surgery (RAAC). All these interventions always take place according to the same carcinological rules as a classic intervention and give many advantages, in terms of reduction of postoperative pain and the duration of convalescence.

Keys words: cancer, surgery, minimally invasive techniques enhanced recovery programs after surgery.

 

 

Au début du vingtième siècle, les cancers du poumon étaient relativement rares. La chirurgie de résection pulmonaire a été utilisée pour la première fois à la fin du XIXème siècle à une époque où l’anesthésie et la réanimation n’était pas adaptées à la prise en charge chirurgicale spécifique des problèmes respiratoires (les anti-bacillaires et les antibiotiques n’existaient pas encore), et où les connaissances anatomiques sur les pédicules vasculo-bronchiques pulmonaires étaient embryonnaires. C’est en 1933, que fut réalisée la première pneumonectomie pour cancer bronchique.

La chirurgie carcinologique du CBNPC a pour objectif d’enlever la tumeur dans sa totalité. Elle se fait classiquement par une thoracotomie postérolatérale (Fig. 1). Mais actuellement avec les progrès technologiques, nous assistons à l’apparition de nouvelles procédures mini-invasives qui permettent de nombreux avantages, en termes de réduction des douleurs postopératoires et de durée de convalescence. Ces interventions se déroulent selon les mêmes règles qu’une intervention classique, elles ne sont par contre utilisées que pour des stades localisés

  • La chirurgie “mini-invasive” (Fig. 2) est réalisée à travers de petites incisions de quelques cm.
  • La chirurgie thoracique vidéo-assistée (CTVA) (Fig. 3), encore appelée chirurgie vidéo-thoracoscopique, va nécessiter des incisions plus petites, de 5 à 12 mm.
  • La chirurgie thoracique robot assistée (RATS) (Fig. 4), est une nouvelle technique sûre qui apporte une vision endoscopique en 3D de haute définition et les instruments utilisés sont améliorés grâce à une articulation supplémentaire endocorporelle, qui rétablit les 7 degrés de liberté du membre supérieur. Une évaluation comparative à long terme avec la chirurgie conventionnelle permettra de préciser sa place dans le traitement des tumeurs du thorax.

 

   ACH1

Figure 1 : Thoracotomie postéro-latérale

Figure 2 : La chirurgie mini-invasive

 ACH2  

Figure 3 : La chirurgie thoracique vidéo-assistée (CTVA)

 ACH3  

Figure 4 : La chirurgie thoracique robot-assistée (RATS)

 

Les chirurgies pulmonaires carcinologiques courantes au niveau du poumon sont : l’ablation du ou des lobes atteints (lobectomie, bilobectomie) ou de la totalité du poumon (pneumectomie). Mais parfois, Il est nécessaire d’intervenir également sur des structures voisines, elles associent alors la résection du parenchyme pulmonaire à celle d’un organe ou d’une structure anatomique de voisinage envahie par la tumeur. Utilisant les voies d’abord classiques, la faisabilité de ce type d’intervention repose sur trois éléments fondamentaux : une sélection rigoureuse des patients candidats à ce type de chirurgie, une maîtrise des techniques chirurgicales et un plateau technique de haut niveau.

 

Les résections standards

  • La pneumonectomie : consiste à enlever la totalité du poumon où siège la tumeur. Cette intervention n’entraîne pas d’invalidité si les fonctions cardio-pulmonaires sont suffisantes. Elle entraîne cependant une perte définitive de 15 à 20% des fonctions pulmonaires. La mortalité post-opératoire est d’environ 6%.
  • La lobectomie. C’est actuellement l’intervention la plus réalisée en chirurgie du cancer du poumon. Elle consiste à enlever le lobe du poumon où siège la tumeur. Elle n’entraîne pas de handicap respiratoire chez les personnes ayant une fonction pulmonaire normale. La mortalité de cette intervention dans la phase post-opératoire est inférieure à 3%.

 

Figure 5 : Lobectomie supérieure

  • La segmentectomie et la résection cunéiforme (wedge résection) sont des interventions plus limitée et qui sont réservées à des patients fragiles ayant une mauvaise fonction cardio -respiratoire.

Les résections élargies

·       Les vaisseaux pulmonaires : L’envahissement proximal des vaisseaux pulmonaires est géré par un abord en intra péricardique.

 

·      La veine cave supérieure. Lorsque cette invasion est partielle, cela ne pose généralement pas de problèmes chirurgicaux. Par contre l’envahissement circonférentiel de la veine cave supérieure va nécessiter la mise en place d’une prothèse sur la zone du vaisseaux reséqué.

 

 ACH4  

Figure 5 : Tumeur envahissant la VCS

 

·      L’aorte. Lorsqu’un envahissement de la paroi aortique par un CBNPC est limité à l’adventice aortique sur une zone réduite, une résection de la tumeur est souvent possible. Par contre lorsque la média de l’aorte est infiltrée, les résections sous circulation extra corporelle (CEC) sont exceptionnelles car le risque de tétraplégie est majeur d’où l’intérêt actuellement des endoprothèses.

·      L’oreillette gauche. Cet élargissement consiste en la résection d’une partie de l’oreillette gauche. Si cette résection ne dépasse pas le tiers, elle peut être menée à bien sans l’apport de la CEC

  • La carène et la trachée. La carène est profondément enchâssée dans le médiastin à hauteur de D4. Elle est entourée de l’œsophage, de la crosse aortique, de la veine cave supérieure et de l’artère pulmonaire droite qui lui sont tous contiguës, facilitant ainsi l’envahissement de toutes ces structures anatomiques par une même tumeur. Il est donc nécessaire de bien documenter l’exploration préopératoire de la tumeur pour pouvoir se préparer à une chirurgie certes lourde mais faisable.

·      L’œsophage. L’élargissement à l’œsophage consiste essentiellement en la résection d’une pastille de musculeuse œsophagienne

  • Les vertèbres. L’extension de la résection au corps vertébral a montré sa faisabilité technique. L’idéal étant de la réaliser sans thérapie d’induction pour éviter les risques infectieux.

·      Les tumeurs de l’apex pulmonaire envahissant le détroit thoracique supérieur (Syndrome de Pancoast Tobias). Actuellement ce sont les voies antérieures qui permettent des abords chirurgicaux des structures anatomiques de la région ainsi que leur traitement de manière beaucoup plus sécurisante pour le patient.

 

·      La paroi costale. L’exérèse parenchymateuse doit être effectuée après réalisation de la pariétectomie. Si le défect pariétal est important il doit être comblé en fin d’intervention par une plaque prothétique.

·      Le diaphragme. L’envahissement de ce muscle riche en vaisseaux lymphatiques s’accompagne d’une diffusion métastatique précoce.

Actuellement, on admet que les éléments pronostic péjoratifs majeurs sont le caractère incomplet de la résection et l’atteinte ganglionnaire médiastinale. Si l’un des ganglions médiastinaux est atteint, il faut relativiser le caractère total ou non de la résection, et donc sa dimension curatrice. La lymphadenectomie est donc une composante fondamentale de la chirurgie à visée curatrice des CBNPC car elle permet une reconnaissance précise du stade de la maladie, augmente la probabilité d’une résection complète de celle-ci, et est à même d’augmenter les chances de guérison sans pour autant augmenter de façon substantielle la morbi mortalité opératoire.

C’est un des rares domaines de la chirurgie du cancer du poumon dont le niveau de preuve est 1. Le curage standard consiste à réaliser (même en l’absence de N2 macroscopique), la résection de toute l’atmosphère cellulo ganglionnaire médiastinale, ce qui implique la dissection minutieuse de tous les éléments qui traversent le médiastin et leur préservation.

 ACH5  

Figure 9 : Curage ganglionnaire. 

Toutes les indications pour la prise en charge des cancers bronchiques doivent être discutées en réunion de concertation pluridisciplinaire (RCP).

La chirurgie constitue le traitement de référence pour les CBNPC de stade I et II. Pour les stades localement avancés (III), le recours à la chirurgie dépend de la possibilité ou non d’enlever complètement la tumeur. En revanche, la chirurgie est exceptionnelle pour les stades métastatiques IV. Le choix d’un type d’intervention est fonction de la taille de la tumeur, de sa localisation, de son éventuelle propagation aux structures avoisinantes et des résultats du bilan d’opérabilité du patient. L’expérience de différentes équipes dans le monde, montre que la lobectomie pulmonaire pour cancer à thorax fermé est une intervention sûre, aux résultats identiques à la thoracotomie, dans le respect des règles de la chirurgie carcinologique.

D’autres types d’interventions comme la vidéo-médiastinoscopie peuvent aussi être effectuées dans le cadre du bilan de la maladie pour établir un diagnostic ou bien apporter une confirmation du statut ganglionnaire du patient.

Conclusion

Actuellement nous assistons à de grands progrès thérapeutiques oncologiques, malgré cela la meilleure chance de guérison pour le CBNPC reste la chirurgie, lorsque la tumeur est localisée. Certes c’est un geste lourd avec un taux de morbi-mortalité non négligeable, cependant, ces chiffres se sont améliorés ces dernières décennies, en raison des progrès de la réanimation, de la gestion de la douleur et une meilleure prévention et prise en charge des complications post-opératoires, notamment infectieuses.

Actuellement nous assistons à une nouvelle avancée dans l’ère de la chirurgie pulmonaire carcinologique avec le développement de la chirurgie en ambulatoire et la mise en place de programmes de récupération améliorée après chirurgie RAAC. Les objectifs de ces programmes sont de réduire les risques liés à l’hospitalisation, d’améliorer la récupération post-opératoire et de diminuer les dépenses de santé. Des études sont en cours et les résultats obtenus sur des patients bien sélectionnés sont prometteurs.

 

Liens d’intérêts : Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts.

 

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Interprétation de la protéine PDL1 dans les cancers non à petites cellules du poumon

Programmed cell Death 1 (PD1) et un de ses ligands, Programmed Death Ligand1 (PDL1), sont des protéines clefs dans le contrôle de la réponse immunitaire antitumorale. Des données suggèrent que PDL1 est un biomarqueur émergent pour l’immunothérapie par anticorps anti-PD1 et anti-PDL1 dans le cancer bronchique non à petites cellules (CBNPC).

 

S. Ketit, S. Hamdouche, L. Beddar. Service d’Anatomie et de Cytologie Pathologiques. CHU Abdesselam Benbadis, Constantine

 Date de soumission : 11 Octobre 2020.

Résumé : Programmed cell Death 1 (PD1) et un de ses ligands, Programmed Death Ligand1 (PDL1), sont des protéines clefs dans le contrôle de la réponse immunitaire antitumorale. Des données suggèrent que PDL1 est un biomarqueur émergent pour l’immunothérapie par anticorps anti-PD1 et anti-PDL1 dans le cancer bronchique non à petites cellules (CBNPC). L’immunohistochimie (IHC) PD-L1 est le seul biomarqueur prédictif proposé en oncologie thoracique dans le cadre de l’immunothérapie PD-L1/PD1. Dans ce contexte, les études publiées relatives à ce biomarqueur sont nombreuses, mais elles soulèvent des interrogations sur la nature de l’anticorps à utiliser et dans quelle(s) condition(s) ; le seuil de positivité à appliquer et l’intégration de cette activité dans le fonctionnement quotidien d’un laboratoire d’anatomo cytopathologie (ACP), ce qui implique de rendre un examen fiable, devant éviter impérativement, compte tenu des conséquences thérapeutiques, un résultat faussement positif ou faussement négatif. Ainsi l’interprétation de l’IHC PD-L1 demande une expertise et une formation spécifique des pathologistes.

Mots clés : PD-L1, immunohistochimie, interprétation, poumon, cancer non à petites cellules.

 

Abstract: Programmed cell death 1(PD1) and one of its ligands, Programmed Death Ligand1(PDL1), are key immune checkpoint proteins. Data suggest that PDL1 is an emerging biomarker for immunotherapy by anti-PD1 antibodies and anti-PDL1 in lung cancer non-small cell (NSCLC). PD-L1 detection by immunohistochemistry (IHC) is the only predictive biomarker available to date for PD-L1/PD1 immunotherapy in thoracic oncology. While many studies have been published in the domain of this biomarker, they raise a number of questions mainly concerning the type of antibody for use and its condition of utilization, the threshold to be used; and the adoption of this methodology as part of the daily practice of a pathology laboratory; which implies providing an extremely reliable result that, taken the therapeutic consequences, avoids any false positive and negative results. In this context, assessment of PD-L1 IHC requires considerable expertise and specific training of pathologists.

Keywords: PD-L1, immunohistochemistry, interpretation, lung, non-small cell carcinoma.


 

Introduction

Le cancer bronchique non à petites cellules (CBNPC) représente la forme histologique la plus fréquente des cancers bronchiques. Il constitue la première cause de décès par cancer dans la population masculine de par le monde et en Algérie, avec de faibles taux de réponse à la chimiothérapie conventionnelle. Ces dix dernières années, la prise en charge du cancer du poumon a bien évolué. De nombreuses altérations moléculaires des voies de signalisation des tumeurs ont été découvertes, conduisant au développement de thérapies dites ciblées, et à la notion de médecine personnalisée [1]. Cependant, près de la moitié des patients atteints d’un CBNPC ne présentent pas ces mutations et ne peuvent pas bénéficier de ces thérapies ciblées [2].

La recherche contre le cancer du poumon a exploré alors d’autres pistes thérapeutiques. L’une de ces pistes concerne le rapport paradoxal qui existe entre le système immunitaire et les cellules tumorales.

 

Problématique

De nouvelles stratégies thérapeutiques ont émergé et transformé le pronostic de sous-groupes spécifiques de CBNPC métastatiques : ce sont les thérapies ciblées, représentées essentiellement par les inhibiteurs de tyrosine kinase en présence de mutation ou de réarrangement des oncogènes EGFR, ALK et ROS1, observés principalement dans les adénocarcinomes des sujets peu ou non-fumeurs et l’immunothérapie par ciblage du point de contrôle de la réponse immunitaire PD1/PD-L1 par des anticorps appelés inhibiteurs des checkpoints de l’immunité (ICI).

PD-1 est une molécule de costimulation exprimée par les lymphocytes T activés ; son engagement avec son ligand, PD-L1 (PD1-ligand également désigné CD274 ou B7-H1), déclenche un signal inhibant transitoirement ou définitivement les capacités cytotoxiques des lymphocytes T CD8+. L’interaction PD1/PD-L1 est d’abord un mécanisme physiologique visant à réduire l’auto-immunité, mais lorsque PD-L1 est exprimé par les cellules tumorales, cette interaction leur permet d’échapper à la surveillance immunitaire en inhibant l’activation des lymphocytes T cytotoxiques. C’est dans ce contexte que sont actuellement développés les ICI PD1/PD-L1 dans les cancers thoraciques. Le ciblage de PD1/PD-L1 repose sur l’utilisation de molécules levant l’interaction entre PD1/PD-L1 et réactivant la supposée réponse immunitaire anti tumorale préexistante. Ces anticorps sont soit dirigés contre PD1, comme le nivolumab (Opdivo®, Bristol-Myers Squibb) et le pembrolizumab (Keytruda®, Merck et Co) ou contre PD-L1, comme l’atezolizumab (Tecentriq®, Genentech), le durvalumab (Imfinzi®, Astra-Zeneca) et l’avelumab (Bavencio®, EMD Serono). La prescription de certains de ces ICI repose sur l’expression de PD-L1 en IHC par les cellules tumorales [3-4].

 

Indications du test PD-L1 dans le CBNPC

Quel patient tester et quand ?

Le test PD-L1 doit être réalisé de manière systématique dès le diagnostic de CBNPC métastatique. Il peut être réalisé a posteriori en cas de progression de la maladie à la demande du clinicien.

Le pembrolizumab (Keytruda®, Merck et Co), est le seul inhibiteur de PD1/PD-L1 pour lequel une restriction d’utilisation est basée sur l’expression de PD-L1. Un seuil minimal d’expression par les cellules tumorales de 50% est requis pour la prescription en première ligne, il est de 1% pour la prescription en seconde ligne et au-delà.

L’expression de PD-L1 étant souvent hétérogène ou modulée par certains traitements, un nouveau prélèvement tumoral peut être demandé par le clinicien, pour une nouvelle évaluation de l’expression de PD-L1, en particulier si le premier prélèvement était négatif.

En dehors de ces indications, le clinicien peut être amené à demander une recherche d’expression de PD-L1, pour évaluer la probabilité de réponse du patient à un anti-PD1/PD-L1

 

Schéma 1. Algorithme de tests diagnostiques et théranostiques pour tout carcinome broncho- pulmonaire non à petites cellules à un stade avancé. (Algorithm for diagnostic and theranostic tests for advanced stage NSCLC. www.sciencedirect.com

 

Quel type d’échantillon tumoral utiliser ?

L’expression de PD-L1 peut être testée sur biopsie ou prélèvement chirurgical, sur la tumeur principale, la récidive, ou le site métastatique.

Sur biopsie, il existe un risque de faux négatif du test immunohistochimique lié à l’hétérogénéité intratumorale de l’expression de PD-L1.

Il existe également une hétérogénéité d’expression entre site tumoral primitif et métastases avec en moyenne 75% de concordance entre les différents prélèvements [5] avec des seuils de 1%, 5%, 10% et 50%. Ainsi dans environ 20% des cas, la métastase ganglionnaire devient PD-L1 positive à la différence de la tumeur primitive négative ; à l’inverse, 10% de ces métastases peuvent être négatives avec une tumeur initiale PD-L1 positive. Les prélèvements discordants correspondent le plus souvent à des échantillons tumoraux prélevés à plus de 6 mois d’intervalle [6].

L’utilisation rationnelle des prélèvements de petite taille est souhaitable en favorisant l’inclusion des fragments dans plusieurs cassettes.

Un minimum de 100 cellules tumorales analysables est recommandé. Lorsque le nombre de cellules tumorales est inférieur à 100 et surtout inférieur à 50, il est possible de rendre un résultat en émettant des réserves sur la représentativité du prélèvement.

Sur pièce opératoire, l’expression est le plus souvent homogène entre différents blocs tumoraux en termes d’expression de PD-L1 par les cellules tumorales (TC) [7].

95% des biopsies sont adéquates pour le test PD-L1 avec des résultats comparables entre biopsies et pièces opératoires si elles comportent plus de 100 cellules tumorales [8].

Les prélèvements cytologiques fixés et inclus en paraffine (cytoblocs) peuvent être utilisés pour l’évaluation de l’expression de PD-L1, dès lors que ces prélèvements comportent plus de 100 cellules tumorales analysables. L’utilisation des échantillons cytologiques n’a pas été validée dans les essais cliniques et n’est pas recommandée actuellement pour l’utilisation des tests (ou kits) PD-L1 [8].

 


 

L’étape pre-analytique. La phase pré-analytique conditionne la qualité des techniques ultérieures (IHC, ISH et biologie moléculaire), et donc la détection de PD-L1 par IHC [9-10].

 

Ischémie froide. Il est recommandé de réduire le plus possible la durée d’ischémie froide des prélèvements. L’ischémie froide est définie comme le temps écoulé entre le moment où le prélèvement tissulaire est extrait du corps humain et sa mise au contact du fixateur. Un retard de fixation supérieur à 1 heure diminue de manière significative la détection de marqueurs immunohistochimiques et le signal en ISH.

Pour les biopsies, il est recommandé de fixer le prélèvement dans le fixateur immédiatement (délai de quelques minutes). Pour les pièces opératoires, le délai de fixation doit être inférieur à 1 heure.

 

Fixation. Les prélèvements doivent être fixés dans le formol neutre tamponné à 10% durant 6 à 48 heures, en utilisant un volume de fixateur suffisant. Le seul fixateur recommandé est le formol neutre tamponné à 10%, car les protocoles des tests compagnons ont été validés cliniquement uniquement avec ce fixateur de référence.

Le temps de fixation doit être d’au moins 6 heures pour les biopsies afin d’éviter une sous fixation dommageable de façon irrémédiable et au maximum de 72 h (24-48 h recommandé) pour les pièces opératoires (une fixation plus longue doit être rapportée dans le compte rendu) [11-12].

 

Inclusion. L’utilisation d’une paraffine à point de fusion bas (inférieur à 60°C idéalement 55-58°C) est recommandée [12].

 

Décalcification. La décalcification des échantillons tissulaires est à éviter, du fait de l’altération des acides nucléiques et des protéines qu’elle induit. Si une décalcification s’avère nécessaire, il est préférable d’utiliser l’EDTA à 10% (chélateur de calcium), afin de limiter l’impact sur les techniques d’IHC [12-13].

 

Confection des coupes. Il est recommandé d’effectuer le marquage PD-L1 sur des coupes fraichement coupées et ne datant pas de plus de 6 mois. Dans les guides d’interprétation des différents tests, un délai maximum de conservation de 2 mois pour le test SP142 (Ventana PD-L1 SP142 Assay, Ventana Medical Systems Inc.), de 4 mois pour le test 28-8 PharmDx (Agilent Technologies/Dako) et de 6 mois pour le test 22C3 PharmDx (Agilent Technologies/Dako) est recommandé [14-15].

Si des lames blanches doivent être conservées pour des études ultérieures, ou comme témoins externes, il faut privilégier soit une conservation des lames à 4°C soit à température ambiante, à l’abri de la lumière, après couverture des lames par une fine couche de paraffine, qui n’empêche cependant pas une légère perte de signal [9-11-12-16].

 

Témoins externes et internes. Les échantillons qui serviront de témoins externes doivent avoir été pris en charge selon les mêmes conditions pré-analytiques que les échantillons à tester. Afin de s’assurer de la reproductibilité de la technique d’IHC, des fragments de témoins externes positif et négatif doivent être inclus sur chaque lame dans la mesure du possible, sinon il faut prévoir une lame de témoins externes au cours de chaque cycle de marquage. Les témoins externes permettent de contrôler l’intensité du marquage et de détecter des variations éventuelles de la sensibilité du test. Ce point est particulièrement critique pour le test PD-L1 qui prend en compte le pourcentage de cellules marquées quelle que soit l’intensité.

Des blocs témoins externes peuvent être faits avec de l’amygdale normale ou avec des tumeurs du laboratoire montrant une expression variable de PD-L1. Afin de préserver le matériel, un bloc peut être constitué en réalisant des punchs biopsiques de 3 mm.

Idéalement, les témoins doivent être coupés en même temps que le prélèvement à tester. Des lames blanches du bloc témoin peuvent toutefois être faites à l’avance en respectant le délai et les conditions de conservation. La date de coupe devra être indiquée sur la lame [11-12].

Le tissu placentaire (cellules trophoblastiques) n’est pas adapté comme témoin positif externe en raison d’un très haut niveau d’expression de PD-L1, qui ne permet pas de détecter les faibles niveaux d’expression et donc un manque de spécificité du test IHC.

Les témoins internes exprimant PD-L1 sont les cellules dendritiques et macrophages ainsi que certains sous-types de lymphocytes T et B. Si ces cellules ne sont pas présentes sur le prélèvement, il est nécessaire de se référer au témoin externe.

PDL2

Fig 1. Technique d’immuno-histochimie. www.sciencedirect.com

L’étape analytique

Technique immunohistochimique

L’utilisation de tests standardisés (kits prêts à l’emploi) doit être favorisée dans la mesure du possible. Le test SP142 (Ventana PD-L1 SP263 Assay, Ventana Medical Systems Inc), le test 28-8 PharmDx (Agilent Technologies/Dako) et le test 22C3 PharmDx (Agilent Technologies/Dako) paraissent interchangeables en raison de leur très bonne concordance pour le marquage PD-L1 des cellules tumorales dans les CBNPC [17-18].

Les tests développés dans les laboratoires (Laboratory Developed Tests ou LDT dans la littérature anglo-saxonne) appelés encore « tests maison » peuvent être utilisés pour évaluer l’expression de PD-L1. Leur concordance doit être validée en comparaison à un test (ou kit) de référence et leur calibration doit faire l’objet d’une attention particulière.

Il est par ailleurs particulièrement recommandé de participer régulièrement à un test de contrôle qualité externe, surtout en cas d’utilisation d’un test développé localement.

PDL3

Tableau1 : Principaux anticorps utilisés en IHC pour la détection de la protéine PD-L1 dans le CPNPC, seuils de positivité et traitement associé (adapté de celui publié par Adam et ses collaborateurs (2016) [19]).


 

Interprétation du marquage PD-L1

Avant toute interprétation du marquage PDL1, il est indispensable d’évaluer la qualité de la préservation du tissu et sa fixation, la représentativité du matériel et la quantité de cellules tumorales sur la coloration standard HES.

Ainsi, une quantité de cellules tumorales inférieure à 100 cellules doit être mentionnée et doit faire émettre des réserves sur la représentativité du prélèvement, voire conduire à considérer le prélèvement comme non adéquat pour la détermination du statut PD-L1.

Également une nécrose abondante qui peut générer un bruit de fond, des artéfacts d’écrasement ou des effets de bordures liés au séchage, une fixation défectueuse ou une décalcification, doivent être mentionnés et pris en compte pour l’interprétation.

L’interprétation du marquage PD-L1 des témoins internes et externes est requise avant toute analyse.

Le témoin positif externe permet de contrôler que le protocole d’IHC offre la sensibilité requise. Si le témoin externe positif n’est pas ou insuffisamment marqué, la lame ne doit pas être interprétée. L’intérêt d’avoir un témoin négatif est de s’assurer qu’il n’a pas de marquage non spécifique de type bruit de fond ou marquage cytoplasmique.

L’examen immunohistochimique est interprété en appliquant un système d’évaluation spécifique au poumon, Tumor Proportion Score (TPS). Il s’agit du pourcentage total des cellules tumorales viables, exprimant PD-L1 sur la lame examinée. Un marquage membranaire uniquement, linéaire, complet ou non donc n’a pas besoin d’être circonférentiel et quelle qu’en soit l’intensité. L’intensité du marquage n’est pas prise en compte, toute intensité étant considérée de la même manière. L’analyse au faible grandissement (G×2 ou G×4) permet d’apprécier un marquage intense, et d’évaluer sa distribution homogène ou hétérogène sur la coupe. Les zones peu ou pas marquées à faible grandissement doivent être examinées à fort grandissement (G×10 à G×40) pour ne pas méconnaître un marquage membranaire incomplet et/ou de faible intensité. Il est recommandé d’évaluer le pourcentage de cellules tumorales positives, en ne prenant en compte que, pour l’administration de pembrolizumab, le seuil de 1% en deuxième ligne et de 50% en première ligne.

Différentes techniques sont proposées pour aider à résoudre le problème de l’hétérogénéité tumorale, surtout sur des pièces opératoires. Il est possible :

  • Soit d’évaluer le pourcentage de zones fortement marquées (3+) d’intensité, visibles dès le faible grandissement, de zones moyennement marquées (2+) et de zones faiblement marquées (1+) visibles seulement à fort grandissement et les additionner pour obtenir un pourcentage total de cellules marquées ;
  • Soit d’évaluer les zones de pourcentage de positivité identique et les additionner (par ex, 30% de la tumeur comporte 80% de cellules positives, 20% comporte 30% de cellules positives et le reste est négatif = 30% × 80 + 20% × 30 = 24 + 6 = 30% au total).
  • PDL4

Schéma 2. Exemple de méthode permettant de quantifier l’expression de PD-L1 quand elle est hétérogène : le % de cellules tumorales marquées est (80 + 10 + 25 + 50): 4 ∼ 40%. (Suggestion of a scoring method for PD-L1 expression: A systematic approach could be to divide the section into equal areas evaluated for percentage of tumor cell positivity, and then to average this percentage. As an example: (80 + 10 + 25 + 50): 4 40%). www.sciencedirect.com

 

 PDL5  PDL6

Fig 2. IHC PDL1+ diffus forte intensité. Diffuse and strong membranous staining. Laboratoire d’anatomie pathologique CHU Benbadis Constantine

Fig 3. IHC PD-L1+ diffus intensité modérée. Diffuse and moderate membranous staining. Laboratoire d’anatomie pathologique CHU Benbadis Constantine.

 PDL7  PDL8

Fig 4. IHC PD-L1+ faible intensité. Focal and low membranous staining. Laboratoire d’anatomie pathologique CHU Benbadis Constantine

Fig 5. IHC PD-L1 absence de marquage. Lack of staining. Laboratoire d’anatomie pathologique CHU Benbadis Constantine

 PDL9  PDL10

Fig 6. Bruit de fond non spécifique. Non-specific background noise. Laboratoire d’anatomie pathologique CHU Benbadis Constantine

Fig 7. Pigments anthracosiques. Anthracosic pigments. Laboratoire d’anatomie pathologique CHU Benbadis Constantine

 PDL11  PDL12

Fig 8. Marquage des macrophages alvéolaires. Staining of alveolar macrophages. Laboratoire d’anatomie pathologique CHU Benbadis Constantine

Fig 9. Marquage de cellules immunitaires. Staining of numerous immune cells. Laboratoire d’anatomie pathologique CHU Benbadis Constantine

 PDL13  PDL14

Fig 10. Necrose. Necrosis. PD-L1 IHC 22C3 PharmDx Interpretation Manual, DAKO.

Fig 11. Artéfact d’écrasement Crush artifact. PD-PD-L1 IHC 22C3 PharmDx Interpretation Manual, DAKO

 

Pièges et artéfacts

Il s’agit des mêmes artéfacts que ceux observés au cours de toute analyse immunohistochimique : bruit de fond lié aux séchage, déparaffinage ou rinçage insuffisants des lames, effets de bordure liés au séchage du tissu avant fixation ou pendant la coloration, artéfacts d’écrasement ou d’électrocoagulation liés à la procédure de prélèvement, nécrose, pigments d’anthracose, mauvaise conservation de la morphologie et des épitopes liée à une fixation insuffisante.

Certaines cellules tumorales peuvent présenter un marquage granulaire cytoplasmique gênant la visualisation du marquage membranaire (notamment avec le test SP263) ou présenter des contours cytoplasmiques indistincts.

La présence de très nombreuses cellules immunitaires positives situées à l’interface avec les cellules tumorales peut gêner considérablement l’analyse de ces dernières.

Enfin les macrophages sont parfois très marqués et constituent un piège surtout lorsqu’ils se mêlent aux cellules tumorales. Ils se distinguent néanmoins par leurs caractéristiques cytologiques (petit noyau régulier, faible ratio N/C) et leur topographie (souvent endo-alvéolaire ou en bordure de nécrose).

 

L’étape post-analytique

Le compte-rendu de l’évaluation de l’expression de PD-L1 doit mentionner la date, le siège, le type de prélèvement (cytologie, biopsie, pièce opératoire), la fixation, une éventuelle étape de décalcification, ainsi que certains paramètres pouvant influencer l’expression de PD-L1 tels que le stade de la maladie, la notion de tumeur primitive, de récidive, de métastase et les traitements antérieurs. Il peut éventuellement intégrer les altérations génomiques associées qui influencent l’expression de PD-L1 [20-21].

Pour la partie analytique, il est nécessaire d’indiquer l’anticorps (clone), et l’automate utilisé ainsi que de préciser s’il s’agit d’un test prêt à l’emploi ou d’un LDT.

Seul le pourcentage de cellules tumorales marquées, quel que soit le niveau d’intensité, est à rapporter. La connaissance des seuils permettant l’indication thérapeutique est importante (actuellement 1% et 50%).

Il faut confirmer le marquage des témoins positifs externes et/ou internes (cellules immunitaires) et pour les échantillons de petite taille, il faut préciser combien de cellules tumorales sont analysables, avec des réserves si leur nombre est inférieur à 100. Il est également possible d’émettre des réserves si les étapes pré-analytiques posent problème (fixation non connue ou hors délais, décalcification, trop grand délai de stockage des lames blanches, etc.)

En ce qui concerne la conclusion du compte-rendu, il n’est pas recommandé de conclure par un résultat positif ou négatif pour l’expression de PD-L1. Il est préférable de la simplifier en indiquant le pourcentage de cellules tumorales exprimant PD-L1.


 

Assurance qualité

Les récentes recommandations publiées au niveau international [22-23-24] préconisent de mettre en place un programme de contrôle de la qualité des techniques d’analyse au sein des laboratoires effectuant des tests PD-L1, en prônant en particulier l’utilisation de témoins calibrés à chaque série de tests. Un nombre minimal de tests doit être réalisé et interprété par an, dans chaque structure ACP pour asseoir l’expertise technique et médicale et optimiser la qualité et les coûts des analyses. La réalisation du test PD-L1, doit être conditionnée à la participation à une évaluation externe de la qualité, avec des résultats satisfaisants, selon les critères définis par l’organisme d’Assurance Qualité (AQ).

 

Conclusion

Le statut PD-L1 en immunohistochimie fait partie des biomarqueurs potentiels les plus étudiés. L’évaluation immunohistochimique de l’expression de PD-L1 par les cellules tumorales est maintenant requise pour la prescription du pembrolizumab en première et en deuxième ligne dans les CBNPC avancés ou métastatiques. L’IHC PD-L1 est considérée comme un test théranostique, ce qui place les pathologistes au centre des décisions thérapeutiques. Ce test doit donc être mis en place dans tous les laboratoires ayant un recrutement en pathologie pulmonaire et réalisé dans le même temps que les autres marqueurs théranostiques. Des programmes de formation nationaux ont déjà permis à plusieurs pathologistes de se former pour l’interprétation du test PD L1 et de l’implémenter dans leurs laboratoires. Mais comme toute interprétation quantitative ou semi-quantitative d’une analyse immunohistochimique est sujette à une certaine variabilité entre les lecteurs, d’autres programmes de formations pour les pathologistes seront souhaitables afin d’harmoniser nos pratiques et renforcer la qualité de ce test théranostique, pour améliorer encore la prise en charge de nos patients.

 

Liens d’intérêts : Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts.


 

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