Apport de l’imagerie dans la broncho-pneumopathie chronique obstructive (BPCO)

M. Namouni, Service de Radiologie et Imagerie Médicale, CHU Ibn Rochd, Annaba

 Date de soumission : 13 février 2021

Résumé : Le diagnostic et le suivi de la bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO) reposent essentiellement sur la clinique et les épreuves fonctionnelles respiratoires (EFR), en particulier la spirométrie. La radiographie conventionnelle apporte peu d’informations sur la bronchopneumopathie chronique tandis que la tomodensitométrie est une méthode susceptible de contribuer à la compréhension de la physiopathologie, au phénotypage des patients BPCO et à la détection des complications de la BPCO.

Mots clés : BPCO, Radiographie du thorax et TDM.

 

Abstract: The diagnosis and follow-up of chronic obstructive pulmonary disease (COPD) is mainly based on clinical and respiratory function tests (FRT), in particular spirometry. Conventional radiography provides few information on chronic lung disease, while computed tomography is a method that may contribute to the understanding of the pathophysiology, phenotyping of COPD patients and the detection of complications of COPD.

Keywords: COPD, Chest x-ray and CT.

 

 

 

 

Introduction 

La BPCO est une maladie respiratoire chronique fréquente, elle est définie comme une pathologie caractérisée par un syndrome obstructif progressif permanent et incomplètement réversible. Cette définition a comme conséquence de fonder le diagnostic de BPCO sur les épreuves fonctionnelles respiratoires (EFR), en particulier la spirométrie et de supprimer la division en emphysème pulmonaire et bronchite chronique puisqu’ils contribuent conjointement au syndrome obstructif.

Histologiquement le syndrome obstructif de la BPCO est fait d’une altération conjointe, et en proportion variables des petites voies aériennes (bronchiolite obstructive) et du parenchyme pulmonaire (emphysème pulmonaire). Les petites voies aériennes sont définies par un diamètre interne inférieur à 2 mm. Dans la BPCO, leur lumière est réduite et leurs parois épaissies.

La BPCO est une maladie hétérogène avec présentation clinique et profil évolutif très variable. La radiographie conventionnelle apporte peu d’informations sur la bronchopneumopathie chronique, tant pour le versant emphysémateux que bronchique, son utilisation est essentiellement recommandée dans la recherche de pathologies associées ou alternatives. La tomodensitométrie (TDM) est en outre une méthode susceptible de contribuer à la compréhension de la physiopathologie et au phénotypage des patients BPCO.

La radiographie pulmonaire 

La radiographie thoracique n’est ni sensible, ni spécifique et donc elle n’a pas d’intérêt dans le diagnostic positif de la BPCO, souvent normale surtout au stade précoce de la maladie, comme elle peut être trompeuse, et parfois elle peut même être évocatrice et montrer (figure 1) :

Une distension thoracique :

  • Aplatissement des coupoles diaphragmatiques (de profil),
  • Augmentation des espaces clairs, rétro-sternal et rétro-cardiaque (de profil),
  • Augmentation du diamètre thoracique antéro-postérieur = thorax en tonneau (de profil),
  • Horizontalisation des côtes (de face).
  • Une trachée en lame de sabre

Une hyperclarté pulmonaire, qui traduit une diminution de la vascularisation (de face).

Figure 1 : Radiographie du thorax face et profil : Importante distension thoracique avec diaphragme aplati, augmentation des espaces clairs rétro-sternal et rétro-cardiaque, thorax en tonneau, hyperclarté des apex.

La tomodensitométrie thoracique

La tomodensitométrie n’est pas systématique mais c’est l’examen de référence. La TDM est supérieure à la radiographie quant à la détection de l’emphysème, l’évaluation de sa distribution et de son étendue. Quant à la quantification de l’atteinte bronchique des travaux sont toujours en cours.

L’exploration doit se faire en acquisition volumique sans produit de contraste. En cas de suspicion d’HTAP, d’embolie pulmonaire ou de signes d’exacerbation l’injection de produit de contraste se voit nécessaire.

La collimation doit être fine, le temps de rotation court et le pitch élevé. L’acquisition se fait en général en décubitus en apnée inspiratoire, si nécessaire on complète l’exploration par une acquisition en expiration à la recherche de piégeage témoignant d’une atteinte des petites voies aériennes (figure 2). L’Étude se fait en double fenêtrage médiastinal et parenchymateux avec des reconstructions MPR (1mm/10mm), traitement MIP (figure 3) et MINIP (figure 4).

RAD2

Figure 2 : coupes axiale en inspiration à gauche et en expiration droite montrant des zones hyper claires par endroit.

Figure 3 : Coupe axiale TDM en MIP : détection des nodules et inflammation des petites voies aérienne : aspect d’arbre en bourgeon.

Figure 4 : coupe axiale en fenêtre parenchymateuse sans et avec Min IP : visualisation nette de l’emphysème à droite grâce au Min IP.

Au terme de cette exploration un bilan qualitatif et quantitatif peut être réalisé, l’emphysème et le remodelage pariétal bronchique sont associés en proportion très variable suivant les patients.

Au scanner il est important de définir le phénotype emphysémateux prédominant, bronchique prédominant ou mixte.

 

L’emphysème

Il se définit comme l’élargissement permanent et anormal des espaces aériens distaux, au-delà de la bronchiole terminale, accompagné d’une destruction de leur paroi sans fibrose évidente, Il existe plusieurs formes d’emphysème :

  • Emphysème centrolobulaire (figure 4) : est une zone de destruction parenchymateuse au centre du Lobule de Miller de quelques millimètres de diamètre faite de lacunes multiples, sans paroi. L’artère centro-lobulaire est parfois visible au centre du Lobule de Miller, il s’agit d’une destruction hétérogène et prédominante dans les lobes supérieurs des poumons.
  • Emphysème panlobulaire (figure 5) : est fait de vastes plages de destruction parenchymateuse sans limites précises avec raréfaction vasculaire et hyperinflation parenchymateuse donnant des hernies parenchymateuses transmédiastinales. Le reste du parenchyme paraît hyperdense par redistribution sanguine. Des signes indirects comme un cœur en goutte, l’aplatissement, inversion des coupoles diaphragmatiques et aplatissement du médiastin. De siège plutôt lobaires Inférieurs, mais volontiers diffus.
  • Emphysème paraseptal (figure 6) : Lésions destructrices en périphérie dans le Lobule de Miller qui réalisent des microkystes aérique ˂ 1 cm, sous-pleuraux sur une rangée atteignant les sommets, les versants : costal, médiastinal et scissural du parenchyme.
  • Bulles d’emphysème : Formation macro-kystique aérique (> à 1 cm) de taille et forme variables, à parois fines, tassement parenchymateux parfois d’aspect suspect à son contact.
  • La précision de la TDM en haute résolution dans la détection et l’évaluation visuelle de l’étendue de l’emphysème a été évaluée dans plusieurs travaux

RAD5

Figure 5 : Reconstruction frontale : emphysème centro-lobulaire

Figure 6 : coupe axiale en fenêtre parenchymateuse montrant un emphysème paraseptal

Quantification objective de l’emphysème pulmonaire

Les limitations inhérentes aux évaluations visuelles, les valeurs d’atténuation réduites caractéristiques de l’emphysème pulmonaire et la nature digitale des données TDM ont favorisé son utilisation comme outil de quantification objective de l’emphysème pulmonaire. Deux approches ont été proposées : la détermination d’un seuil d’atténuation en dessous duquel l’emphysème est considéré comme présent et la détermination d’un percentile qui reflète au mieux la distribution des valeurs d’atténuation (figures 7 et 8).

Figure 7 : Détection des zones d’hypo atténuation par seuillage de densité automatique.

Figure 8 : Quantification lobaire de l’emphysème.

Le remodelage pariétal bronchique

Le remodelage pariétal bronchique est dû à l’épaississement de l’ensemble des tissus qui entourent les bronches à cause de l’état inflammatoire chronique. Ça peut aller de l’atteinte des petites voies aériennes non visibles mais pouvant avoir comme conséquences un piégeage expiratoire (figure 9), un poumon en mosaïque ou une bronchiolite cellulaire jusqu’à l’atteinte des voies aériennes proximales à type d’épaississement pariétal (figure 10), atteinte trachéale en lame de sabre (figure 11), une CDEVA (collapsus dynamique excessif des voies aériennes) et des diverticules (figure 12).

Les voies aériennes sont des structures dichotomiques composées de branches approximativement cylindriques de diamètre progressivement décroissant du centre vers la périphérie. Avec une lumière centrale remplie d’air bordée d’une paroi d’atténuation solide, les voies aériennes présentent un contraste idéal pour leur étude en TDM.

Les petites voies aériennes, qui ont, par définition, un diamètre interne inférieur à 2 mm, sont le principal site du syndrome obstructif de la BPCO. Malgré l’intérêt croissant pour la mesure des dimensions bronchiques par TDM, l’utilisation de cette technique reste peu répandue dans l’étude de la BPCO.

Figure 9 : coupe TDM parenchymateuse axiale montrant à piégeage expiratoire sous forme de plages hypodenses.

 

Figure 10 : coupe TDM parenchymateuse axiale montrant à gauche une épaisseur normale des bronches contre un épaississement bronchique proximal à droite au cours d’une BPCO.

L’expression des dimensions bronchiques en valeur absolue, en proportion d’une valeur normale prédite, rapportée à un index anthropométrique ou sous forme d’un rapport de deux dimensions (par exemple de la lumière et la paroi) reste à standardiser, et donc jusqu’à ce jour la quantification objective des dimensions bronchiques n’est pas réalisée.

Figure 11 : coupe axiale TDM en fenêtre parenchymateuse montrant une trachée en lame de sabre.

 

Figure 12 : coupe axiale TDM en fenêtre parenchymateuse montrant des diverticules bronchiques.

Le diagnostic des complications

Les pathologies qui provoquent ou simulent une exacerbation sont multiples dont les plus fréquentes sont les pneumonies, les bulles compliquées, le cancer broncho-pulmonaire, les bronchiolites, l’embolie pulmonaire, d’où l’intérêt de rechercher :

  • L’inflammation des petites voies aériennes
  • Des zones de condensations
  • Des nodules suspects
  • Un décollement pleural
  • Et un tronc pulmonaire de calibre élevé

 

Conclusion

La BPCO est une maladie fréquente, source de morbidité (handicap, exacerbations), Le diagnostic et l’appréciation de la sévérité reposent sur l’exploration fonctionnelle respiratoire. La radiographie thoracique est considérée comme le prolongement de l’examen clinique du pneumologue, elle n’est ni sensible, ni spécifique par contre La tomodensitométrie permet la quantification objective de l’atteinte parenchymateuse (emphysème pulmonaire). Des travaux sont en cours afin de valider une technique quantitative pour l’atteinte bronchique. La combinaison de ces deux techniques permettra le phénotypage de la bronchopneumopathie chronique obstructive.

 

 

Liens d’intérêts : Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts.

 

 

 

Références

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Plan de formation des professionnels de santé médicaux à une maladie chronique : « Broncho-pneumopathie chronique obstructive – BPCO »

R. Yakoubi, R. Benali, Pneumologie, Département de Médecine, Faculté de Médecine, Université Badji Mokhtar de Annaba

Date de soumission : 13 février 2021

Résumé : La BPCO, maladie respiratoire chronique à prévalence croissante, à répercussions systémiques et à évolution handicapante est un problème de santé publique. Malgré son impact épidémiologique, elle reste une maladie méconnue, sous diagnostiquée et sous traitée. Devant cette problématique, l’intervention idoine serait une formation pertinente spécifiquement destinée aux médecins généralistes en tant que médecins de premier recours. Elle doit idéalement être réfléchie selon une approche systémique, conçue selon des exigences opérationnelles, animée selon des principes andragogiques et évaluée sur le transfert des acquis en milieu d’exercice témoignant de l’acquisition des compétences. Une formation qui répond aux besoins des patients atteints de BPCO et sert de modèle transposable aux maladies chroniques en général, pour les professionnels de santé.

Mots clés : BPCO, module d’apprentissage, formation, médecin généraliste.

Abstract: COPD, a chronic respiratory disease with increasing prevalence, systemic impact and disability is public health problem. COPD continues to remain an under-known, under-diagnosed and under-treated disease. Faced with this problem, the appropriate intervention is relevant training specifically intended for general practitioners as primary care physicians. It should ideally be thought through a systemic approach, designed according to operational requirements, animated according to andragogical principles and evaluated on the transfer of learning in the middle of the exercise, testifying to the acquisition of skills. Training on COPD that meets the needs of patients with COPD and serves as a model that can be transposed to chronic diseases in general, for healthcare professionals.

Key words: COPD, learning module, training, general practitioner.

  • Maladie chronique, point de départ d’une problématique de santé

La bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO) est une maladie respiratoire chronique caractérisée par l’installation progressive et permanente d’une obstruction des voies aériennes (1). Elle est responsable d’une limitation fonctionnelle respiratoire, d’une limitation des activités et d’une limitation dans la participation sociale (2).

Sa prise en charge s’insère dans un parcours de soins médico-psycho-social (dépendance médicamenteuse, de soins médicaux et paramédicaux, d’une réadaptation, d’une surveillance, d’une assistance personnelle)(1-3-4).

En 2017, 174 millions de personnes étaient atteintes de BPCO (5). La prévalence mondiale de la BPCO a été évaluée entre 4-10% (6) avec une grande variabilité entre les pays, essentiellement liée aux échantillonnages et aux moyens diagnostiques employés (7).

En Algérie, une étude épidémiologique (selon le protocole du Burden Obstructive Lung Disease Initiative-BOLD), a estimé la prévalence de la BPCO GOLD II, III et IV dans la population de 40 ans et plus à 8,8% (8).

En 2015, 3,2 millions de personnes sont décédées de BPCO (9). La mortalité par BPCO représente 5% de la totalité des décès dans le monde (OMS) (10).

En Algérie, la mortalité hospitalière liée à la BPCO a été estimée à 1,3% (11).

La BPCO, souvent diagnostiquée à un stade tardif, « stade de handicap respiratoire », est responsable de l’altération de la qualité de vie des patients ce qui rend sa prise en charge coûteuse (12,13).

En 2015, la BPCO était à l’origine de 2,6% du taux global du nombre des années perdues (Disability Adjusted Life Years – DALYs)(5)

Plusieurs facteurs de risque ont été incriminés dans la genèse de la BPCO mais l’imputabilité du tabac a été invoquée dans 80-85% des cas (14,15).

De par sa prévalence, sa morbi-mortalité, sa charge sociale, sa charge économique et la possibilité d’une action de santé susceptible d’influencer son épidémiologie, la BPCO est considérée comme un problème de santé publique

  • Maladie chronique, point de départ d’un inconfort dans la pratique biomédicale

Un inconfort qui n’est pas spécifique à la BPCO mais plutôt un malaise exprimé par la majorité des praticiens vis-à-vis de toutes les maladies chroniques qui imposent un suivi au long cours.

En effet, en matière de maladies chroniques, la guérison n’est plus la mission du médecin. Son rôle est de favoriser l’adhésion du patient au traitement en vue d’une autonomie par un accompagnement, un partenariat, une alliance thérapeutique, autant de concepts auxquels le praticien n’a pas été formé.

La formation médicale initiale a été focalisée sur l’approche techniciste des pathologies faisant fi des particularités évolutives des maladies chroniques et des patients qui en sont atteints, pour lesquels la participation active et l’éducation deviennent nécessité, exigeant ainsi des praticiens, une posture éducative et une approche managériale tant à l’échelle individuelle que collective.

Le praticien du vingt-et-unième siècle nécessite, au-delà de ses connaissances biomédicales, des compétences centrées sur les besoins de ses patients chroniques et répondant aux contraintes de sa pratique quotidienne. L’approche est globale et uniciste prenant en considérations les différents composantes et leurs interactions : les médicaments, la filière de soins, les acteurs de santé, l’organisation des soins, le vécu du malade, la psychologie, c’est l’approche systémique.

  • Maladie chronique, point de départ d’une réflexion stratégique

La BPCO reste, néanmoins, une pathologie méconnue, sous-estimée, sous diagnostiquée, sous traitée et essentiellement vouée aux soins du médecin spécialiste. (16,53,54,59,60,48). La prise en charge des patients porteurs de BPCO nécessite une filière de soins, multidisciplinaire et médico-sociale, adaptée dont la coordination devrait être assurée par le médecin traitant « médecin généraliste » (208). Ce dernier doit acquérir les compétences nécessaires en harmonie avec son référentiel de métier, pour répondre à la demande de soins des patients atteints de BPCO (209), (210).

Une intervention de santé s’impose (211). À cet effet, plusieurs axes ont été dégagés parmi lesquels figure la formation des médecins généralistes (211), (212). La conception d’un module de formation sur la BPCO, destiné aux médecins généralistes, relève d’une réflexion selon une approche systémique, d’une production basée sur l’ingénierie pédagogique, exploité dans une optique de recherche – action.

Les deux principales actions de santé ciblées par cette démarche de formation visent d’une part à prévenir cette pathologie en agissant sur les facteurs de risque ; et d’autre part à diagnostiquer précocement la BPCO en identifiant les patients suspects de BPCO, puis en les adressant pour confirmation diagnostique. L’efficacité de ces actions ne peut être obtenue que par l’adoption d’une démarche évaluative.

Le médecin généraliste doit adapter une posture managériale pour faire face au profil épidémiologique actuel dominé par les maladies chroniques dont la BPCO en matière de pathologies respiratoires (60), (213).

  • Un continuum d’apprentissage pour un suivi de longue durée des maladies chroniques

En vue d’un changement dans la pratique médicale (330), le plan de formation doit être pensé dans une optique de renforcement des compétences des professionnels de santé. Les praticiens apprenants ont un vécu riche de difficultés pratiques issus d’années d’expériences. Ils sont à la recherche de ressources professionnelles.

La formation doit être fondée sur des valeurs qui favorisent sa pérennisation : l’autonomie, le partage, la réorganisation, la restructuration. Le module d’apprentissage ne doit pas être une finalité en soi mais une activité mutualisée commune à plusieurs maladies qui permettra de renforcer les acquisitions d’autres pathologies. L’expression des objectifs de la formation est le résultat de différents domaines.

  • Vers un médecin gestionnaire d’une maladie chronique

Face aux défis des maladies chroniques, l’accent est mis sur la réorientation des services de santé (14), par l’adoption de nouvelles attitudes en matière d’éducation et de formation professionnelle, recentrées sur les besoins de l’individu identifié dans le cadre de sa communauté.

De par la place qu’occupe le médecin généraliste dans notre système de santé nous l’avons déterminé comme population cible.

C’est dans cette optique que nous avons élaboré une formation spécifiquement destinée aux médecins généralistes en tant que médecins de premier recours. Cette formation a été réfléchie selon une approche systémique, conçue selon des exigences opérationnelles, animée selon des principes andragogiques et évaluée sur le transfert des acquis en milieu d’exercice témoignant de l’acquisition des compétences.

Nous nous sommes fixés comme objectif de travail, de construire un module de formation sur la broncho-pneumopathie chronique obstructive (BPCO) destiné à une population médicale soignante. Notre module visait à produire un professionnel de santé performant, répondant aux besoins des patients atteints de BPCO en agissant sur la maladie tout en tenant compte des particularités du patient identifié dans son environnement. Des qualités, à la fois indispensables pour la prise en charge d’une maladie aussi complexe que la BPCO et transposables au modèle des maladies chroniques en général, ont été ainsi véhiculées au travers de notre module de formation que nous avons volontairement axé sur l’expertise médicale, la communication et la pratique managériale.

Pour ce faire, nous avons:

  • Identifié les besoins de la population, par une enquête transversale auprès de 82 médecins généralistes,
  • Élaboré un référentiel des compétences en tenant compte du rôle d’expertise clinique, rôle de communication et du rôle managérial du praticien.
  • Conçu le module d’apprentissage en déterminant les unités d’enseignements et les crédits et en contextualisant le contenu aux situations cliniques
  • Choisi la stratégie d’apprentissage et diversifié l’apprentissage par le travail en groupe et le travail individuel
  • Validé le module de formation par les experts et une population similaire à la population cible
  • Implanté le module en présentiel et à distance.
  • Évalué le module de formation ; d’une part, par l’évaluation des connaissances et attitudes des participants ; et d’autre part, par l’estimation du transfert et de l’impact de la formation

A l’issue de notre formation, certaines acquisitions ont été enregistrées.

  • Rétablir les lacunes cognitives préalablement identifiées en matière de BPCO.
  • Participer au diagnostic précoce de la BPCO en détectant les cas suspects.
  • Identifier la place de la spirométrie dans le diagnostic et le suivi des patients BPCO.
  • Tracer les grandes lignes de la prise en charge des BPCO, bien que leur pratique sur terrain ne leur donne pas toute liberté.
  • Conclusion 

La BPCO, maladie respiratoire à l’image des maladies chroniques, relève plusieurs problèmes dans sa prise en charge par les médecins généralistes. Ces problèmes sont essentiellement d’ordre organisationnel (l’acquisition des connaissances, leur application, la construction de la fibre relationnelle, l’adoption de la vision managériale …).

La BPCO constitue non seulement un modèle pédagogique d’apprentissage des maladies chroniques, en particulier respiratoires, mais aussi, un modèle de réflexion de santé.

 

 

Liens d’intérêts : Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts.

 

Références

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Étude descriptive de l’artériopathie oblitérante des membres inférieurs chez le coronarien algérien

R. Merghit1, A. Trichine1, M. Aït Athmane2, A.Lakehal3

1 Service de Cardiologie, Hôpital Militaire Ali Mendjli, Constantine,

2 Service de Cardiologie, CHU Ibn Sina de Annaba,

3 Service d’Épidémiologie, CHU Dr Abdesselam Benbadis de Constantine.

 

Abstract: Introduction: lower limb peripheral artery disease (PAD) remains undervalued because of its asymptomatic character and insidious evolution. Aim of our study: is to evaluate the characteristics of lower limb PAD in patients with established coronary artery disease (CAD). Patient and methods: Our study is descriptive, cross-sectional, monocentric carried out in the unit of cardiovascular exploration of the University Hospital of Constantine. The enrolled patients had at least a significant stenosis ≥ 50% on a main epicardial coronary artery, for each patient, an oriented history and cardiovascular clinical examination preceded the measurement of the ABI (Ankle-brachial index). Lower limb PAD was defined as an ABI less than 0.90 on one of the four distal arteries of the lower limbs. Whenever the ABI was in favor of PAD, an arterial lower limbs echo Doppler was performed. Results: 300 patients with established CAD, a mean age of 61 years with male predominance, were included. The frequency of the association lower limbs PAD and coronary artery disease was evaluated at 34.7% using ABI. It was asymptomatic in 18.67% of cases. Infra-popliteal axis involvement was the most common of the lower limb arterial axis followed by femoro-popliteal and then aorto-iliac. Conclusion: Symptomatic or not, more than one patient out of three with established CAD has a lower limb PAD. The dissemination of the use of pocket Doppler device in order to calculate the ABI in patient with CAD will certainly increase the percentage of multivascular patients. this will lead to a modification of the therapeutic strategy which will be more aggressive.

Keywords: ABI, coronary artery disease, frequency, lower limbs, arterial echo Doppler.

Résumé : Introduction. L’artériopathie oblitérante des membres inférieurs (AOMI) reste encore sous-évaluée, car longtemps asymptomatique et d’évolution sournoise. Objectifs : analyser les caractéristiques de l’AOMI chez les patients coronariens. Patients et méthodes : Notre étude est descriptive, transversale, monocentrique réalisée dans l’unité ’explorations cardiovasculaires de l’hôpital universitaire de Constantine. Les sujets inclus avaient aux moins une lésion coronaire significative ≥ 50% sur une artère coronaire principale. Pour chaque patient, une anamnèse orientée et un examen clinique cardiovasculaire ont précédé la mesure de l’indice de pression systolique (IPS). L’AOMI était définie par un IPS inférieur à 0,90 sur une des quatre artères distales des membres inférieurs. À chaque fois que l’IPS était en faveur d’une AOMI, un écho doppler artériel des membres inférieurs (EDAMI) a été réalisé. Résultats : Trois cents patients coronariens, âgés en moyenne de 61 ans, à prédominance masculine, ont été inclus. La fréquence de l’association AOMI et coronaropathie était de 34,7% en utilisant l’IPS, asymptomatique dans 18,67% des cas. L’atteinte de l’axe infra-poplité est la plus fréquente des atteintes des axes des membres inférieurs, suivie par l’atteinte fémoro-poplitée puis aorto-iliaque. Conclusion : L’association AOMI coronaropathie est très fréquente (plus d’un malade sur trois), que l’AOMI soit symptomatique ou non. Grace à une technique simple (doppler de poche) et un temps d’examen court, le dépistage de l’AOMI devient pratique chez les patients à risque Ceci va surement modifier le niveau de risque du patient en augmentant le pourcentage de malades polyvasculaires, ce qui va aboutir à une modification de la stratégie thérapeutique qui sera plus agressive.

Mots clés : IPS, AOMI, coronaropathie, fréquence, écho doppler artériel des membres inferieurs.

Introduction

L’artériopathie oblitérante des membres inférieurs reste souvent ignorée, sous-diagnostiquée, et sous- traitée [1,2]. Elle représente un puissant prédicteur d’événements cardiovasculaires, de mortalité, et un marqueur de sévérité de la maladie athérothrombotique, même lorsqu’elle est asymptomatique [3-5].

La mesure de l’indice de pression systolique (IPS), ou le rapport cheville/bras, constitue une méthode simple, peu onéreuse, qui permet d’appréhender de façon rapide l’état de la perfusion distale des membres inférieurs. Sa diminution témoigne ainsi d’une altération de l’état artériel du patient. De ce fait, l’IPS est un excellent marqueur d’AOMI, bien avant l’apparition d’un retentissement fonctionnel, et aussi un marqueur de risque cardiovasculaire [1,2].

Population et méthodes

Population : Notre étude est observationnelle, descriptive, analytique et monocentrique menée sur un échantillon de 300 malades coronariens avérés, consécutive, entre mars 2016 et juin 2017 au niveau des trois services de cardiologie, des centres hospitalo-universitaires (CHU) de la ville de Constantine, ayant au moins une lésion ≥ 50% sur une artère coronaire principale, quel que soit leur âge et leur sexe, en excluant ceux ayant refusé de participer à l’étude, et les patients en ischémie aiguë des membres inférieurs. Le consentement éclairé et l’engagement du patient pour ce projet sont requis, en respectant l’anonymat.

 

Méthodes : Les patients inclus ont bénéficié d’un recueil des mesures anthropométriques (poids, taille, calcule du BMI), un recueil d’information (facteurs de risque cardiovasculaire FRCV), un examen clinique complet, un bilan biologique incluant le bilan lipidique complet (HDLc, cholestérol total, triglycérides, LDLc), une glycémie à jeun. U

ne mesure de l’index de pression systolique à la cheville (IPSch) en décubitus dorsal, les membres inférieurs et supérieurs dévêtus, chez un patient détendu depuis plus de 10 minutes, par un doppler de poche, de marque EDAN Sonotrax Vascular Lite, muni d’une sonde de 8 MHz mis en marche en 2013, avec un tensiomètre à sphygmomètre de marque RIESTER ont été utilisés. Le brassard est positionné autour de la cheville, avec son bord inférieur en position sus-malléolaire, manchette enroulée sur elle-même, de largeur entre 1,2-1,5 fois le diamètre du segment de membre, les tuyaux sortant vers le haut, la sonde Doppler inclinée, de manière à respecter au mieux un angle de 45 à 60° avec l’axe présumé de l’artère examinée.

Après l’obtention d’un signal Doppler stable, le brassard est gonflé de 20 mm Hg au-delà de la pression de disparition du signal, puis dégonflé lentement de 2 mm Hg par seconde jusqu’à réapparition d’un signal audible. La valeur retenue équivaut à la pression artérielle systolique de cheville. Les artères enregistrées sont classiquement, pour chaque membre inférieur, l’artère tibiale postérieure dans la gouttière rétro- malléolaire, l’artère pédieuse au niveau du coup de pied [6].

La manœuvre est réalisée à deux reprises sur chaque membre ; à chaque bras, le signal Doppler est capté au niveau huméral ou radial, avec le brassard positionné comme lors d’une mesure de la PA habituelle. Nous avons choisi la méthode la plus sensible pour calculer L’IPS ; c’est à dire le rapport entre le plus bas niveau de pression systolique (ATP, ADP) sur la pression systolique brachiale la plus élevée des deux bras. L’IPS été calculé pour chacune des artères de chaque membre [7]. L’index le plus bas des deux membres inférieurs est celui qui est considéré, posant le diagnostic d’AOMI s’il est inférieur ou égal 0,9 en présence ou en absence de symptomatologie. Si IPSch est limite entre 0,91 et 0,99 ; une épreuve hémodynamique de marche sur tapis roulant (épreuve de Skinner Strandness) avec prise des pressions distales au repos et après effort a été indiquée à la recherche d’une AOMI infra clinique, dont le diagnostic est retenu chaque fois que la pression distale chute d’au moins 20% dès la première minute après l’arrêt de l’effort. Dans le cas où l’IPSch est strictement supérieur à 1,3 ; un complément d’exploration hémodynamique par la mesure de l’index de pression systolique au gros orteil (IPSo) pour chaque membre à l’aide d’un photopléthysmographe ; l’IPSo représente le rapport entre la pression systolique du gros orteil et la pression systolique brachiale la plus élevée, un IPSo ≤ 0,7 est en faveur d’une AOMI.

A chaque fois que l’IPS était en faveur d’une AOMI, un écho doppler artériel des membres inférieurs (EDAMI) a été réalisé par un échographe vividE9 General Electric mis en marche en janvier 2014, en utilisant une sonde à balayage linéaire 12L, destinée à l’exploration vasculaire périphérique. Elle permet d’obtenir un dépistage ciblé et d’avoir un descriptif lésionnel précis.

Cette exploration concerne l’ensemble de l’arbre artériel. Dans chaque territoire, l’exploration est réalisée chez un patient au repos, en décubitus et systématisée suivant un protocole spécifique pour chaque territoire. Pour chaque étage (aorto-iliaque, fémoral, poplité, infra-poplité), nous avons relevé la présence ou non d’une lésion hémodynamique≥ 50% en se basant sur les critères vélocimétriques (mesure de la vélocité systolique (PVS) et du rapport des vélocités en doppler pulsé, au site de la sténose et en amont ; à l’étage iliaque, pour une sténose ≥ 50%, un PSV > 200-250 cm/s, et un ratio PSV > 2-2,5 [8] ; à l’étage sous-inguinal, un ratio supérieur à 2,5 à 3 est généralement admis pour différencier les sténoses de plus de 50% [8].

 

Analyse statistique : Les données des patients ainsi que l’ensemble des examens ont été réalisés par le même cardiologue (investigateur principal), par la suite enregistrés initialement sur une fiche de données établie à cet effet, transférés plus tard dans une base de données (fichier EXCEL 2013) conçue dans le même but. L’analyse statistique est effectuée à l’aide du logiciel SPSS 22. Les résultats sont présentés avec des intervalles de confiances à 95%, sous forme de moyenne, médiane, écart-type, et les valeurs minimums et maximums, pour les variables quantitatives. Sous forme de pourcentages avec leur écart-type pour les variables qualitatives. La fréquence observée est calculée par le nombre de coronariens présentant une AOMI, sur le nombre total de la population recrutée, évaluée avec un intervalle de confiance de 95%. Les tests de comparaison utilisés sont :

  • Le test du Chi-deux de Pearson et le test exact de Fisher pour les comparaisons de pourcentages
  • Les tests de Student ou de Mann-Whitney pour les comparaisons de
  • Le seuil de significativité statistique est considéré atteint quand le risque d’erreur est inférieur à 5% (p<0,05).

Résultats

Nous avons inclus 300 malades coronariens (Tableau 1). L’âge moyen de cette population était de 61,3 ± 11,3 ans avec des extrêmes d’âge allant de 23 à 85 ans, et une médiane de 62 ans, à prédominance masculine significative (78,3%), cette population était relativement mince (BMI moyen 27,92 ± 4,66 kg/m2 ; Tour de taille moyen 95,55 ± 11,20 cm). La majorité de nos coronariens cumulent plus de trois FRCV (72,7%). Les FRCV prédominants étaient l’âge (69%), suivi par l’HTA (58,7%), la dyslipidémie (58,3%) et le diabète (47,3%). Les FRCV les moins observés étaient le tabagisme actif (32,3%), l’obésité (29,3%), et la coronaropathie familiale (26,4%). Le diabète s’associe respectivement à l’HTA et la dyslipidémie dans 36% et 47,3% des cas ; la triple association est observée dans 37,7%.

Pour un effectif de 300 malades et sur la base de quatre IPS pour chacun d’entre eux, nous avons totalisé 1200 IPS dont l’’IPS moyen était de 1,07 ± 0,26 du côté droit et de 1,08 ± 0,24 du côté gauche. Le profil IPS selon le TASCII et l’AHA [9] était normal chez 44,7%, IPSch ≤ 0,9 évoquant une AOMI chez 17,3%, un IPSch douteux chez 17%, un IPSch > 1,3 évoquant une incompressibilité artérielle chez 21%.

Après mesure de l’IPSch d’effort dans les situations où l’IPSch est douteux (0,9<IPS<1), et mesure de l’index de pression systolique au gros orteil dans les situations où l’IPSch est >1,3. Le profil IPS définitif de notre population est résumé dans le tableau 1.

Au total, l’IPS était pathologique chez 129 coronariens, représentants une fréquence de 43% de la population globale. La fréquence de l’association AOMI et coronaropathie, diagnostiquée à l’aide de l’index de pression systolique (IPS) est de 34,7% ± 5,3 ; IC à 95% (29,3% – 40%). Cette population est composée donc de 104 malades dont 48 avec AOMI symptomatique et 56 avec AOMI asymptomatique. La fréquence de l’AOMI symptomatique était de 16%, et la fréquence de la claudication intermittente des membres inférieurs selon le questionnaire d’Édimbourg de 11,67%. L’apport de l’examen clinique était pauvre retrouvant une diminution ou abolition des pouls (11%) et une auscultation pathologique dans 7,34%.

Tableau 1 : Caractéristiques de notre population globale

VARIABLES Population globale (n%)300 patients Coronariens sans AOMI associée (n%)196 patients coronariens avec AOMI associée (n%)104 patients P
Âge moyen 61,3 ± 11,3 58,14±11,3 67,24±8,4 P<0,001
Sexe ratio H/F 3,6 3,1 4,2 P= 0,012
Nombre moyen de FRCV 4,09±1,04 3,95±10 4,5±2 P<0,001
HTA 176(58,7%) 98(50%) 78(75%) P<0,0001
Dyslipidémie 175(58,3%) 101(51,5%) 74(71,2%) P<0,0001
Diabète 142(47,3%) 81(41,3%) 68 (65,4%) P<0001
Tabagisme actif 97(32,3%) 49(25%) 48(46,2)% P<0,001
Obésité 88(29,3%) 78(39.8%) 10(9.6%) P<0,0001
Coronaropathie familiale 79(26,4%) 51(26,0%) 28(26,9%) P=0,5
Claudication intermittente 35(11,67%) 5(2,6%) 30(28,84%) P<0,0001
Douleur de repos 10(3,34%) 02(1,02%) 8(7,70%) P<0,0001
Trouble trophique 3(1%) 01(0,5%) 3(2,9%) P<0,0001
Anomalies de la palpation des pouls 33(11%) 08(4,1%) 25(24%) <0,0001
Anomalie de l’auscultation artérielle 22(7,33%) 04(2,04%) 18(17,3%) <0,0001
IPS moyen A droite   : 1,07 ± 0,26A gauche : 1,08 ± 0,24 A droite : 1,12± 0,1A gauche :1,13 ± 0,31 A droite   : 8,07 ± 0,16A gauche : 8,01 ± 0,20 <0,0001
AOMI isolée(IPSch ≤ 0,9) 52 (17,33%)
AOMI associée à une media calcose(IPSch > 1,3 et IPSo ≤ 0,7) 38 (12,7%)
AOMI infra clinique(0,9<IPSch < 1 au repos et IPS < 0,9 après effort) 14 (4,67%)
Absence d’AOMI(0,9 ≤ IPSch ≤ 1,3 et épreuve de strandness normale) 171 (57%)
Mediacalcose isolée(IPSch > 1,3 et IPSo > 0,7) 25 (8,33%)

 

La répartition de l’ensemble des lésions hémodynamiques sur les différents axes artériels des membres inférieurs a montré que L’atteinte de l’axe infra-poplité est la plus fréquente des atteintes des axes des membres inférieurs. Les lésions hémodynamiques de l’étage aorto-iliaque ont concerné 20 malades (19,23%). Les lésions hémodynamiques de l’étage fémoro-poplité ont concerné 72 malades (69,23%), et les lésions hémodynamiques de l’étage infra-geniculaire ont concerné 82 malades (78,84%).

Cinquante-trois patients (51%) ayant une AOMI ne présentaient de lésions qu’à un seul des trois niveaux considérés initialement dont l’étage aorto-iliaque 13 malades (12,5%) l’étage fémoro-poplité 15 malades (14,42%) et l’étage infra-geniculaire 25 malades (24,03%).

L’analyse des facteurs de risque influençant la topographie des lésions athéromateuses hémodynamiques (Tableau 2) a montré que les facteurs significativement associés à l’atteinte de l’étage iliaque étaient un âge moyen plus bas que celui des autres malades présentant une atteinte de l’étage fémoro-poplité ou infra-geniculaire (64,14±8 versus 68,33±8,82 ; p value<0,05), le sexe masculin prédomine dans cette localisation (95,5% des malades présentant une localisation iliaque étaient de sexe masculin contre 84,52% de malades, ne présentant pas d’atteinte à cet étage avec une différence significative p value <0,05). Le tabac, actif ou ancien, était fortement corrélé à cette atteinte (94,0% versus 70,23% p value <0,05). Cependant, d’autres facteurs influencent l’atteinte de l’étage infra-poplité : L’âge moyen de ces malades était plus élevé par rapport à l’âge moyen des malades ne présentant pas d’atteinte athéromateuse à cet étage (68,46±8,35 versus 64,41±8,68 ; p value < 0,05).

Le sexe féminin (14,6% versus 9,1% ; p value <0,05), le diabète, significativement associé à la localisation distale (70,7% versus 45,5% ; p value <0,05), l’HTA (85,3% de malades ayant une localisation infra-poplitée étaient hypertendus, contre 36,36% ; p value <0,05), la dyslipidémie (76,8% versus 50,0% ; p value <0,05). L’insuffisance rénale sévère (4,9% versus 3,5% ; p value <0,05).

Tableau 2 : Distribution des FRCV en fonction de la présence de l’AOMI à chaque étage

 *P< 0,05 Aorto iliaque Fémoro poplitée Infra poplitée Population AOMI (N=104)
Oui (n=20) Non (n=84) Oui (n=72) Non (n=32) Oui (n=82) Non (n=22)
Âge Moyen 64,14±80* 68,33±8,82 64,46±8,70 69,00±7,23* 68,46±8,35* 64,41±8,68 67,24±8,4
Sexe Masculin 19(95,0%)* 71(84,52%) 63(87,5%) 27(84,4%) 70(85,4%) 20(90,9%) 90(86,5%)
Sexe Féminin 1(0,5%) 13(15,47%) 9(12,5%) 5(15,6%) 12(14,6%)* 2(9,1%) 14(13,5%)
Tabac 19(94,0%)* 59(70,23%) 54(75,0%) 24(75,0%) 59(72,0%) 19(86,4%)* 78(75,0%)
Tabac actif 13(63,8%)* 35(41,67%) 34(63,0%) 14(58,3%) 35(59,3%) 13(68,4%) 48(61,5%)
Diabète 11(54,0%) 57(67,85%) 49(68,1%) 19(59,4%) 58(70,7%)* 10(45,5%) 68(65,4%)
HTA 12(60,0%) 66(78,57%) 52(72,2%) 26(81,3%) 70(85,3%) * 8(36,36%) 78(75,0%)
Dyslipidémie 14(70,0%) 60(71,42%) 49(68,1%) 25(78,1%) 63(76,8%)* 11(50,0%) 74(71,2%)
IR sévère 0(0,0%) 5(5,95%) 3(4,2%) 2(6,3%) 4(4,9%)* 1(3,5%) 5(4,8%)

 

Discussion

L’IPS représente la méthode d’exploration la plus simple et la plus répandue, pour le diagnostic de l’AOMI, en complément immédiat de l’examen clinique, qui a radicalement transformé la vision de l’AOMI basée sur l’évaluation de la claudication intermittente. La relative simplicité de ce test, son moindre coût et sa haute sensibilité semblent intéressants pour la détection de l’AOMI dans des populations pauci- ou asymptomatiques. Durant notre étude, a été considéré comme artéritique, tout patient symptomatique ou asymptomatique, avec l’un des critères suivants :

  • Un IPSch ≤ 0,9 au repos
  • Un IPSch ≤ 0,9 après sensibilisation à l’effort (test de Skinner Strandness positif)
  • Un IPSo≤0,7 chez un malade ayant un IPSch > 1,3.

En se basant sur ces conditions, la fréquence de l’association coronaropathie et AOMI était de 34,7% ± 5,3 ; IC à 95% (29,3% – 40%). Dans la littérature, cette fréquence est très supérieure à celle de la population générale (6 à 39% versus 0,8 à 6,9%) [10], atteignant 25 à 40% chez les malades coronariens [11]. Notre fréquence est nettement supérieure à celle des études ayant introduit l’IPS comme moyen diagnostique, mais définissant une AOMI seulement par un IPSch de repos strictement inférieure à 0,9 (IPSch de repos <0,9), sans complément de mesure par les tests physiologiques qui sont la mesure de l’IPSo en cas de mediacalcose et la recherche d’une AOMI infraclinique dans les cas limites (IPSch de repos entre 0,91-0,99), des études telles que l’étude internationale CAPRIE en 1996 [12], incluant près de 20.000 patients ; 15,2% des patients ayant une pathologie coronarienne étaient artéritiques et le registre Monica-Toulouse en 1998 [13], mené sur 4.368 malades et qui a consisté à évaluer la prévalence de l’AOMI et sa valeur pronostique chez des patients hospitalisés, pour un épisode coronarien aigu en France retrouvait 18,8%. Des résultats similaires ont été signalés dans l’étude PARTNERS en USA 1999 [5], la fréquence était de 15% sur un échantillon de 10.000 coronariens. En revanche, la plus faible fréquence était observée pour Al-Thani en 2011 [14], dans le registre « the Gulf Register » incluant 6 pays du Moyen-Orient, avait retrouvé une prévalence de 2,6% chez les 6.705 patients hospitalisés dans 46 centres de cardiologie pour un syndrome coronarien aigu, sur la base d’un IPS inférieur à 0,80. Le seuil bas de l’IPS pris comme définition de l’AOMI par l’auteur, et des taux très élevés de diabète dans cette population avoisinant 70%, expliquerait cette faible prévalence.

Notre fréquence de 34,7% se rapprochait de celle retrouvée dans la plupart des études ayant utilisé l’arsenal diagnostique complet de l’AOMI (un IPSch inférieur ou égal à 0,9 ; en recherchant une AOMI associée à une mediacalcose, par écho-doppler vasculaire ou mesure de l’IPSo et une AOMI infra clinique par mesure de L’IPS d’effort) comme : Le registre PAMISCA en 2007 [15], étude espagnole ayant pour but d’étudier la prévalence de l’AOMI chez 1.410 patients âgés de plus de 40 ans, hospitalisés pour un syndrome coronarien aigu, l’IPS a permis de diagnostiquer l’AOMI dans 39,8% des cas, dont 26,7% étaient une AOMI asymptomatique. L’étude Ipsilon en 2009 [16], réalisée sur 1.340 coronariens Français, la prévalence globale de l’AOMI a été de 26,6%, asymptomatique dans plus de la moitié des cas. Khellaf en 2013 [17], dans une étude algérienne sur la prévalence de l’AOMI chez le coronarien, révélait une prévalence de 29,7. Pour Rada en 2016 [18], dans son étude marocaine sur 370 sujets à haut risque cardiovasculaire ayant participé à l’enquête sur la prévalence de l’AOMI chez les coronariens, la fréquence de l’association était de 28,3%, chez les coronariens ; 44,5% chez les patients ayant une atteinte cérébrovasculaire, et 25,2% chez les patients ayant seulement des FRCV.

Dans notre série, l’AOMI était symptomatique dans seulement 16% des cas, dont 11,6% présentaient une claudication intermittente des membres inférieurs selon le tableau 3. Nos résultats se rapprochent de ceux rapportés dans la littérature comme : Lacroix et al [19], Khellaf et al. [17], l’étude IPSILON [16], Belhadj [20], Alzamora et al. [21], Kessal et al. [22], Boccalon et al. [23], et Zekri et al. [24].

Tableau 3 : Fréquence de la claudication intermittente (CI) dans la population des coronariens

Étude/1er auteur Fréquence de la CI dans la population globale
Lacroix et al [19] 2002 (France) 11%
Khellaf et al [17] 2013 (Algérie) 10,11%
Étude epsilon [16] 2009 (France) 21.3%
Alzamora et al [21] 2010 (étude Perart/Artper Espagne) 10,81%
Kessal et al [22] 2012 (Algérie) 10,32%
Notre étude 2017 (Algérie) 11,6%

Dans notre étude, une anomalie de l’examen clinique n’a été notée que dans 18,3% (11% une palpation pathologique et 7,3% une auscultation pathologique). Cette constatation s’aligne avec les données de la littérature confirmant le faible apport de l’examen clinique dans le diagnostic de l’AOMI, comme Belhadj et al. [20] (faible sensibilité de l’examen clinique par rapport à l’IPS, sensibilité 52,5%, spécificité de 86%), Kessal et al. [22] (faible apport de la palpation dans l’AOMI, pathologique dans seulement 2,09%), et l’étude IPSILON [16] (examen physique anormal dans 28,1%).

Cette fréquence élevée de l’AOMI asymptomatique dans notre série (18,67%) s’expliquerait par le fait qu’elle soit souvent sous-estimée chez les coronariens. Les patients sont souvent asymptomatiques, car la coronaropathie limite souvent leurs activités physiques. Par conséquent, une approche systématique avec mesure d’IPS pourrait conduire à une meilleure identification de l’AOMI chez cette catégorie de patients.

Nous retrouvons qu’il existe une atteinte distale plus fréquente que proximale chez notre population, Ceci a été démontré dans d’autres études récentes comme le travail de Deneuville et al. en 2008 [25], comprenant 754 patients, axé sur la description de l’AOMI du sujet Antillais (France) par analyse d’une base de recrutement chirurgical, qui a montré que les lésions hémodynamiques affectaient l’étage infra-poplité dans 86% des cas, l’axe fémoro-poplité dans 51%, mais dans 7% des cas seulement l’étage aorto-iliaque ; le registre COPART en 2013 [26], 60,2% des patients du CHU de Toulouse et 73,5% des patients des CHU de Bordeaux et Limoges ont une atteinte infra-poplitée, et en 2014, Lavinia Belaye [27], dans un travail visant à identifier la localisation prédominante de l’AOMI, et les FRCV influençant sa topographie, retrouvait la prédominance de l’AOMI distale sur les 268 patients inclus, 84,70% patients avaient une localisation infra-poplitée, et respectivement une localisation poplitée 55,22%, fémorale 69,02% et aorto iliaque 42,91%.

Il ressort aussi de notre étude que le tabac est fortement associé à l’atteinte aorto-iliaque, les patients sont souvent de sexe masculin et plus jeunes que les autres porteurs de localisations fémorales/poplitées ou infra-géniculées. Inversement, les patients présentant des lésions plus distales, sont souvent de sexe féminin, diabétiques, hypertendus et l’insuffisance rénale est fréquente.

Nos données transversales concernant l’association entre les facteurs de risque et la localisation de l’AOMI sont conformes avec plusieurs rapports comme celui de Lord et al. [28] en 1965, de Strandness et al. [29] en 1988, Tunis et al. [30] en 1993, et Vogt et al. [31]. Aboyans et al. en 2006 [32], dans une étude longitudinale révèlent que les FRCV traditionnels contribuent différemment à la progression de l’AOMI, selon que celle-ci ait touché les petits ou les gros vaisseaux. Le tabac, la dyslipidémie, et l’inflammation étaient incriminés dans la progression de l’AOMI des gros vaisseaux, en revanche, le diabète était le seul facteur incriminé dans la progression de l’AOMI des petits vaisseaux. Pour Aboyans et al., en 2009 [33], dans une série de 681 patients ayants une AOMI, les facteurs associés à l’atteinte aorto-iliaque étaient le tabac (P<0,0001), et le sexe masculin (P<0,001). Les facteurs associés à la localisation distale étaient le diabète (P<0,0001), et à un degré moindre l’HTA et l’insuffisance rénale sévère. Lavinia en 2014 [34], dans un travail visant à identifier la localisation prédominante de l’AOMI et les FRCV influençant la topographie en France, retrouvait plus de patients tabagiques ayant une atteinte avec retentissement en aorto-iliaque (p<0,05) et fémoral (P<0,05) que des patients non tabagiques, et plus de patients diabétiques ayant une atteinte infra-poplitée avec retentissement (P<0,05) que chez les non-diabétiques.

Conclusion

De par son caractère diffus et ubiquitaire, la maladie athérothrombotique impose une prise en charge globale du patient car longtemps, les manifestations cliniques de l’athérothrombose (infarctus, accident vasculaire cérébral etc.), ont été traitées de façon isolée et cloisonnée, mais aujourd’hui, la vision moderne décrit une maladie systémique, qui peut potentiellement toucher plusieurs artères à la fois, ce qui justifie un bilan d’extension minimum sur les trois territoires majeurs : coronaire, cérébrovasculaire et périphérique ; ceci grâce aux progrès des méthodes d’investigations, notamment non invasives, incitant à une recherche quasi systématique de la maladie athéromateuse et au traitement préventif des lésions silencieuses.

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Peut-on parler de contrôle dans la BPCO ?

La BPCO est une maladie chronique globale, générale, à expression pulmonaire dont l’évolution est rythmée par des poussées d’exacerbations. Malgré les progrès scientifiques accomplis ces dernières années

 

 F. Atoui, R. Yakoubi, R. Benali, Faculté de Médecine, Université Badji Mokhtar Annaba.

Date de soumission :  14 Mars 2021

Résumé : La BPCO est une maladie chronique globale, générale, à expression pulmonaire dont l’évolution est rythmée par des poussées d’exacerbations. Malgré les progrès scientifiques accomplis ces dernières années, le paradoxe est que la BPCO continue à être méconnue et sous-évaluée par le médecin, par le patient lui-même et par l’opinion publique. Les prévisions pour le futur sont une augmentation graduelle de la maladie et de la mortalité, due à la persistance de l’habitude de fumer, à l’accroissement de la moyenne d’âge de la population et du risque de pollution ambiante. Informations et préventions des facteurs de risque, diagnostics précoces et traitements adaptés aux plus récents acquis scientifiques, éducation du patient et de la famille, réhabilitation et continuité de l’assistance sociale et sanitaire sont aujourd’hui les pivots pour contrecarrer les conséquences de la maladie en termes de survivance, de qualité de vie et de coûts socioéconomiques. La mortalité et le fardeau socio-économique de la BPCO, associés aux souffrances individuelles, mettent ainsi en relief la nécessité d’un diagnostic précoce et d’une prise en charge efficiente. En matière de BPCO, différentes variables fonctionnelles peuvent prédire l’amélioration symptomatique, d’autres critères seront eux, prédictifs de déficience. Au final , existeraient-ils des paramètres sur lesquels il nous serait possible d’établir un « contrôle » de la BPCO ?

Mots clés : BPCO, contrôle, maladie respiratoire, atteinte multiviscérale.

Abstract: COPD is a chronic, global, general pulmonary disease, the course of which is punctuated by flares of exacerbations. Despite the scientific progress made in recent years, the paradox is that COPD continues to be unrecognized and undervalued by the doctor, the patient himself and the public. Predictions for the future are a gradual increase in disease and mortality, due to the persistence of the smoking habit, the increase in the average age of the population and the risk of environmental pollution. Information and prevention of risk factors, early diagnoses and treatments adapted to the most recent scientific knowledge, patient and family education, rehabilitation and continuity of social and health assistance are today the linchpins for countering the consequences of the disease. in terms of survival, quality of life and socioeconomic costs. The mortality and socio-economic burden of COPD, associated with individual suffering, thus underscore the need for early diagnosis and efficient management. With regard to COPD, different functional variables can predict symptomatic improvement, other criteria will be predictive of impairment. In the end, would there be parameters on which we could establish a “control” of COPD?

Key words: COPD, control, systemic disease, respiratory disease, multiorgan disease.

La BPCO est une maladie chronique et obstructive diffuse des bronches et des poumons.

Malgré les progrès scientifiques accomplis ces dernières années, le paradoxe est que la BPCO continue à être encore aujourd’hui une maladie peu visible, sous-évaluée par le médecin, par le patient lui-même et par l’opinion publique.

Les prévisions pour le futur sont une augmentation graduelle de la maladie et de la mortalité, due à la persistance de l’habitude de fumer, en particulier pour les femmes, à l’accroissement de la moyenne d’âge de la population et du risque de pollution ambiante.

Informations et préventions des facteurs de risque, diagnostics précoces et traitements adaptés aux plus récents acquis scientifiques, éducation du patient et de la famille, réhabilitation et continuité de l’assistance sociale et sanitaire sont aujourd’hui les pivots pour contrecarrer les conséquences de la maladie en termes de survivance, de qualité de vie et de coûts socioéconomiques.

 

Certaines questions restent cependant encore sans réponses, à savoir :

  • Comment poser le diagnostic de BPCO, dans la pratique ?
  • Quel est l’apport de la division en stades pour l’approche thérapeutique ?
  • Quel est le premier choix médicamenteux pour les différents stades de la BPCO stable, et quel est le mode d’administration efficace des médicaments ?
  • Quel est le rôle des thérapies non-médicamenteuses dans la BPCO ?
  • Peut-on contrôler la BPCO ? Ou quelle est la validité du contrôle BPCO ?
  • Quels seraient les critères de contrôle de la BPCO ?

Dans le monde, La BPCO est une charge sociétale importante avec ses 2,5 millions de décès annuels. Elle occupera désormais dans le monde, la troisième place en matière de mortalité d’ici 2020 (données OMS).

La mortalité et le fardeau socio-économique de la BPCO, associés aux souffrances individuelles, mettent en relief la nécessité d’un diagnostic précoce et d’une prise en charge efficiente.

Un résumé quantitatif de la prévalence de la BPCO fournit la première estimation de haute qualité dans l’important sous-groupes d’âge, état tabagique et sexe.

Les données suggèrent ainsi que la prévalence de la BPCO, selon sa définition physiologique chez l’adulte de plus de 40 ans, était de 9 à 10%.

Buist et coll. rapportent une prévalence de la BPCO beaucoup plus élevée que celle rapportée auparavant :

  • Ainsi, de 11,4% le stade I du GOLD serait passé à 26,1% (Cette prévalence étant généralement plus élevée chez l’homme que chez la femme, et variant grandement à travers les sites d’étude (FEV1; FVC)).
  • Quant au stade II, la prévalence serait passée de 10,1% à 11,8%.

L’évolution en matière de BPCO a aussi eu des répercussions sur la définition de cette maladie.

On ne dit désormais plus : “les” BPCO qui regroupaient un ensemble hétérogène comprenant la bronchite chronique, l’emphysème et l’asthme chronique. La définition se restreint aujourd’hui à : “la” BPCO qui devient une entité unique, caractérisée par une limitation chronique et progressive, incomplètement réversible des débits aériens essentiellement due à une Inflammation provoquée par des aéro-contaminants dont le chef de fil est le tabac.

Les tentatives disparates en matière de définition et de prise en charge font que nous avons actuellement fort besoin d’une standardisation de la BPCO.

 

Pourquoi ce besoin en standardisation ?

Non seulement pour optimiser la prise en charge à l’état de base et en urgence, mais aussi pour guider les praticiens sur les thérapies médicamenteuses et non-médicamenteuses appropriées et faciliter la conception de nouveaux agents.

La Broncho-Pneumopathie Chronique Obstructive (BPCO) est une maladie évitable et traitable avec quelques effets extra pulmonaires pouvant contribuer à sa sévérité chez certains patients.

En effet, la BPCO revêt une nature multidimensionnelle avec des effets systémiques et fonctionnels ayant des répercussions directes sur la qualité de vie.

La BPCO est une maladie globale, générale, à expression pulmonaire dont l’évolution est rythmée par les différentes poussées d’exacerbations.

Une exacerbation de BPCO, étant définie comme « un évènement de l’histoire naturelle de la maladie, caractérisée par une modification de l’état de base de la dyspnée, toux et/ou expectorations, motivant une modification de la thérapeutique chez un patient ayant déjà un traitement de fond pour sa BPCO ».

En effet, dans un premier temps, il y a retour à l’état de base, puis la détérioration s’installe et l’état général s’altère.

C’est ainsi que d’une déficience locale, la BPCO évolue vers une incapacité générale se soldant à la fin par un handicap psycho-social.

 

Comme l’asthme, la BPCO est une maladie chronique. A la différence que, dans la BPCO, le traitement, essentiellement représenté par les bronchodilatateurs administrés par voie inhalée, a pour objectifs de :

  • Prévenir l’aggravation
  • Soulager les symptômes
  • Améliorer la tolérance à l’exercice
  • Améliorer la qualité de vie
  • Prévenir et traiter les complications
  • Et réduire la mortalité

Tandis que dans l’asthme, l’objectif du traitement et d’obtenir le meilleure niveau de contrôle, lui-même défini selon certains critères.

Le mot « contrôle » découle du langage militaire contre rôle signifiant : Vérifier l’exécution des tâches assignées, en notant l’absence ou la présence de certains signes permettant de tirer des conclusions en vue d’une décision.

 

En matière de BPCO, différentes variables fonctionnelles peuvent prédire l’amélioration symptomatique. Ce sont :

  • Le VEMS
  • La CVF, la CVL
  • La CRF de repos et d’exercice
  • Le DEM50
  • Le VIMS

 

Certains critères sont prédictifs de déficience :

  • La fonction pulmonaire
  • La capacité d’exercice
  • L’état de santé

 

Quels seraient les critères de mesure de la BPCO ?

Il serait judicieux d’apprécier :

 

  • Des paramètres respiratoires tels que :
    • Le VEMS
    • La dyspnée

 

  • Des paramètres évaluant la qualité de vie, tel que :
    • Le questionnaire de St Georges QRSG
  • Des paramètres évaluant la tolérance à l’effort, tel que
    • Le test de marche de 06 minutes
  • Des paramètres évaluant l’état général, tel que :
    • L’IMC (BMI)
  • Que seraient les paramètres à mesurer ?
    • Le VEMS et son déclin
    • La distension thoracique
    • La dyspnée
    • La capacité d’exercice,
    • La qualité de vie
    • Le nombre d’Exacerbations
    • La mortalité

 

Qu’en est-il de la sévérité ?

Elle est basée sur des paramètres traduisant une perte de structure du corps ou de fonction. Selon le « GOLD », la BPCO peut être divisée en 04 stades de sévérité fonction des variations du VEMS.

Un indice prédictif de mortalité est établi : c’est l’index de BODE, divisé en 04 quartiles, et basés sur des critères cliniques (BMI, dyspnée), fonctionnels (VEMS) ainsi que sur des données concernant l’évaluation de la qualité de vie et de la capacité à l’effort.

La qualité de vie appréciée par le questionnaire de Saint-Georges Hospital note 03 niveaux d’altération : léger, modéré et sévère.

 


Comment peut- on mesurer les exacerbations de la BPCO ?

  • Accélération du déclin du VEMS
  • Détérioration de la qualité de vie.
  • Augmentation des coûts directs.
  • Augmentations des hospitalisations.
  • Augmentation de la mortalité

 

Au final, sur quels paramètres serait-il possible d’établir un « contrôle » de la BPCO ?

  • L’état fonctionnel respiratoire.
  • L’état de santé.
  • La tolérance à l’effort.
  • Et la qualité de vie.

 

Conclusion

  • Manque de preuves pour construire les critères
  • Meilleur état ????
  • Absence de médicaments de l’arrêt du déclin
  • Le but du meilleur contrôle peut être un objectif
  • L’amélioration de qualité de vie passe par un effet sur :
    • La dyspnée (origine respiratoire ou déconditionnement)
    • Les exacerbations
  • Ces données justifient une détection précoce

 

 

 

Liens d’intérêts : Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts.

 

Références

 

  • Contrôle de l’asthme ; Recommandations pour le suivi médical des patients. ANAES/AFPSS Septembre 2004
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  • Prof Dr Guy Joos, COPD GOLD guidelines, Dept Respiratory Diseases Ghent University Hospital.
  • Chronic obstructive pulmonary
  • Disease Management of chronic obstructive pulmonary disease in adults in primary and secondary care
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  • Respir. Mon, 2006, 38, 7–23. Printed in UK – all rights reserved. Copyright ERS Journals Ltd 2006; European Respiratory Monograph;
  • ISSN 1025-448x.
  • Acute Exacerbations of Asthma

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Agressivité et violence : la dimension sociologique

Les différents courants de pensée sociologique sur la violence et l’agressivité des humains, sont variés et contradictoires dans leur approche théorique et leur analyse de la violence et de l’agressivité.

S. Benakila, EHS de Psychiatrie Drid Hocine, Alger

Résumé : Les différents courants de pensée sociologique sur la violence et l’agressivité des humains, sont variés et contradictoires dans leur approche théorique et leur analyse de la violence et de l’agressivité. Pour les fonctionnalistes : la diminution de la capacité d’ajustement ou d’adaptation d’un groupe à son environnement, appelle à une nécessite de dédifférenciation qui passera obligatoirement par des conflits et des guerres. Pour les systémiciens, la violence est liée au changement nécessaire à un système pour sa survie face aux modifications de son extérieur.

Aussi pour la pensée marxiste, la transformation sociale passe par un affrontement des classes antagonistes et donc par une violence. Quand la violence se conjugue au pluriel, elle donne naissance aux agressions de masse, qui peuvent s’expliquer par la thèse de l’homicidologie. Quand en plus, elle a lieu dans un espace publique, elle produit émeutes et vandalisme.

Mots clés : Violence, agressivité, agression, émeute.

Abstract: The different currents of sociological thought on the violence and aggressiveness of humans are varied and contradictory in their theoretical approach and their analysis of violence and aggression. For functionalists: the reduction in the ability of a group to adjust or adapt to its environment calls for a need for de-differentiation which will inevitably involve conflicts and wars. For systemicists, violence is linked to the change necessary for a system to survive in the face of changes in its exterior. Also, for Marxist thought, social transformation involves a confrontation of the antagonistic classes and therefore through violence. When violence is combined in the plural, it gives rise to mass attacks, which can be explained by the thesis of homicidology. When in addition, it takes place in a public space, it produces riots and vandalism.

Key words: Violence, aggressiveness, aggression, crime, riot

 

 

Introduction 

Il est difficile de réaliser une synthèse des différents courants de pensée sociologique, tant ils sont variés et contradictoires dans leur approche théorique et leur analyse de la violence et de l’agressivité.

Michaud aborde trois théories générales de la violence et de la société :

  • Les approches fonctionnalistes : soulignent le rôle des conflits et des guerres dans le renouvellement social,
  • Le point de vue systémique : sous l’influence des modifications de l’extérieur, le système va soit changer d’état ou soit se détruire, laissant place à un autre système,
  • La conception marxiste : la lutte des classes est le moteur du développement historique,
  • En faveur d’une intervention du milieu social dans la genèse des comportements violents, Karli a cité deux cas : dans le premier une déstructuration sociale et une disparition de facteurs traditionnels (ou phénomène d’acculturation). Dans le deuxième cas, une société peu hiérarchisée sans institutions d’autorité voit dans la violence le seul instrument de « contrôle social ».
  • Les phénomènes d’agression de masse

Les violences ou les agressions de masse se voient quand l’agressivité de l’homme se conjugue au pluriel, celui d’une société toute entière, ou le groupe uni par un territoire, une culture ou une religion soit auteur ou victime d’agressions atroces parfois exterminatrices.

La violence de masse s’explique par la guerre, qui mobilise tous les moyens et toutes les catégories de la population. La guerre a atteint une forme extrême dans le cas du génocide.

a.       La thèse de l’homicidologie

C’est seulement depuis la fin de la deuxième guerre mondiale, soutient Grossman, que les pays occidentaux ont découvert des moyens de conditionner psychologiquement leurs soldats à tuer, lors de combats rapprochés. Avant cela, seule une fraction infime des meilleurs soldats (ou des plus psychotiques) était capable de surmonter leur résistance innée à tuer.

L’un des arguments centraux de Grossman est que le comportement des humains diffère peu de celui des autres animaux. Il en veut pour preuve l’affirmation selon laquelle les animaux d’une espèce donnée ne tuent pas leurs congénères. Il soutient imperturbablement que l’inclination pour le meurtre est un trait nécessairement inculqué par la société.

Ce sont les 2% de la population supposément nés sans cette résistance au meurtre (les « loups » sociopathes) qui commettent la plupart des homicides, tant à la guerre que dans la société civile optimiste.

b.      Le génocide et le crime contre l’humanité

a. Le génocide est un acte commis dans l’intention de détruire, en tout ou en partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux, comme tel: 

  • Meurtre de membres du groupe;
  • Atteinte corporelle grave ou mentale de membres du groupe;
  • Soumission intentionnelle sur les conditions de vie de groupe devant entraîner sa destruction physique totale ou partielle;
  • Mesures visant à entraver les naissances au sein du groupe;
  • Transfert de force d’enfants du groupe à un autre groupe.

En 1948, les Nations Unies ont déclaré que le génocide était un crime international. Un traité international signé par quelque 120 pays, en 1998, a créé la Cour Pénale Internationale (CPI), qui a compétence pour juger les crimes de génocide.

En 1993, le Conseil de Sécurité des Nations Unies a créé le Tribunal Pénal International (TPI) à La Haye l’ex-Yougoslavie, dans les Pays-Bas. C’était le premier tribunal international depuis Nuremberg et le premier à avoir un mandat pour poursuivre le crime de génocide.

b. Les crimes contre l’humanité ont reçu leur définition formelle dans la Charte, ou le statut, de Nuremberg, lors du procès des criminels de guerre nazis.

Quant aux crimes de masse, ils consistent en une destruction pure et simple de civils en grand nombre, souvent accompagnée d’atrocités qui, à première vue, semblent ne « servir » à rien. En guise d’explication, on se contente souvent d’invoquer la « folie meurtrière des hommes » pour la soumission et l’éradication d’un groupe. Différemment, au génocide et au crime contre l’humanité, ils surviendraient en dehors de périodes de guerre. Donc, concernerait les civils, seulement. On en cite :

  • Le meurtre,
  • L’extermination,
  • La réduction en esclavage,
  • La déportation ou transfert forcé de population,
  • L’emprisonnement,
  • La torture,
  • Le viol,
  • La persécution d’un groupe,
  • La disparition forcée de personnes,
  • Le crime d’apartheid.
  • Les émeutes et le vandalisme

L’émeute reste un moyen d’expression plus ou moins violent, pour certaines catégories de population qui sont dépourvues d’autres moyens.

Le terme « émeutes » a souvent été retenu pour qualifier des événements multiformes et violents. Cette désignation sert à décrire des violences collectives qui se déroulent dans les espaces publics et se traduisent par des attaques contre des habitants appartenant à un groupe ethnique et/ou contre les forces de police ainsi que par des destructions assorties de pillages.

Il est possible de distinguer deux types d’émeutes, les émeutes de type « raciales » ou « ethniques », lorsque ces dernières opposent des communautés ethniques, linguistiques ou religieuses entre elles, et les émeutes sociales et politiques lorsque des affrontements se cristallisent autour de différences ou de revendications sociales ou d’une remise en cause de l’autorité publique, étatique.

Ce phénomène est bien souvent la conséquence de plusieurs facteurs combinés tels que la pauvreté, le chômage, un urbanisme inadapté et insalubre, une discrimination et marginalisation sociale, la détérioration des relations entre les forces de police et les habitants.

Les émeutes urbaines se sont inscrites dans l’histoire et le présent des grandes villes. Elles sont décrites comme événements extraordinaires et comme marginales, mais ne sont pas propres à notre époque. Comme le souligne Didier Lapeyronnie, nous pouvons établir des parallèles avec certaines formes de révoltes datant du 18e siècle.

Quant au vandalisme, c’est un comportement attribué, à l’origine, par les romains aux Vandales à l’égard de la culture : la destruction de ce qui est beau et vénérable. Le terme inclus, également, des dommages criminels tels des graffitis et dégradation dirigé vers une propriété appartenant à autrui.

Le terme Vandalisme a été inventé en 1794, pour décrire la destruction d’œuvres d’art après la révolution française. Le terme a été rapidement adopté dans toute l’Europe.

Les recherches criminologiques sur le vandalisme ont montré qu’il servirait à plusieurs fins pour ceux qui s’y engagent et provient d’une variété de motifs.

Rajoutant à cela, une autre agression de groupe, de plus en plus répandue, actuellement, et qui est en rapport avec les activités sportives spécifiques : le Hooliganisme qui est « la production de comportements agressifs produits par un individu dans le contexte d’un spectacle sportif » ou comme « les comportements d’agression physique et de vandalisme, produits par les spectateurs d’une manifestation sportive spécifique, le match de football, et se déroulant dans une zone géographique spécifique, le stade de football et ses alentours urbains ».

Il recouvre en effet deux grands types de violence :

  • Une violence que l’on peut qualifier de spontanée, qui est liée au déroulement du jeu et suscitée par les émotions du moment,
  • Une violence davantage préméditée, qui est le fait d’individus que ne rebute pas le recours planifié à des comportements agressifs.

Les supporters responsables de divers troubles à l’ordre public, sont appelés ‘’hooligans’’, ‘’siders’’, ‘’ultras’’ ou même parfois ‘’hooltras’’.

  • Délinquance et criminalité

Dans l’usage courant, la délinquance est associée aux personnes mineures et la criminalité, quant à elle, aux adultes.

La délinquance définit tout acte criminel commis par un jeune, habituellement de moins de 18 ans. Toutefois, les nombreuses sciences, comme la sociologie, la psychologie et la criminologie, qui se tournent vers cette réalité s’intéressent chacune à un aspect précis de ce phénomène.

Les différentes causes de la délinquance et de la criminalité sont d’ordres sociaux, individuels et biologiques.

La littérature sur la délinquance et la criminalité pointe l’agressivité physique au cours de l’enfance comme un prédicateur crucial des conduites antisociales, en particulier violentes, ultérieures. On peut citer pour illustration l’étude de Scarpa et Reine (1997), qui a montré une agressivité anormale qui peut être supposée à partir de l’observation d’une hypo-réactivité physiologique, et ce dès la petite enfance.

D’autres auteurs se sont intéressés aux trait physionomiques, aux traits caractériels ou mêmes aux conditions d’évolution de ces sujets. De là, plusieurs théories se partagent le débat, comme l’école allemande et la bio-criminogènese, l’école lyonnaise et la sociogenèse.

La théorie du criminel né de Lombroso :

Le XIXème siècle a connu l’accroissement des théories, fidèles à la théorie de la dégénérescence de Morel, sur le caractère héréditaire de la folie et de la criminalité.

Il y eut d’abord, la phrénologie qui postulait que les assassins pouvaient se reconnaître à leur conformation crânienne la “bosse du crime” placée derrière l’oreille.

Lombroso (1835- 1909) avec sa théorie de l’atavisme criminel, a avancé que les crimes commis, dans nos sociétés modernes, étaient imputables à des criminels commettant des forfaits par nécessité biologique. Il présente certains traits anatomiques et sociaux qui le rapprochent du sauvage.

En 1857, Lepelletier de la Sarthe décrit huit types pénitentiaires reconnaissables à leurs méfaits, à leur psychisme et, pour certains, à leur physionomie. Chaque type est marqué par la dominance d’un vice.

Morel lui, définit les dégénérescences comme des déviations maladives héréditairement transmissibles. L’idée à laquelle Lacassagne s’opposa.

Par la suite d’autres théories se développèrent dans cet axe criminologique : les marxistes, l’école de l’interpsychologie de Tarde, l’école de l’imitation et l’école sociologique de Durkheim.

Conclusion 

Le déterminisme sociologique des comportements violents ne fait aucun doute. La multiplicité des facteurs intriqués dans cette relation de causalité rend cependant toute étude précise impossible et peut tout au plus offrir quelques éléments de réflexion.

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  • Lavoine PL, Prédire la dangerosité, VST, N°63, 1999, p.25-27
  • Michaud Y, La violence. coll. : que sais-je ? éd PUF 5° édition 1999

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Réflexions : Une conséquence du conflit environnement/homme : la BPCO

Style de vie occidentalisé, pollution, urbanisation, déforestation, accroissement de la population, vieillissement populationnel accéléré, stagnation de l’espérance de vie patent en Occident, maintiennent la morbidité des maladies respiratoires et par conséquent son poids social.

 

R. BENALI, Faculté de Médecine, Université Badji Mokhtar, Annaba.

 

Style de vie occidentalisé, pollution, urbanisation, déforestation, accroissement de la population, vieillissement populationnel accéléré, stagnation de l’espérance de vie patent en Occident, maintiennent la morbidité des maladies respiratoires et par conséquent son poids social.

La BPCO en est le sommet de l’iceberg d’un groupe d’affections regroupées sous le vocable : “chronic obstructive airways“, dont l’élément commun en est un déficit ventilatoire obstructif qui peut être réversible [cas de l’asthme] ; variable [cas DBB[1]] ; irréversible [cas de la BPCO].

La BPCO, modèle par excellence de l’expression d’un conflit entre l’homme et l’environnement.

La BPCO est la réponse cumulée à des poumons sensibles à la charge totale des particules inhalées et de gaz sur une vie.

La BPCO est un corollaire de la « peste bleue », couleur bleue liée à la fumée de la cigarette. La BPCO a été dénommée “L’inconnue meurtrière” en 2003 par J.F. Cordier, alors président de la Société de Pneumologie de Langue Française (SPLF). Les patients sont inconscients de leur état, ils n’arrivent pas à dénommer leur maladie.

Par son problème de prévalence, son problème de mortalité, son problème de coût, l’impact psycho-social, la BPCO est un fardeau de santé.

Par son approche scientifique : l’interaction gène environnement, par le mode de pensée induit : approche systémique, la BPCO nécessite une approche originale.

Par son installation insidieuse, par l’hétérogénéité de ses morphotypes, par son polygénisme dans son expression génétique, la BPCO peut être considérée comme une exemplarité pédagogique de la médecine 4p en pathologie respiratoire :

Médecine prédictive : La BPCO est le résultat de l’accumulation de dommages moléculaires et cellulaires dès la conception.

Les périodes critiques de la vie, lorsque les poumons sont les plus vulnérables aux dommages, doivent être mises en relief.

L’identification des expositions, biologiques et psychosociales, agissant tout au long de la vie peuvent influer sur la fonction pulmonaire.

La gestation, période vulnérable fait que le tabagisme maternel influe sur le développement des poumons in Utéro. Au cours de la vie post-natale, les dégâts sont causés par des particules inhalées et des gaz.

Physiologiquement, le développement pulmonaire se poursuit après la naissance et la maturité pulmonaire n’est atteinte qu’à la puberté.

Les sports mobilisateurs d’une masse musculaire variée tels que la natation, le tennis, … aideront à rendre plus tonique les muscles respiratoires en vue d’une meilleure ampliation.

Les apprentissages de la respiration normale doivent être soutenus chez l’enfant, ils permettront l’ouverture et la mobilisation des alvéoles collabées.

Aussi, la BPCO ne doit pas être simplement considérée comme une maladie de la sixième décennie de la vie et plus, mais plutôt comme une maladie qui peut avoir ses origines dès la gestation.

“On doit connaître ce qui est bénéfique pour s’y fier, et ce qui est nuisible afin de l’éviter. Comme on doit s’intéresser à ce corps car il n’y a rien de plus proche de nos âmes. On doit préserver sa santé, puisque nos âmes dépendent de lui et la santé de l’âme ne peut être guérie que par celle du corps ». Al-RÁzÐ, Isagoge

Médecine de précision

La prise ne charge de la BPCO doit impérativement se baser sur des outils et supports, validés. L’approche décisionnelle prédomine dans les situations aiguës telles que les exacerbations de BPCO. Les exacerbations sont hétérogènes, l’état critique du patient en est la cible.

Il y a désormais nécessité d’une définition valide, spécifique, discriminative, se basant sur des faits objectifs mesurables, vérifiables et permettant une catégorisation du cas.

       
 

Examen clinique d’un patient en exacerbation BPCO :

1.  Observation : Le patient fait une inspiration brève suivie d’une longue expiration à lèvres pincées, les joues enflent à chaque période inspiratoire, gros cou, exophtalmie (due à un œdème rétro-orbitaire) donnant le « faciès de batracien »

2.  L’insuffisant respiratoire est dyspnéique couché. L’insuffisant cardiaque est dyspnéique assis

·      Le passage d’une position couchée à une position assise est un signe de gravité.

3.  On palpe les muscles du cou, sternocléidomastoïdien : dureté en tronc de cônes signant une fatigabilité musculaire

4.  On mesure la fréquence respiratoire, main à plat sur le thorax.

5.  La pression artérielle pincée signe une hyperpression intra-thoracique

6.  Le PH urinaire doit être vérifié à l’aide d’une bandelette è le passage d’un ph alcalin a un ph acide est un signe de gravité.

7.  Un saturomètre périphérique doit être posé.

8.  L’élocution du patient est vérifiée : il n’arrive pas à parler, parle en mots ; parle en phrases.

 

 

Quels Outils pour préciser le diagnostic ?

Confirmation de EABPCO :

Dyspnée : échelle visuelle analogique ≥ 5

Neutrophiles ≥70%

C réactive protéine ≥ 3mg/l

 

Quels examens para cliniques ? pour quelle utilité ? Éliminer ce qui n’est pas exacerbation

·      Pneumonie Rx thorax

·      Pneumothorax Rx thorax

·      Embolie pulmonaire D-Dimères

·      Insuffisance cardiaque Pro BNP ( brain natriuretic peptide concentration)

·      Infarctus myocarde ECG, Troponine

·      Arythmie ECG, Troponine

Outils pour préciser la thérapie

Viral : Dosage sérique

Bactérie : Couleur des crachats, cultures,

Concentration de l’interleukine1β dans l’expectoration

Éosinophilies : niveau éosinophilie dans le sang

 

 

 

Médecine personnalisée (soins ajustés), consiste à adapter les traitements en fonction des caractéristiques des patients et de leurs maladies. Il s’agit d’anticiper, grâce à un test diagnostique sur les patients, ceux pour qui le traitement serait le plus bénéfique et ceux pour qui il ne le serait pas.

La broncho-pneumopathie obstructive (BPCO) est une maladie respiratoire impactant fortement la qualité de vie des patients. Son caractère chronique influence sa prise en charge au quotidien et à long terme (exacerbations, rémissions, etc.).

La médecine personnalisée – tant au niveau des thérapeutiques, que de la prise en charge – est donc plus que jamais un des enjeux majeurs de demain.

Personnaliser la prise en charge pharmacologique, c’est identifier les phénotypes pour la prescription de corticoïdes (présence d’éosinophiles),

Personnaliser l’activité physique adaptée (cf. Thèse F. Atoui).

Personnaliser l’éducation : pertinence sociolinguistique, plan d’action validé (cf. Thèse F. Atoui).

 

Médecine participative 

Le patient porteur de BPCO a une perte de l’estime, une culpabilisation vis à vis d’un mal qu’il s’est auto infligé. Il est porteur d’une maladie chronique qui exige des outils de surveillance (le souffle et l’oxygène se mesurent), et une coordination de la prise des médicaments inhalés.

Le soin n’est pas seulement de nature technique exclusive, c’est un composite intégrant aux techniques, les humanités appliquées, l’éthique (notion de bienfaisance et de non-malfaisance), l’équité, la spiritualité du patient , la préservation de l’autonomie du patient, pour une approche soignante globale.

Chaque soignant est porteur de ce que nous appelons :

  • Les repères : la technicité et,
  • Les valeurs : les humanités difficiles à définir (aide à vivre et à se situer en société, avoir des préférences, avoir des rapports avec autrui, tenir compte des besoins de l’autre). Elles sous-tendent la dignité, le respect, la liberté.

Le qualificatif “bon soignant” , est attribué à un soignant qui est organisé, efficace, gestionnaire de son temps et respectueux de la feuille de route. Ces qualités sont recherchées par les managers de santé. Le qualificatif “bon soignant”, est attribué à un soignant qui appréhende le patient par l’écoute, cerne ses besoins, pratique une écoute attentive, établit une relation empathique avec le patient, réfléchit aux finalités des soins qu’il a à exécuter, agit avec ses humanités et ses valeurs.

Le parcours du patient en soins respiratoires doit avoir : une visibilité, une lisibilité, un partage et une continuité. La relation patient- soignant n’est plus hiérarchique, elle ne doit pas infantiliser le patient, c’est une relation sachant-sachant.

Un soignant n’est rentable aux patients chroniques qu’au sein d’une équipe. En 1975, C. Boelen avait organisé à Constantine, un séminaire OMS : l’équipe de santé. L’équipe de santé assurera la continuité des soins, la qualité des soins, la formation permanente des membres et développera le sens de l’écoute, de la cohésion, du partage, de l’échange, la gestion des stress, de la coordination, en développant une communication inter et extra membres.

Références :

1.      Ben-Shlomo Y, Kuh D. A life course approach to chronic disease epidemiology: conceptual models, empirical challenges and interdisciplinary perspectives. Int J Epidemiol 2002;31:285–293.]

2.      [World Health Organization. Report on the global tobacco epidemic, 2011: MPOWER. Geneva: WHO; 2011.]

3.      AmbrosinoN, Bertella E : life style interventions in prevention and comprehensive management of COPD Breathe 2018;14:186-194

4.      Catherine Vernay Psychologue clinicienne centre hospitalier Annecy Genenevois. L’empathie, un élément clé dans la relation de soins

5.      Daniel Maroudy, Des principes et des valeurs pour prendre soin. c/o Soins, Elsevier Masson SAS 65, rue Camille des moulins 92442 Issy-les-Moulineaux France

6.      C. Boelen expert OMS Seminaire OMS : l’équipe de santé ;1975 Constantine. Algérie

7.      F. Atoui, Thèse de DESM : Programme d’éducation thérapeutique pour les patients souffrant de BPCO, Faculté de médecine Annaba 2017

8.      Haute Autorité Santé , PACTE, s’engager pour réduire les incidents associés aux soins 21fev. 2018 Janvier 2018 : rapport final de l’expérimentation.

 

[1] DDB =Dilatation des Bronches

 

 

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Réflexions : Le poumon

La pandémie du SARS-Cov-2, la Covid-19, a mis en exergue, à juste titre, la place de l’organe : « poumon ».

 

R. BENALI, Faculté de Médecine, Université Badji Mokhtar, Annaba.

 

La pandémie du SARS-Cov-2, la Covid-19, a mis en exergue, à juste titre, la place de l’organe : « poumon ».

Les yeux des patients rivés sur le saturomètre d’oxygène, leur vie s’égrainant selon les hausses et les baisses de la saturation d’oxygène, panique dans la famille à la recherche de respirateur pour aider, apporter de l’oxygène à ce soufflet, cet organe qualifié dans le langage populaire de « Mou ».

La représentation sociale des difficultés respiratoires est un « halètement ». Or, rien n’est plus troublant pour un être humain que de voir un homme haleter, se noyer dans l’air ambiant.

Au XVIème siècle, Molière dans la pièce « le malade imaginaire » a fait du poumon, la source de tous les maux pour l’homme.

Ce dialogue de l’acte III, scène 10 en est révélateur :

Toinette :            ” Ce sont tous des ignorants. C’est du poumon que vous êtes malade”.

Argan :                 ” Du poumon ? “

Toinette:             ” Oui. Que sentez-vous ? “

Argan :                 ” Je sens de temps en temps des douleurs de tête “.

Toinette:             ” Justement, le poumon “.

Argan :                 ” Il me semble parfois que j’ai un voile devant les yeux “.

Toinette:             ” Le poumon “.

Argan :                 ” J’ai quelquefois des maux de cœur “.

Toinette:             ” Le poumon “.

…/…

…/…

Toinette:             ” Le poumon, le poumon, vous dis-je ! “

Le poumon, cette interface entre le monde extérieur (l’environnement) et le monde intérieur, est le réceptacle de tous les aérocontaminants. Les systèmes de défense spécifiques et non spécifiques y sont neutralisés et débordés.

Une conjonction de facteurs naturels, manufacturés, humains, tels que les faiseurs d’opinion, ont joué un rôle de façon consciente ou non à la détérioration de cet organe.

Pour ne citer que Molière, vis-à-vis du tabac, dans la pièce de Dom Juan: « Il n’est rien d’égal au tabac : c’est la passion des honnêtes gens, et qui vit sans tabac n’est pas digne de vivre ».

Le poumon a été malmené dès la création du monde par les feux de forêt, les irruptions volcaniques, où fumées et particules s’associent pour agresser les poumons.

Au vingtième siècle, la première guerre mondiale, avec les gaz moutarde et le tabac manufacturé, a instauré une agression pérenne des poumons.

La consommation tabagique, l’industrialisation intensive, l’exploitation violente de la nature (déboisement, mines souterraines et à l’air libre, torches de gaz), la motorisation des moyens de transport avec une énergie fossile sont autant de facteurs qui ont engendré une pollution atmosphérique. L’air en est devenu irrespirable et nos poumons le réceptacle des ces nuisances.

Dans nos villes, dans nos villages, dans nos hameaux, dans nos immeubles aux appartements à parois minces, ce ne sont plus les chants des coqs qui annoncent le réveil matinal mais le concert des tousseurs.

La toux, réflexe naturel des poumons, annonce une détérioration d’une situation où nous sommes immergés de façon inconsciente.

Il y a une vingtaine d’années, on avait commencé à parler de l’âge pulmonaire et certains cliniciens ont proposé de le substituer à la citation : « j’ai l’âge de mes artères ».

Les poumons reflètent mieux l’âge d’un individu ; les poumons commencent à subir des agressions in utéro, tel qu’en atteste la participation non négligeable de la prédisposition in utéro dans la genèse de la BPCO.

Dans les années 80, la Société Algérienne de Pneumo-phtisiologie a élaboré un slogan adapté à notre situation socio-économico-sanitaire : « Respirer mieux pour vivre longtemps ».

Face à la dégradation de notre environnement, le changement climatique aidant, ajouté à une société agressive, stressante, trépidante, il y a nécessité de réapprendre à respirer.

Le stress consubstantiel à nos sociétés “modernes”, engendre une respiration insuffisamment ventilante. Nous expirons trop vite, trop peu, trop mal.

Nous sommes au contraire très nombreux à hyper-ventiler en permanence. Nous respirons trop vite, trop fort, trop mal.

Beaucoup d’entre nous ont la mauvaise habitude d’inspirer par la bouche.

L’évolution des espèces a façonné l’être humain pour qu’il inspire par le nez ; les narines faisant office de filtres mécaniques (notamment pour les microbes !), et l’inspiration nasale jouant un rôle de filtre chimique en stimulant la synthèse du monoxyde d’azote (NO), un composé extrêmement important pour notre corps. Ce gaz est en effet un vasodilatateur pour les vaisseaux sanguins, un régulateur du système nerveux parasympathique (celui qui calme le stress), et un acteur non négligeable du système immunitaire.

Il en résulte un déséquilibre constant entre le dioxygène et le dioxyde de carbone. Plus vite on expulse le CO2, moins on absorbe l’O2.

Il y a un siècle, un individu moyen respirait 4,9 litres par minute.

Nous en sommes aujourd’hui à 12 litres par minute !

Cette croissance vertigineuse de la consommation fait que nos cellules sont de moins en moins oxygénées.

Nous avons une ventilation superficielle, nous hyper-ventilons parce que nous sommes stressés ; un cercle vicieux s’installe, nous aggravons le stress parce que nous hyper-ventilons.

Nous devons respirer mieux en inspirant plus calmement et en expirant plus profondément, jusqu’à vider complètement ses poumons par des exercices d’apnée.

Ce terrain respiratoire dégradé représente une urgence sanitaire : « Réapprendre à respirer correctement ! ».

Revoir complètement sa façon de respirer, tant à l’inspiration qu’à l’expiration. Réapprendre, la respiration et ses vertus puissamment thérapeutiques. Le souffle a, en effet, un incroyable pouvoir : « entamer une transformation personnelle de ses habitudes. »

La clé du souffle ouvre l’accès à un mieux-être global.

Linda Stone, chercheuse américaine, employée dans l’entreprise APPLE, rencontrait des problèmes respiratoires qu’elle a rapidement imputés à son travail sur écran ; le traitement de ses e-mails s’accompagnait invariablement d’un changement de sa respiration.

Elle en a identifié un mal, “l’apnée de l’e-mail”, et s’est mise à étudier le sujet, constatant que 80% des personnes retiennent leur souffle lorsqu’ils sont en train de répondre à leurs e-mails. Cette cassure de la fluidité respiratoire entraîne une sensation de stress qui est la réaction normale du corps à l’apnée.

Des chercheurs des universités de Taïwan et de San Francisco ont mené une étude conjointe qui a montré que lorsqu’ils écrivaient des messages sur le téléphone, les adolescents présentaient un rythme respiratoire modifié : soit leur souffle devenait plus court, soit ils le retenaient complètement. Leur tension musculaire en était modifiée, leurs épaules se crispaient, leur nuque se raidissait et leur tête se mouvait vers l’avant. En somme, nos adolescents, en rédigeant leurs messages, activent leur système nerveux sympathique et connaissent un état de tension dans leur corps, voire une réponse de vigilance accrue connue comme “fight or flight”, combattre ou s’enfuir.

Sur le long terme, cette altération du bien-être a une incidence sur la concentration, la mémoire, les facultés d’apprentissage et renforce également les tendances dépressives et l’anxiété.

Le rythme respiratoire normal s’appelle l’eupnée. Des rythmes anormaux, il y en a pléthore : l’apnée, la rétention du souffle, la dyspnée – une sensation subjective d’être court en air, l’hyperventilation – une respiration au rythme trop rapide, l’hyperpnée – une respiration très profonde, l’orthopnée – qui ne permet pas de respirer allongé, la respiration Kussmaul – profonde et rapide, la respiration de Biot – rapide avec une phase d’apnée…

Tous ces rythmes respiratoires, dits anormaux, créent des réactions chimiques et mécaniques dans le corps et peuvent donc engendrer des maux.

Références

 

  • I-Mei Lin et Erik Peper, “Psychophysiological patterns during cell phone text messaging: A preliminary study”, Applied Psychophysiology & Biofeedback, vol. XXXIV, Février 2009, p. 53-57.
  • Sherriff, A. Maitra, A. R. Ness, Calum Mattocks, Christopher “Association of duration of television viewing in early childhood with the subsequent development of asthma”, Riddoch, J. J. Reilly, J. Y. Paton et A. J. Henderson, Thorax, vol. LXIV, no 4, 2009, p. 321-325.
  • “Ferme ta bouche et sauve ta vie”.
  • Belisa Vranich, Breathe, St. Martin’s Griffin, 2016.
  • Fang Lin, Sriranjani Parthasarathy, Susan J. Taylor, Deborah Pucci, Ronald W. Hendrix et Mohsen Makhsous, “Effect of different sitting postures on lung capacity, expiratory flow, and lumbar lordosis”, Archives of Physical Medicine and Rehabilitation, vol. LXXXVII, no 4, Avril 2006, p. 504-509.
  • Jean Marsac, “Variabilité de la fréquence cardiaque : un marqueur de risque cardio métabolique en santé publique”, Bulletin de l’Académie nationale de médecine, vol. CXCVII, no 1, 2013, p. 175-186.
  • Jean-Philippe Gouin, Sonia S. Deschênes et Michel J. Dugas, “Respiratory sinus arrhythmia during worry forecasts stress-related increases in psychological distress”, Stress, vol. XVII, no 5, Septembre 2014, p. 416-422.
  • Jean-Philippe Gouin, Kerstin Wenzel, Soufiane Boucetta, Jordan O’Byrne, Ali Salimi et Thien Thanh Dang-Vu, “High-frequency heart rate variability during worry predicts stress-related increases in sleep disturbances”, Sleep Medicine, vol. XVI, no 5,mai 2015, p. 659-664.
  • Stéphanie Brillant : L’incroyable pouvoir du souffle . Prenez les commandes Domaine du possible. Acte sud Collection créée par Cyril Dion en 2011.©Actes Sud, 2021.ISBN 978-2-330-14359-6 www.actes-sud.fr.

 

 

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Aspects psychologiques et de qualité de vie chez les patients souffrant de BPCO

a bronchopneumopathie chronique obstructive est une pathologie multi-systémique, qui altère la qualité de vie des patients. La multiplicité des atteintes concourt à réduire leurs capacités de coping face à cette pathologie complexe.

H. Hocine, Psychiatrie, Faculté de Médecine Université Badji Mokhtar, Annaba

Date de soumission : 13 février 2021

Résumé : La bronchopneumopathie chronique obstructive est une pathologie multi-systémique, qui altère la qualité de vie des patients. La multiplicité des atteintes concourt à réduire leurs capacités de coping face à cette pathologie complexe. Les troubles psychiques sont des complications dominées par l’anxiété, la dépression et les troubles cognitifs. Les états post-traumatiques, les troubles du sommeil et de la sexualité s’articulent autour d’un vécu constant d’asthénie. Les mécanismes physiopathologiques communs à ces troubles expliquent leur intrication. L’arrêt du tabagisme est un moyen efficace pour réduire l’effet du principal facteur de risque de survenue de BPCO.

Mots clés : BPCO, qualité de vie, dépression, inflammation, tabac.

Abstract: Introduction: Chronic obstructive pulmonary disease (COPD) is a multisystem disorder which disturbs the patient’s quality of life. The aim of our focus was to describe the COPD’s impact on mental health, psychological functions and its burden on patients’ quality of life. Method: we asked Cochrane and PubMed databases in the 20 last years and obtained 905 articles. Results: COPD is a complex disease, it reduces the coping’s efficiency of the patients, by the multiple systemic dysfunctions. The psychological consequences are anxiety, depression, cognitive disorder. Post-traumatic stress disorder, sleeping and sexual disturbances are increased by long term asthenic feeling. COPD and many psychological illnesses have common mechanisms such as inflammation. Smoking cessation reduces the risk to develop COPD. Conclusion: COPD prevention depends of opting for healthy behaviours and smoking eviction.

Key words: COPD, quality of life, depression, inflammation, smoking, mental health, sleeping, sexuality.

 

Introduction : La bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO) est une pathologie chronique inflammatoire des bronches et du parenchyme pulmonaire. Elle se caractérise par un rétrécissement progressif et une obstruction permanente des voies aériennes entrainant une gêne respiratoire [1]. La surmortalité exponentielle des BPCO, en fera la 3ème cause de mortalité, en 2030 selon l’OMS [2].

Le poids des comorbidités

La BPCO est associée à une forte comorbidité et ne peut être considérée comme une pathologie, exclusivement pulmonaire. Les mécanismes physiopathologiques liés au stress oxydatif, aux altérations des voies de signalisations internes, ainsi qu’aux phénomènes inflammatoires qui la sous-tendent, sont systémiques [3]. Outre les effets de la Cathepsine C, au niveau local, l’augmentation du tBNF et des taux circulants de cytokines est plus marquée qu’en population générale [4]. Ce qui explique, en partie, la co-occurrence dans 97,7% des cas, de pathologies cardio-vasculaires, métaboliques, musculaires, osseuses et de troubles psychiques (53,5% des patients souffrant de BPCO ont plus de 4 comorbidités). Leur impact sur la qualité de vie est important. Chaque comorbidité rajoutée augmente le ressenti d’être en situation de soins de 43% et alourdit le poids de la pathologie sur la vie du patient [5]. Les patients souffrant de BPCO ont trois fois plus de troubles psychiques qu’en population générale [6].

Addiction tabagique et BPCO 

Plusieurs étiologies génétiques et environnementales sont incriminées dans l’installation et l’aggravation des BPCO. Le tabagisme chronique, y compris passif, est le principal facteur de risque puisqu’il est associé à 80% de cas de BPCO [7]. Malgré son rôle nocif, 34 à 49% des fumeurs maintiennent cette conduite addictive après le diagnostic des BPCO [8]. Pour ces patients, la difficulté du sevrage tabagique est liée au niveau élevé de consommation, à l’ancienneté du tabagisme, à la sédentarité, au niveau socio-économique bas et à une dépendance plus élevée à la nicotine [9]. Ce maintien à la limite du suicide, interpelle les soignants et les met en échec, d’autant que les bénéfices du sevrage tabagique sur l’évolution de la BPCO sont prouvés. Certains patients, en pré-contemplation, sont dans la dénégation et minimisent l’effet du tabac. Ils sous-estiment leur capacité de résister à l’envie de fumer, et une possible amélioration suite à l’arrêt. Pour certains “c’est trop tard” [10]. Les études ont démontré l’efficacité variable des protocoles de sevrage nicotinique. Le bupropion est plus efficace que les substituts nicotiniques (patchs, gommes) au cours des BPCO [11].

Qualité de vie 

La qualité de vie du patient qui souffre de PBCO est altérée directement par la dyspnée et indirectement par la convergence de troubles qui se potentialisent mutuellement [12].

La BPCO va s’interposer entre la personne et chaque activité qu’elle envisage d’accomplir, perdant la liberté d’opter pour l’intensité, le type de tel effort et la diversité de telles tâches. Il faut, constamment, choisir entre 2 activités, et anticiper la survenue d’une exacerbation au cours d’un projet. Au fil des décompensations et de l’installation insidieuse de l’asthénie, le patient se sent moins performant, ce qui le déconditionne à initier une action. Les gestes de la vie les plus anodins, sont calculés, triés pour éviter d’entamer un capital énergétique ou en oxygène en déclin constant. La vie sociale, les projets professionnels sont révisés à la lumière de la BPCO, le patient se voit progressivement contraint à renoncer à des pans entiers de son fonctionnement.

Le patient est en alarme constante. Il se sent traqué, à la merci d’un changement climatique, d’un taux d’humidité trop élevé en été et en hiver, d’une saturation de l’air par le pollen au printemps, ou d’un refroidissement annonciateur d’une surinfection en automne. Chaque saison est perçue comme un danger potentiel. Il suffoque intérieurement, par l’atrophie de son périmètre de vie autant que par la bronchoconstriction. Les hospitalisations sont des événements perturbants qui le renvoient à son incurabilité [13].

BPCO et états de stress post traumatiques (ESPT)

Chaque exacerbation est vécue comme un événement traumatisant, menaçant la vie du patient. Dans le contexte de la pandémie de la Covid-19, les patients souffrant de BPCO ont développé des tableaux liés au stress, plus marqués qu’en population générale. La prévalence de réaction de stress élevé lié au Covid-19 est de 10,6%, avec un risque d’ESPT de 11,3%. Ces patients avaient une plus grande perméabilité au stress, surtout aux menaces physiques. Le taux de dépression était estimé à 31,5% [14].

Les patients admis au service de réanimation suite à une exacerbation de leur BPCO sont plus susceptibles de développer un état de stress post traumatique (ESPT) (48%). Le risque de mort est réel ou perçu, et marque le fonctionnement du patient. L’ESPT peut modifier le pronostic de la maladie du fait de conduites d’évitement incompatibles avec une réhabilitation respiratoire. Il accroit le risque de survenue de complication addictives, dépressives ou anxieuses [15].

 

BPCO, dépression et anxiété

La dépression et l’anxiété sont des complications des BPCO, leurs prévalences respectives, au cours de cette pathologie, sont de 50%, 33% séparément et 43% associées [16]. Leur fréquence change d’une étude à l’autre. Pourtant, elles sont sous diagnostiquées. Seules 27-33% des dépressions sont diagnostiquées et traitées comme telles, du fait de l’hétérogénéité des outils de diagnostic et de l’absence de démarche systématique pour rechercher cette complication. D’où l’intérêt d’évaluer l’humeur des patients à l’aide de l’échelle “Depression anxiety stress scale 21” (DASS-21) qui a été validée pour le diagnostic de la dépression et des états anxieux au cours des BPCO [17]. La comorbidité, avec la dépression et l’anxiété, prolonge la durée d’hospitalisation et expose à une forte comorbidité en post-hospitalier. Les patients considèrent que la dépression et l’anxiété réduisent leurs capacités à se prendre en charge et à gérer leur BPCO [18].

Non diagnostiquée, et donc non traitée, la dépression chez les patients porteurs de BPCO contribue à l’altération de l’état de santé des patients, et influe négativement sur leurs compétences sociales. Elle accentue le sentiment de fatigue, freine le rétablissement physique et provoque une surconsommation de soins [19].

Les études sur les moyens thérapeutiques de la dépression au cours des BPCO, ont montré une meilleure tolérance des inhibiteurs spécifiques de la recapture de la sérotonine (ISRS) par rapport aux autres classes d’antidépresseurs. Les patients sont plus compliants aux thérapies cognitives et comportementales (TCC) par rapport aux traitements antidépresseurs. Les personnes d’âge avancé présentent des limites au traitement : plus impactées par la dépression mais moins sensibles aux traitements et porteuses de plusieurs comorbidités. Les traitements de la dépression apportent des bénéfices mitigés, avec une amélioration à court terme par les TCC et les antidépresseurs mais à long terme le maintien du bénéfice thérapeutique est non concluant. D’autre part, les antidépresseurs ne réduisent pas la dyspnée de la BPCO, (comparativement à leur effet sur les signes respiratoires de l’anxiété chez les patients anxieux non atteints de BPCO) [20]. De meilleurs résultats sont obtenus par l’association des TCC avec les antidépresseurs inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine [21].

BPCO, asthénie et dénutrition

L’asthénie, symptôme transversal lié à l’hypoxémie, à la dénutrition, à la dépression, est quasi constante. La dyspnée provoque un déconditionnement de la personne à initier l’effort. La fonte musculaire entretient un sentiment constant de fatigue. Multifactorielle, cette fonte musculaire est due à la sédentarité, à la myopathie périphérique, à l’action des cytokines pro-inflammatoires TNF-? et IL-6, à la balance énergétique négative lors des exacerbations, à l’hypogonadisme qui favorise la résorption osseuse (effet de la testostérone et des œstrogènes) [22].

La dénutrition, plurifactorielle, est due à l’asthénie, aux difficultés de mastication dues à la dyspnée lors des épisodes d’exacerbation, à la perte musculaire par baisse des apports, à la réduction de l’appétit liée à une dépression ou à des perturbations de la leptine, ou par déséquilibre de la balance énergétique [23]. Les modifications d’ordre hormonal se traduisent sur le plan métabolique et constitutionnel par un aspect atrophié lié à l’hypogonadisme et, plus directement, à des troubles sexuels.

BPCO et sexualité

La sexualité est peu ou pas abordée au cours des consultations ou du suivi par le médecin traitant. Indicateur fiable du niveau d’énergie du patient et composante importante de sa vie, les tabous ou la focalisation sur des aspects techniques de l’état du patient pourraient expliquer la négligence de l’évaluation de l’activité sexuelle. Une étude a porté sur 751 patients, dont deux tiers aux stades 3 et 4 de la BPCO. Pour 67%, le score de l’échelle Arizona Sexual Experience Scale (ASEX) indique des difficultés à toutes les étapes de l’acte sexuel. Les patients se plaignent d’une baisse du désir dans 68% des cas, des troubles de l’excitation (dysfonction érectile 60% et défaut de lubrification 58% des femmes), et de l’orgasme respectivement 46% et 28% des femmes et des hommes. Ils ne sont que 6% à consulter pour ces difficultés. Seulement 10% des médecins abordent la sexualité des patients [25].

Des ajustements de l’activité sexuelles sont pointés : modifications, de la fréquence, de la durée ou des positions, recours à une pharmacothérapie pouvant aider l’acte sexuel (recours aux bronchodilatateurs pour 43% des personnes avant l’acte ou facilitateurs de l’érection pour 13% des hommes. Dans une autre étude, en réponse à un questionnaire (Index international de fonction érectile), 75% des patients atteints de BPCO de degré moyen à sévère présentent une dysfonction érectile, dont la gravité augmente avec celle de la BPCO. Un tiers des patients souffrant de BPCO a arrêté toute activité sexuelle [23].

Sommeil et BPCO

“L’overlap syndrome est une entité controversée, qui désigne la coexistence d’une BPCO et d’un syndrome d’apnée obstructive du sommeil. Il peut être observé dans 1% des cas de BPCO [26].

L’association des deux, expose le patient à un risque majeur de désaturation durant le sommeil, d’arythmie, d’insuffisance cardiaque droite, et d’hypertension pulmonaire [27]. Les exacerbations des BPCO seraient plus sévères et justifient des hospitalisations plus fréquentes dans l’overlap syndrome [28].

Troubles cognitifs et BPCO

La prévalence des troubles cognitifs au cours des BPCO est estimée à 36%, alors qu’en population générale, elle est de 12%. Le lien avec les BPCO est expliqué par l’hypoxie et l’hypercapnie d’une part, et par un contrôle cortical de la respiration prenant le relais de la régulation par le tronc cérébral. Les comorbidités cardiovasculaires et métaboliques contribuent au déclin cognitif [29]. La survenue de troubles cognitifs implique des mesures spécifiques pour aider les patients à adhérer au projet thérapeutique. Cependant, le dépistage de troubles cognitifs chez ces patients, répond à la même logique qu’en population générale [30].

Conclusion 

Le respect des règles d’hygiène de vie, l’éviction du tabac et des polluants atmosphériques, l’inscription dans une logique durable, sont les principaux moyens de prévenir les BPCO. Les troubles psychiques concomitants, dépassent des réactions psychologiques pour s’inscrire dans un continuum physiopathologique.

 

Liens d’intérêts : Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts.

 

 

Références:

 

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Éducation thérapeutique des patients, Outil incontournable de prise en charge de la broncho-pneumopathie chronique obstructive

La BPCO est une maladie chronique globale, générale, à expression pulmonaire dont l’évolution est rythmée par des poussées d’exacerbations. Malgré les progrès scientifiques accomplis ces dernières années

 

F. Atoui, R. Benali, Pneumologie, FACMED, UBM Annaba

Date de soumission : 01 Mars 2021

 

Résumé : L’éducation thérapeutique se définit selon l’OMS comme étant l’attitude de « former le malade pour qu’il puisse acquérir un savoir-faire adéquat afin d’arriver à un équilibre entre sa vie et le contrôle optimal de la maladie. L’éducation thérapeutique du patient est un processus continu qui fait partie intégrante des soins médicaux. Elle comprend la sensibilisation à l’information, l’apprentissage du traitement, le support psychosocial, tous liés à la maladie et au traitement. « La formation doit aussi permettre au malade et à sa famille de mieux collaborer avec les soignants » OMS. Selon A. Deccache : « l’éducation du patient est un processus par étapes, intégré dans la démarche de soins comprenant un ensemble d’activités organisées ». La BPCO, grande méconnue, fait que les patients s’intègrent tardivement, dans la chaîne de soins, à un stade d’irréversibilité. Par ailleurs, les progrès de la médecine offrent des traitements palliatifs efficaces mais ayant peu d’impact sur la qualité de vie des patients. Pour mieux soigner les patients et lever les différents préjugés, il est impératif de considérer le patient comme un partenaire. L’éducation thérapeutique en est la démarche idoine.

Mots clés : maladie chronique, BPCO, patient, sensibilisation, apprentissage, partenariat.

Abstract: Therapeutic education is defined according to the WHO as the attitude of “training the patient so that he can acquire adequate know-how in order to achieve a balance between his life and optimal control of the disease. Therapeutic patient education is an ongoing process that is an integral part of medical care. Therapeutic education includes: information awareness, treatment education, psychosocial support, all related to illness and treatment. “The training must also allow the patient and his family to collaborate better with the caregivers” WHO. According to A. Deccache: “patient education is a step-by-step process integrated into the care process comprising a set of organized activities”. The largely unknown COPD causes patients to enter the chain of care late in the process, at a stage of irreversibility. In addition, medical advances offer effective palliative treatments but have little impact on the quality of life of patients. To better care for patients and remove the various prejudices, it is imperative to consider the patient as a partner. Therapeutic education is the appropriate approach.

Key words: chronic disease, COPD, patient, awareness, learning, partnership.

 

Introduction

La bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO), chronique dans son évolution, systémique dans ses impacts, handicapante dans ses conséquences et déstructurante à l’échelle tant individuelle que communautaire, entraine, au-delà des symptômes respiratoires qu’elle engendre, des symptômes anxieux et dépressifs révélateurs d’un manque de compréhension du patient vis-à-vis de sa maladie, de difficultés d’ajustement psychologique face à une pathologie déstabilisante à plus d’un titre et d’une solitude appuyée d’un sentiment de culpabilité pour un mal auto-infligé ; s’ensuivent inéluctablement : isolement et marginalisation.

Sur le plan communautaire, la BPCO constitue un problème majeur de santé publique. Elle tend à occuper la troisième place en termes de mortalité et la cinquième place en termes de handicap, d’ici 2030.

Ses coûts de prise en charge, aussi bien au long cours qu’en hospitalisations pour exacerbations sont considérables, faisant des répercussions socio-économiques de la BPCO un axe prioritaire d’intérêt public.

Aussi, en regard de ses conséquences tant individuelles que collectives, une approche globale du patient serait la solution idoine où ce dernier est considéré dans son intégralité, où l’approche se doit d’être double, tant médicamenteuse que non médicamenteuse, physique et éducative et où l’alliance thérapeutique prend tout son sens avec, à cet effet, changement des comportements aussi bien du praticien que du patient ; le premier, devant en plus du savoir et des connaissances vis-à-vis de la maladie, adopter un savoir-être et un comportement face au patient qui ne devient désormais plus qu’un simple objet de sa maladie mais plutôt un apprenant devant, à son tour, acquérir un savoir-faire et des compétences lui permettant de faire face aux différentes situations et aspects imposés par sa maladie. Il devient ainsi acteur à part entière de sa propre prise en charge.

L’approche globale du patient BPCO est volontiers une approche tridimensionnelle :

  • Éducative, reposant sur des principes andragogiques où le patient apprendra par la mise en pratique, les acquis de l’expérience, l’interactivité et où le renforcement de soi et du sentiment d’utilité primera.
  • Médicale, prônant la démarche génétique chez une population, le plus souvent de plus de soixante ans. Cette approche s’inscrira dans le temps où, eu égard à la tranche d’âge concernée, la stimulation mnésique continue et le développement de la coordination cerveau-gestuelle seront les principaux chevaux de bataille.
  • Physique, centrée sur un coaching ayant pour objectif l’accompagnement du patient et l’entretien de sa motivation dans la prise en charge de sa maladie.

Une telle approche, intégrative, personnalisée, pertinente et prédictive ne trouvera sa plénitude que dans un programme d’ETP.

L’ETP étant l’attitude de former le malade pour qu’il puisse acquérir un savoir-faire adéquat afin d’arriver à un équilibre entre sa vie et le contrôle optimal de sa maladie. C’est un processus continu, faisant partie intégrante des soins médicaux et basé sur la sensibilisation, l’information, l’apprentissage et le support psychosocial, tous liés à la maladie et au traitement.

Au cours d’une ETP, ce dernier doit acquérir des compétences d’auto-soins et d’autres d’adaptation.

Pour ce qui est des compétences d’auto-soins, l’attention sera orientée sur la capacité du patient à comprendre sa maladie, à se repérer dans l’évolution naturelle de cette dernière et à analyser les différents paramètres inhérent à son évolution : le patient devra désormais être apte à faire face à certaines situations aiguës qui se présenteront à lui au décours de sa maladie chronique et à décider et choisir la meilleure option qui s’offre à lui, d’adapter un traitement à sa situation, de le réajuster ou de l’initier tout en utilisant les ressources du système de soins à disposition.

En termes de compétences d’adaptation, le patient sera amené, au fil de l’ETP, à prendre confiance en lui, à développer un sentiment d’auto-efficacité avec renforcement de l’image de soi, le tout lui permettant de mieux gérer les émotions et le stress pouvant être engendrés par sa maladie chronique et ainsi être plus à même de s’observer, s’évaluer et de “tirer la sonnette d’alarme” en toute objectivité.

Proposer une éducation thérapeutique à un patient, c’est le mettre au centre des préoccupations et des actions tout en gardant à l’esprit que l’ETP est un prolongement des soins et qu’elle doit, pour être efficiente, être pertinente sur le plan socioculturel.

Le processus d’ETP découle ainsi d’une stratégie managériale centrée sur le patient auquel nous devrons transmettre les connaissances et compétences nécessaires à la gestion de sa maladie.

A cet effet, nous devons utiliser les croyances et ressources du patient, identifier ses besoins, négocier avec lui les objectifs de vie et de santé réalisables, le motiver par un renforcement de son estime de soi et l’aplanissement des divergences et résistances en les transformant en facteurs de renforcement du changement plutôt que comme des freins, en valorisant les succès les plus infimes et en utilisant les échecs comme outil d’amélioration.

Dans le cadre de la BPCO, certaines contraintes seront inéluctablement rencontrées au cours de la démarche d’ ETP :

  • L’hétérogénéité des patients en termes de degré de sévérité de la maladie, de niveau socio-économique, du degré de littératie en santé et de maitrise de la linguistique usuellement utilisée en pratique courante.
  • La dépendance de certains patients à un aidant qui devra lui-même être intégré dans le processus d’ETP.

Un programme d’ETP en BPCO devra donc tenir compte de l’ensemble des déterminants de la maladie et des ressources et besoins des patients et de leurs aidants.

Globalement, l’accent devra être mis sur :

  • les connaissances de la maladie et de son traitement.
  • les compétences d’auto-soins et la maitrise des techniques d’utilisation des dispositifs d’inhalation.
  • l’importance de l’activité physique adaptée, en prévision du déconditionnement musculaire engendré par cette pathologie handicapante à plus d’un titre
  • la maitrise des techniques de respiration et de désencombrement bronchique permettant de réduire l’inconfort respiratoire accusé au décours de cette pathologie systémique à point de départ respiratoire.
  • une adaptation nutritionnelle en prévention de la dénutrition, conséquente du déconditionnement engendré par la maladie et constituant un facteur de mauvais pronostic de la maladie.

Un programme d’ETP spécifiquement adapté aux patients BPCO, articulé autour d’objectifs répondant aux priorités sus-citées et adoptant une stratégie d’apprentissage et outils pédagogiques pertinents, répondant aux principes d’andragogie, à la prise en considération du degré de littératie en santé et en prônant résilience et motivation, ne peut qu’être bénéfique et salutaire pour le devenir des patients qui y sont soumis.

En effet, les programmes d’ETP, en diminuant le nombre de consultations abusives et d’hospitalisations ont prouvé leur apport dans l’amélioration des soins en maitrisant les coûts.

L’évaluation de tels programmes d’ETP BPCO a mis en exergue un apport certain en termes :

  • d’enrichissement des connaissances des patients vis-à-vis de leur maladie, de son traitement, de l’identification des signes d’aggravation et de gravité ainsi que de la maitrise des techniques d’inhalation.
  • d’amélioration des compétences et attitudes des apprenants qui deviennent plus observants, augmentant leur périmètre de marche et niveau d’activité physique autant que faire se peut et modifiant leurs habitudes alimentaires à la faveur d’une alimentation riche en protides et pauvre en hydrate de carbone pour contrecarrer les effets de la dénutrition qui guette les patients BPCO.
  • d’amélioration du retentissement de la maladie, sous tendue par le niveau de qualité de vie et le degré d’anxiété et de dépression appréhendés chez ces patients.

Sur le long terme, IMC, tolérance à l’effort et fonction respiratoire tendent même à se stabiliser voire s’améliorer.

L’apport de l’ETP structurée sous forme de programme d’ETP spécifiquement adapté aux patients BPCO n’est donc plus à démontrer.

Pour leur pérennisation, ces programmes se doivent d’être évolutifs au même titre que les progrès scientifiques et médicaux et le changement de profil des patients, l’organisation sanitaire doit être revue et la formation du personnel de santé doit être impérativement adaptée aux besoins de santé de la population.

 

Liens d’intérêts : Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts.

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Point de vue sur la BPCO en pratique libérale

Nécessité d’établir des recommandations nationales pour améliorer le diagnostic et la prise en charge des patients atteints de BPCO.BPCO

R. Chahed, Pneumologue Pratique libérale, Tizi Ouzou

 Date de soumission : 20 février 2021

Résumé : Nécessité d’établir des recommandations nationales pour améliorer le diagnostic et la prise en charge des patients atteints de BPCO.

Mots clés : BPCO: fréquente en pratique libre; traitement palliatif, recommandations GOLD, changement de classification, contraintes : tabagisme non contrôlé ; caisse de remboursement,  nécessité de spirométrie pour le diagnostic.

Abstract:    Need to establish national recommendations to improve the diagnosis and management of patients with COPD

Key words:   COPD: common in free practice; palliative treatment, GOLD recommendations, change in classification, constraints: uncontrolled smoking; reimbursement fund, need for spirometry for diagnosis

La BPCO a toujours occupé une place importante dans notre pratique quotidienne en médecine libérale. Nous avons toujours insisté sur le diagnostic précoce de cette affection sournoise et d’évolution lente mais aux conséquences fâcheuses, je veux parler de l’IRC et du handicap qu’elle génère et de toutes les conséquences systémiques qui en résultent (amyotrophie musculaire, ostéoporose, dépression.). 

Sur le plan thérapeutique nous sommes passés du néant où la BPCO était considérée comme une maladie chronique incurable ne nécessitant aucun traitement, aux recommandations GOLD qui insistent sur le traitement en vue d’améliorer la dyspnée d’effort, la tolérance à l’exercice et la qualité de vie. L’objectif majeur est de ralentir le déclin du VEMS et de retarder l’IRC. Les recommandations ont évolué depuis 2007 à ce jour, nous sommes passés d’un traitement basé sur l’EFR exclusivement à la classification basée sur le nombre d’exacerbation/année, les symptômes et les comorbidités. Nous pensons que cette vision est plus pragmatique et très utile en pratique routinière, ses avantages sont nombreux : 

  • Une évaluation plus précise des patients.
  • Une prise en charge adéquate des comorbidités.
  • Une consommation moindres des corticoïdes inhalés. 

Par ailleurs, dans la prise en charge de la BPCO, nous sommes confrontés à de multiples obstacles : 

  • Le nombre élevé de patients BPCO qui continuent de fumer malgré nos conseils répétés à chaque consultation. 
  • Une absence de couverture sociale pour bon nombre de patients qui ne peuvent de ce fait se permettre d’acheter les médicaments (LABA/LAMA). 
  • Le diagnostic se fait à un stade tardif malheureusement (Grade C et D) 

 

Liens d’intérêts : Je suis régulièrement sollicité par plusieurs laboratoires (Abdi Ibrahim, Astra Zeneca, Hikma, Cipla, Chiesi, Boehringer) pour les EPU et des Webinaires.

 

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